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[Expo] Edward Steichen, seul et avec tous à la Villa Vauban


Existe-t-il une relation entre l'art photographique d'Edward Steichen (1879-1973) et la peinture? La Villa Vauban, à travers une quarantaine de clichés de l'icône nationale et une sélection d'oeuvres d'artistes grand-ducaux, cherche à le prouver.

La Villa Vauban met en lumière les relations multiples qui existent entre l’art photographique d’Edward Steichen et la peinture, dans un face-à-face entre certains de ses clichés et des œuvres d’artistes luxembourgeois.

Quelque 44 clichés d’Edward Steichen (1879-1973) font partie des fonds de la Photothèque de Luxembourg depuis 1980. Ils se dévoilent ici, aux côtés d’œuvres d’artistes luxembourgeois– Jean Schaack, Frantz Seimetz, Pierre Blanc, Dominique Lang, Lily Unden, Harry Rabinger –, montrant, dans une approche chronologique, à quel point le photographe a toujours cherché à repousser les limites de sa discipline.

Photographe de mode autant que reporter de guerre, portraitiste du Tout-Hollywood comme conservateur du MoMA de New York, Edward Steichen (1879-1973), immense figure de la photographie aux multiples facettes et icône nationale, a toujours vu l’art dans son ensemble, généreux et sans barrière. Rien d’étonnant que sur l’un de ses autoportraits, datant de 1901, il pose avec pinceau et palette, comme pour célébrer le peintre qui s’ignore. Que dire alors de son œuvre phare, The Pond-Moonlight (1904), aux accents clairement impressionnistes?

Si ces deux clichés ne figurent pas dans l’exposition «Time Space Continuum» de la Villa Vauban, l’idée est là : célébrer le photographe dans son audace et sa volonté, permanente chez lui, de chercher le meilleur, de s’exprimer le mieux possible, et ce, quels que soient les styles abordés (portrait, paysage, nature morte, publicité, sculpture, architecture, nu, documentation de guerre)… Dès ses premiers faits d’armes, d’ailleurs, Edward Steichen refuse la photographie purement figurative, y ajoutant des éléments puisés dans sa propre formation en lithographie, mais surtout en dessin et en peinture.

En attestent ses travaux datés du début du XIX e siècle, aux contours peu marqués, à la lumière diffuse et aux transitions fluides, tout en douceur. La suite, et son engagement militant dans le pictorialisme, courant sécessionniste qu’il cofonde avec Alfred Stieglitz en 1902, épouse les mêmes convictions : élever la photographie au rang d’art. Rapidement, on le retrouve aux côtés de l’avant-garde parisienne – Brancusi, Picasso, Manet, Renoir, Matisse, Toulouse-Lautrec, Cézanne et surtout Rodin, son ami –, des artistes qu’il invite dans sa galerie new-yorkaise «291», au brassage hétérogène.

"The Blue Sky" (1923), d'Edward Steichen. (photo artists rights society / the Edward Steichen estate)

« The Blue Sky » (1923), d’Edward Steichen. (photo artists rights society / the Edward Steichen estate)

«Laisser respirer son œuvre»

Avec cette envie inaltérable de prendre des chemins de traverse, Edward Steichen va poursuivre ses recherches, s’amuser des techniques – contraste, composition, profondeur de champ, ombre-lumière, montage, filtre – pour développer une œuvre singulière, même quand il s’agit de publicités, de photographies de mode ou de portraits de célébrités – le musée propose notamment celui, relativement connu, de Greta Garbo, mais également ceux de Charlie Chaplin, Marlene Dietrich et Theodore Roosevelt. Certains clichés confinent même à l’art expérimental, comme celui qui donne son nom à l’exposition ( Time Space Continuum , vers 1920), abstrait à souhait.

"Portrait d'une jeune fille" (1916), de Pierre Blanc. (photo Villa Vauban)

« Portrait d’une jeune fille » (1916), de Pierre Blanc. (photo Villa Vauban)

Finalement, la confrontation voulue avec des peintures et des sculptures d’artistes luxembourgeois, issues de la collection de la Villa Vauban (Jean Schaack, Frantz Seimetz, Pierre Blanc, Dominique Lang, Lily Unden, Harry Rabinger), n’aura pas l’effet escompté : surtout parce que le choix, réduit – « par manque d’espace et pour garder un côté intimiste à la réunion », explique-t-on du côté du musée –, souffre de la comparaison avec la puissance historique et qualitative du travail d’Edward Steichen.

En voulant « laisser respirer son œuvre », la Villa Vauban aura au moins montré une évidence  : si, à l’époque, le célèbre photographe s’est ouvert au monde et aux autres, aujourd’hui, il n’a plus besoin de personne pour exister.

Grégory Cimatti

Villa Vauban – Luxembourg. Jusqu’au 15 avril 2018.

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