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[Livre] Le Luxembourg autrement, vu par ses citoyens


Qui mieux que les citoyens eux-mêmes pour parler de leur pays ? (illustration Julien Garroy)

Au Grand-Duché, les politiques ont leur «Nation Branding». Dans un élan plus authentique, les citoyens, eux, racontent leur pays dans un atlas «subjectif», compilant visuellement leurs réflexions sur l’identité luxembourgeoise.

490_0008_15189261_large_nocropDe loin, et en ne négligeant pas les clichés, le Luxembourg, ce sont avant tout les banques, l’argent roi, les frontaliers pressés, les stations (pour l’essence, les cigarettes et l’alcool), sans oublier la famille grand-ducale, si lointaine et pourtant omniprésente. Tandis que les politiques, eux, essayent de contrecarrer les poncifs et s’échinent à placer, à grands coups de slogans, leur pays sur la carte du monde, certains citoyens prennent le contre-pied, cherchant à saisir, avec sincérité, un instantané identitaire.

Et l’affaire n’est pas mince dans une nation d’une folle richesse multiculturelle, comptant plus de 613 000 habitants et lieu de travail pour plus de 450 000 personnes. Cela n’a toutefois pas fait peur à Annelys Devet, qui a pris l’habitude, depuis 2003, de s’appuyer sur des contributeurs de tous horizons qui, ensemble, cherchent à souligner les spécificités d’un lieu qu’ils habitent, qu’ils fréquentent… D’où l’appellation d’atlas «subjectif», car on est ici dans l’ordre du ressenti. «Ici, on tente de saisir la réalité du moment et, surtout, de donner la voix aux citoyens», témoigne la designer néerlandaise qui, en 15 ans, a transposé ce projet dans douze endroits différents.

C’est au Casino, il y a plus d’un an, que l’idée s’est matérialisée. Attaché à cet esprit participatif, le musée s’est fendu d’une table de quinze mètres de long, épicentre autour duquel enfants, scolaires, artistes et autres participants lambda ont pu nourrir leurs réflexions identitaires – que signifie être Luxembourgeois quand la majorité des habitants sont issus de l’immigration ? Quelle image alternative pour casser les stéréotypes liés à l’argent ? Quel impact culturel pour le pays quand on part faire ses études à l’étranger ? – puis «cartographier» le tout au moyen d’infographies, de photos, de dessins…

Kaléidoscope identitaire

«C’est un vrai puzzle !», explique Véronique Kesseler, l’une des chevilles ouvrières de la proposition, qui s’est délectée des discussions et rencontres, «aussi intéressantes» que le résultat en lui-même. Ainsi, sur 191 pages, Subjective Atlas of Luxembourg raconte le Grand-Duché au «quotidien», des instantanés humoristiques, charmants et parfois critiques qui, mis bout à bout, offrent un aperçu d’une réalité vue par une centaine de personnes qui vivent et/ou travaillent au Luxembourg.

Un kaléidoscope identitaire plutôt bien vu qui parle, entre autres, d’architecture, de jardins communautaires, de vélos et des pistes cyclables très «dangereuses», de graffitis, d’innombrables cafés, de prestigieuses vitrines côtoyant des enseignes en déclin, de maisons modernes et d’anciens logements ouvriers, de la nature résistante au développement urbain, de gastronomie, de transports publics saturés… Véronique Kesseler y a aussi apporté sa contribution en arpentant deux semaines durant les boulangeries pour y faire le plein des fameux beignets («Verwurelter»), «la seule bonne chose durant le Carnaval» pour elle.

Durant les entrevues, Annelys Devet a, en outre, remarqué que la population étrangère avait tendance à avoir une image plus positive du pays tandis que les Luxembourgeois, étaient plus critiques. De là à approuver le dicton «l’argent ne fait pas le bonheur» ? «Personne, en tout cas, ne se sentait à l’aise d’être riche», avoue-t-elle. Autre particularité, soulignée par l’excellent travail de Vito Labalestra : le Grand-Duché, comme son identité, est en constante évolution. «Oui, il serait vraiment intéressant de refaire le même exercice dans quelques années», conclut Véronique Kesseler.

Grégory Cimatti

«Subjective Atlas of Luxembourg», à retrouver sur le site Subjective Editions
Également en vente au Casino, chez Alinea et chez Ernster (19,50 euros)

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