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Au-delà d’Amazon, la bataille contre les ruses fiscales n’est pas gagnée


Coup de pub d'un "mauvais payeur" ou vraie repentance fiscale de la part d'Amazon ? (Photo illustration AFP)

Coup de pub d’un « mauvais payeur » ou vraie repentance fiscale ? Au-delà des promesses de transparence du géant Amazon, la bataille pour soumettre les multinationales à l’impôt est loin d’être gagnée.

Venant d’Amazon, c’est-à-dire d’un géant du numérique, secteur à la très mauvaise réputation fiscale, l’annonce a forcément fait du bruit : le géant de la vente par internet a commencé à déclarer ses revenus au Royaume-Uni, en Allemagne, en Espagne et en Italie, et va le faire en France. Et non plus les comptabiliser au Luxembourg.

Laurent Leclercq, avocat fiscaliste du cabinet Fidal, relativise toutefois, soulignant qu’Amazon « n’est pas forcément bénéficiaire » dans chaque pays. Le groupe, dans le rouge au premier trimestre au niveau mondial, ne payera donc pas automatiquement plus d’impôts. Sa décision est donc « tactique », souligne l’avocat, pour qui le geste vise à la fois à corriger la mauvaise réputation fiscale du groupe, et à mettre la pression sur d’autres grands noms du numérique. Tout en donnant des gages à la Commission européenne, qui justement enquête sur les liens entre Amazon et le Luxembourg.

Si payer ses impôts dans le pays où l’on fait ses bénéfices semble aller de soi, c’est en réalité rarement le cas pour les multinationales, qui grâce à des stratégies sophistiquées de facturation, plus ou moins légales, font voyager leurs revenus d’un pays à l’autre, au gré des taux d’imposition. Ces pratiques, désignées sous le terme générique « d’optimisation fiscale », sont de plus en plus critiquées.

La crise de 2008 a entraîné dans de nombreux pays des cures de rigueur budgétaire, incitant les États à traquer toute déperdition fiscale, via la fraude des particuliers fortunés, ou les ruses des entreprises. Dans le viseur, en particulier, les géants du numérique telles qu’Amazon, Google ou Apple : opérant avec des biens immatériels (marques, brevets), avec un minimum de personnel salarié et de présence physique dans les pays, elles peuvent en effet jouer facilement des lacunes d’une fiscalité internationale dépassée.

Si l’offensive a été rapide contre la fraude des particuliers, et devrait se traduire dès 2017 par des échanges automatiques de données entre fiscs du monde entier, la lutte contre l’optimisation des entreprises est plus difficile, à la fois en raison de l’extrême technicité du sujet, et de résistances politiques.

Pour Pascal Saint-Amans, pilote à l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) des négociations fiscales internationales, l’annonce d’Amazon n’est pas réellement une surprise. « L’entreprise montre sa volonté d’être un précurseur dans l’adoption du plan BEPS », sorte d’arsenal de règles anti-optimisation qui doit être validé en fin d’année par les chefs d’États du G20.

« Les entreprises bougent parce qu’elles anticipent un changement des règles internationales, mais elles continuent à mener un lobbying très dur contre ce même changement », relayé dans certains cas par les gouvernements, pointe Pascal Saint-Amans. Du coup, jusqu’ici, la riposte contre l’optimisation n’est pas très coordonnée et chacun a tendance à mener sa propre campagne.

Le Quotidien/AFP

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