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Mesures climatiques : l’ACL se braque


D'après Jean-Claude Juchem (à dr.), le directeur de l'ACL, «le consommateur sera une vache à lait pour l'État.» (Photo : Didier Sylvestre)

L’Automobile Club, accompagné par l’ULC, a fortement critiqué les mesures climatiques du gouvernement. Selon lui, en plus d’être sans effet, elles seront à la charge de la population.

Taxe sur les véhicules automobiles basée sur la nouvelle norme WLTP, augmentation des accises sur les carburants et de la taxe CO2 sur les énergies fossiles (dans le secteur de la mobilité et du chauffage) ou encore réforme de la taxe automobile en 2021 : la lutte contre le réchauffement climatique s’était traduite par une salve d’annonces de la part du gouvernement il y a quelques semaines. Et cela n’a pas manqué de faire réagir l’ACL et l’ULC, qui sont montés au créneau vendredi.

L’Automobile Club et l’Union des consommateurs dénoncent une approche «idéologique et radicale des politiques», qui n’aura «pas d’effets sur le climat» en plus de «peser sur le portefeuille des ménages». Du propre aveu d’Yves Wagner, le président de l’ACL, «les problèmes de la mobilité et du climat sont très complexes». Le même homme est conscient que le Luxembourg part de loin avec 14,88 tonnes de CO2 produites par habitant en 2017 contre une moyenne européenne de 8,9 tonnes. Nullement découragé face aux défis de demain, Yves Wagner, flanqué de son directeur, Jean-Claude Juchem, ne comprend pas les récentes décisions du gouvernement : «Nous travaillons depuis longtemps avec les différents ministères et administrations et nous avons de très bonnes relations. Mais nous avons l’impression que nos idées passent largement après celles du gouvernement. Je prends l’exemple de la sécurité routière. Nous avons travaillé ensemble et fait des compromis pour proposer des mesures concrètes. Et la première mesure mise en place par le gouvernement a été d’installer des radars, soit la dernière de nos priorités, mais comme cela rapporte de l’argent…»

Jusqu’à 550 euros de taxe en plus par usager

Le président de l’ACL est revenu sur les différentes mesures annoncées pour lutter contre les émissions de CO2 qu’il juge soit pas assez ambitieuses, soit sans effet, et surtout coûteuses pour les ménages. «Le consommateur sera une vache à lait pour l’État», se permet même Jean-Claude Juchem. Un argument repris par Nico Hoffmann, le président de l’ULC, qui s’interroge: «Est-ce une politique cohérente? Est-ce une politique sociale?» La réponse semble négative à l’entendre. «Il n’y a pas d’alternative viable à la voiture pour le moment, tant que les services des transports en commun ne sont pas au point. On culpabilise les gens et on les fait payer, rien de plus», assure encore Nico Hoffmann. Il faut dire que selon les estimations de l’ACL, la nouvelle norme WLTP, l’augmentation des accises sur les carburants et l’augmentation de la taxe CO2 pourront peser «jusqu’à 550 euros de plus par an pour les usagers uniquement pour rester mobile», peste Jean-Claude Juchem. Il faudra encore y ajouter le coût de la prochaine réforme fiscale sur l’automobile. L’ACL estime que l’État va empocher plus de 7,5 millions d’euros rien qu’avec la nouvelle norme WLTP et entre 100 et 150 millions d’euros sur la taxe CO2. «Les impacts sur la décarbonisation seront nuls et le détail de la redistribution de ces recettes n’est pas encore annoncé», renchérit l’ACL. Se voulant constructif sur le sujet, l’ACL a présenté une série de mesures et d’idées qu’il juge plus efficaces.

Le gouvernement oublie le biogaz, l’hydrogène…

L’ACL demande de prolonger la prime d’aide à l’achat d’un véhicule électrique qui expire à la fin de l’année. Il souhaite également que cette prime soit plus équitable pour le consommateur. Concrètement, l’ACL réclame que cette aide soit plus élevée pour les véhicules d’entrée de gamme et moins importante pour les véhicules haut de gamme comme les Tesla. Il demande aussi l’introduction d’une prime à la casse conditionnée afin d’encourager la destruction d’un véhicule polluant. Une telle mesure éviterait qu’un vieux véhicule se retrouve à polluer à l’étranger.

Toujours dans l’électrique, l’ACL demande au gouvernement une stabilisation des prix du kWh pour la recharge d’un véhicule électrique au Luxembourg, afin de rassurer les consommateurs et éviter les mauvaises surprises. En effet, en janvier dernier, le kWh est passé de 0,20 euro à 0,26 euro, soit une augmentation de 30 %. Surtout, l’ACL souhaite que le gouvernement s’attelle à une réforme du système des voitures de société, qui représentent 47 % des nouvelles immatriculations et 23 % du parc automobile national. «Actuellement les personnes ayant un véhicule de société ne vont pas utiliser des alternatives comme le covoiturage ou les transports en commun gratuits, car ils paient cette voiture et ils consomment ce pour quoi ils dépensent de l’argent, explique Jean-Claude Juchem. Nous ne remettons pas en cause les voitures de société, qui contribuent à un parc automobile récent et donc moins polluant. Mais nous souhaitons la mise en place d’un « budget mobilité » afin d’inciter les gens à se diriger vers des alternatives et de les récompenser. »

Le directeur de l’ACL a également insisté sur le besoin d’informer les consommateurs pour qu’ils puissent faire des choix avisés, car la «voiture électrique n’est pas la solution à tout. Elle consomme des ressources rares. La production, le cycle de vie et le recyclage des batteries posent de nombreuses questions, tout comme les bornes de recharge. Le gouvernement pousse vers l’électrique, mais oublie de mettre la même énergie dans des technologies alternatives, comme les moteurs biogaz, l’hydrogène ou encore les derniers moteurs diesels qui polluent beaucoup moins que les moteurs essence. » Reste à savoir si les doléances de l’ACL et de l’ULC vont être entendus par François Bausch, le ministre de la Mobilité, qui défend celle de demain au Luxembourg.

Jérémy Zabatta

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