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C’était en 1965

Ma grand-mère me parle d’un temps que les moins de 51 ans ne peuvent pas connaître… À cette époque pas si lointaine, être une Française mariée, c’était comme redevenir une petite fille… Car si les femmes célibataires avaient une certaine autonomie financière, elles devenaient légalement des «incapables» sitôt la bague passée au doigt. Elles n’avaient alors plus le droit d’ouvrir un compte bancaire, de signer un chèque ou un contrat de travail, sans l’autorisation formelle de leur époux.

Par contre, elles avaient souvent le devoir de gérer le budget familial gagné par l’époux. Bref, comptabiliser l’achat des livres de viande, des mottes de beurre, prouver la nécessité d’acheter un nouveau gilet au gamin, négocier chaque denrée au marché et transformer les bas morceaux en mets de choix… à défaut, se priver pour nourrir la fratrie et le mari.

Pourquoi donc? Parce que, «quoi qu’on dise et quoi qu’on veuille, dans le mariage existera toujours une division du travail voulue par la nature», expliquait alors le ministre de la Justice, Jean Foyer. Oui, si la femme est incapable de s’assumer et capable de tâches ménagères, c’est dans sa nature, nous apprennent les lois terrestres. Du moins, jusqu’au 13 juillet 1965. Ce jour-là, dans un hémicycle (déjà) à moitié vide, des députés votaient la réforme des régimes matrimoniaux qui reconnaissait soudain l’égalité juridique des femmes, pour ce qui est du droit de gérer elles-mêmes leurs biens personnels, de travailler si ça leur chante et même de s’opposer à la vente d’un bien immobilier commun.

Comme quoi, la nature humaine est capricieuse…

C’était il y a à peine un demi-siècle, en France (au Luxembourg, il a fallu attendre 1973!), me rappelle ma grand-mère. À la télévision, un reportage nous montre un de ces nombreux pays où les femmes mariées sont encore «soumises» ou «incapables». Aujourd’hui, une quinzaine de pays empêchent encore les femmes de travailler sans la permission de leur mari et 155 pays disposent toujours de lois qui empêchent les femmes d’accéder librement au travail. «Certains progrès sont beaucoup plus lents que d’autres», soupire ma grand-mère…

Romain Van Dyck

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