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Quand un fort Vauban sur une île bretonne est loué via AirBnB


Le fort du Petit Bé en face de Saint-Malo, le 22 août 2017. (Photo : AFP)

Pierre par pierre, récupérées sur la Côte d’Emeraude et transportées sur son bateau à moteur, Alain-Etienne Marcel restaure depuis plus de 15 ans le Fort du Petit Bé en face de Saint-Malo. Pour financer son vaste chantier, le jeune retraité loue cette forteresse militaire du XVIIe siècle via AirBnB.

«Je préfère vous dire que ce n’est pas Versailles ici !», lance le maître de lieux à ses hôtes du jour. Il est vrai que ce fort, conçu par l’architecte Vauban à la demande de Louis XIV, fut érigé pour la défense de la prospère cité corsaire des assauts anglais et hollandais.

A 700 mètres des remparts de Saint-Malo, «le Petit Bé pouvait accueillir une garnison de 160 hommes. Il était armé de 19 canons et de deux mortiers», détaille son propriétaire breton de 72 ans au groupe de 20 personnes venues de Belgique, d’Angleterre et du Canada. L’ancien huissier de justice est féru d’histoire et «plus spécialement des bâtisses Vauban». Il a contribué pendant 23 ans à la restauration du Fort National, autre ouvrage de l’ingénieur français, à Saint-Malo et en a assuré les visites lors de ses «loisirs». «Fort de cette expérience, le maire m’a dit, +je suis prêt à vous donner le Petit Bé si vous en faites la même chose+», confie-t-il.

Un bail emphytéotique d’une durée de quarante ans est passé entre la cité corsaire et M. Marcel en janvier 2000 pour assurer la restauration du fort, classé Monument Historique en 1921, mais délaissé pendant près d’un siècle. Avec sa bande de copains, le Breton se lance dans ce chantier titanesque. «Tout était à l’abandon, il a fallu remonter à la surface de l’eau pierre par pierre», soit 173 blocs transportés sur son petit bateau à moteur. «Il ne faut pas compter les heures sinon on devient fou», assure le maître des lieux qui a pris sa retraite à 70 ans.

N’ayant plus les mêmes revenus, Alain Etienne-Marcel décide alors de proposer son bien en location sur Airbnb. Une réservation pour une nuit s’élève à 600 euros, que l’on vienne en couple et à plus de 15 personnes, ce qui revient alors à 40 euros par tête, explique l’élégant breton, foulard autour du coup. A ce prix, les locataires bénéficient d’une bâtisse sur trois niveaux. A l’étage, des lits de camps de soldats reconstitués à l’identique, dont un lit «incliné car à cette période, la position horizontale est considérée comme celle du mort», raconte M. Marcel.

Conditions sommaires

Le Petit Bé, juché sur un rocher, vit au rythme des marées et de la météo. L’accès se fait en bateau ou à pied. La durée d’ouverture peut varier entre 30 minutes et quatre heures, une dizaine de jours par mois. Au rez-de-chaussée, la cuisine se résume «tout bonnement à une cheminée». Devant la maison, 800 m2 de gazon où il est possible de camper. Le conditions sont sommaires comme «lorsque la ville de Saint-Malo était en proie aux guerres maritimes». Le propriétaire s’est refusé à en faire une bâtisse de luxe mais fournit «à la demande «glace pilée, fromage et bon vin du coin».

«C’est fou de pouvoir dormir dans un lieu qui a plus de 300 ans où des militaires ont dormi, défendu la ville», s’enthousiasme Sophie Beaugeard, Canadienne de 43 ans. Pour les bourses les plus modestes, le fort reste ouvert au public pendant la journée, moyennant six euros. Alain y assure les visites en plus de ponçage, rabotage ou ramonage des six cheminées..

« Grimper sur un canon »

«Une projection dans le temps vraiment extraordinaire», résume Wendy, venue de Bruxelles. Timothée, 8 ans, a «adoré les histoires de batailles contre les Anglais et grimper sur les canons».

Le garant de lieux a laissé les clés de son fort aux locataires d’un soir. «D’ici à huit ans», Alain-Etienne Marcel espère achever la restauration du Petit Bé et le transmettre à ses deux filles «afin de perpétuer la mémoire de ce patrimoine militaire».

Le Quotidien/AFP

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