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Expo à Neimënster : Zweig entre luxe, Gestapo et exil


Klemens Renoldner devant l'impressionnante maquette de l'ancien hôtel Metropole,. (photo Fabrizio Pizzolante)

Stefan Zweig est à l’honneur à Neimënster jusqu’au 8 avril. Sa vie, son œuvre, mais également son exil, pour fuir les nazis, et ses amitiés sont présentés de bien belle manière.

Une photo gigantesque et un énorme et luxueux tapis rouge accueillent le visiteur de l’agora Marcel-Jullian de Neimënster, dans le Grund. Une invitation on ne peut plus claire à passer les portes des salles voûtées et à plonger ainsi dans l’exposition «Ich gehöre nirgends mehr hin !» (Je n’appartiens à personne) consacrée à Stefan Zweig, l’un des auteurs autrichiens les plus célèbres du XXe siècle dont la vie pourrait être tirée d’un roman dramatique.

Une exposition mise sur pied par Klemens Renoldner, directeur du Stefan Zweig Centre Salzburg, et par le scénographe Peter Karlhuber, présentée, au départ, en 2014 à Vienne et qui nous arrive remaniée et complétée. À Neimënster, elle embarque donc le visiteur dès l’agora avant de se poursuivre dans les caves voûtées. Là, dans un décor feutré et boisé digne d’un grand palace, «on découvre quelques éditions rares de livres de Stefan Zweig, d’étonnantes traductions de certains de ses livres ainsi que de nombreuses photos témoignant de ses luxueux voyages à travers l’Europe», résume le curateur de l’exposition, Klemens Renoldner.

Mais du luxe, on passe rapidement à l’horreur dans la salle de droite, avec le beau tapis qui laisse la place à un décor des plus inquiétants fait de portemanteaux métalliques en forme de cornes et de longues vestes en cuir noir. Une ambiance digne de la Gestapo complétée par une grande maquette d’un palace viennois. «C’est l’hôtel Metropole», explique le commissaire, «un des décors principaux de la nouvelle Le Joueur d’échecs de Zweig, mais aussi siège de la Gestapo de Vienne.»

Des idéaux européens

De nombreuses vitrines présentent des documents sur et autour du livre de Zweig, sur l’histoire de l’hôtel et sur ce basculement entre le luxe et l’horreur. Plusieurs documents vidéo enrichissent la salle, certains écrans étant même cachés à l’intérieur de la maquette, il ne faut donc pas hésiter à s’approcher et à marcher sur le tapis noir et blanc en forme d’échiquier géant.

Dans le fond de la salle, d’autres vitrines rappellent les derniers moments de l’auteur, installé au Brésil, à Petrópolis, où il se suicidera le 22 février 1942 à l’âge de 60 ans. «Zweig était un des écrivains les plus réputés d’Autriche dans les années 20; il vivait dans le luxe, collectionnait les amis célèbres, mais sa vie a été bouleversée par l’arrivée au pouvoir d’Hitler en 1933, car il était juif, reprend Klemens Renoldner. Il quitte donc précipitamment l’Autriche pour la Grande-Bretagne, où il vivra plus de six ans avant de déménager encore à New York puis au Brésil où, terriblement déprimé, il finira par se suicider, la guerre ayant sonné le glas de tous ses idéaux européens.»

Une fin de vie nomade, donc, que met en scène la troisième pièce de l’exposition. Une salle qui donne volontairement un sentiment d’inachevé avec des cadres vides, d’autres déposés les uns devant les autres à même le sol, le reste des documents – principalement des extraits de son importante collection d’autographes – étant présenté non plus dans de jolies vitrines, mais dans d’étonnantes boîtes en carton.

Ce choix de présenter l’œuvre et la vie de Stefan Zweig du point de vue de l’exil est le principal intérêt de cette exposition. Elle lui donne également un côté très actuel. «Stefan Zweig était un réfugié pendant toutes ses dernières années», rappelle le commissaire. «Il en était malade», conclut-il. De quoi rappeler que, selon les moments de l’histoire, l’exil peut aller dans un sens ou dans un autre. Dommage que tous les textes accompagnant l’exposition soient exclusivement en allemand, comme si un tel sujet n’intéressait que les germanistes !

Pablo Chimienti

En plus de l’exposition, Neimënster accueille différents évènements en lien avec Stefan Zweig.

Jeudi 22 février, à 19h «Avant 1914, la terre avait appartenu à tous les êtres humains…». Conférence de l’historien Denis Scuto sur le basculement du monde occidental de l’ère libérale, où l’intellectuel qu’il était pouvait circuler librement et sans papiers, à l’ère nationale, où les voyageurs et les migrants subissent contrôle après contrôle et sont persécutés, que décrit Stefan Zweig.

Samedi 3 mars, à 20h «Echoes». Concert de la soprano Claudia Moulin et du pianiste Grégory Moulin qui présentent leur dernier enregistrement consacré en grande partie au compositeur Richard Strauss, proche de Stefan Zweig.

Samedi 7 avril, à 20h «L’univers musical de Stefan Zweig». Concert de musique de chambre des étudiants du Conservatoire de musique de Luxembourg, concocté par la violoniste Sandrine Cantoreggi, est intercalé de lectures de textes de Stefan Zweig (en allemand et en français) par les étudiants des classes d’art dramatique.

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