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[Critique ciné] Un prince à oublier…


Un projet qui donne vraiment envie sur le papier, mais qui est finalement totalement raté. Malgré la présence d'Omar Sy. (photos DR)

L’affiche du Prince oublié a de quoi faire saliver les cinéphiles ! Il y a à la manœuvre, pour cette comédie sociale, Michel Hazanavicius, réalisateur oscarisé pour The Artist, à l’origine de quelques grands moments de comédie – Le Grand Détournement (1993), la franchise OSS – ou encore du scénario de Delphine 1, Yvan 0 de Dominique Farrugia. Il y a, dans le rôle principal, Omar Sy, César du meilleur acteur pour Intouchables d’Éric Toledano et Olivier Nakache qui a, depuis, réussi à se faire une place à Hollywood et dans le cœur de ses compatriotes qui l’ont élu personnalité préférée des Français en 2016. Et comme si ça ne suffisait pas, Bérénice Bejo et François Damiens font également partie du projet.

Bref, on se dit qu’au niveau de la compétence il y a tout ce qu’il faut pour faire de ce Prince oublié la comédie de l’année. Qu’en est-il au niveau du récit ?

Scénario original écrit par Bruno Merle, le projet met en scène un père dont la vie tourne principalement autour de sa fille Sofia, 8 ans, quand on fait sa connaissance. Il travaille dans un parking en banlieue parisienne et passe sa journée à attendre le moment où il pourra aller reprendre sa progéniture à la sortie de l’école avec un petit macaron comme goûter.

Si sa vie est loin d’être trépidante, le soir, dans la pénombre de la chambre à coucher de sa fille, dans les histoires qu’il invente quotidiennement pour l’endormir, l’homme se transforme en prince et vit des récits extraordinaires dans un monde onirique et couleurs flashy. Tous les soirs, il se bat contre les éléments et contre son ennemi juré, le vilain Pritprout, pour sauver la princesse Sofia.

Le film propose donc un constant aller-retour entre la véritable vie de Djibi et Sofia et la vie rêvée du Prince et de la Princesse. Même si rapidement cette vie bien huilée va s’enrayer.

Car Sofia grandit et si, à 8 ans, écouter religieusement les histoires que lui invente son père est son moment préféré de la journée, à 12 ans, en pleine crise d’adolescence, elle ne veut plus entendre parler de princes et de princesses. Ou plutôt si, mais à la condition que le prince soit Max, ce garçon beau et sympa de sa classe de collège.

Pour Djibi, qui a tout sacrifié pour sa fille, le monde s’effondre. Au sens figuré, bien sûr. Heureusement qu’une nouvelle voisine vient de s’installer sur le palier. Pour le Prince, désormais oublié, par contre, ce sera dans un sens bien plus littéral.

Le film parle donc de la relation entre les parents et les enfants, du pouvoir et de l’importance de l’imagination, de la gestion du passage à l’adolescence, de la reconstruction personnelle après un décès, du premier et du dernier amour, de l’héritage qu’on laisse à nos enfants – qui n’est bien évidemment pas uniquement financier –, etc. Des thématiques intéressantes, pertinentes, qui ne sont pas ici le centre du film, mais qui demeurent néanmoins bien présentes.

Du positif en somme, et pourtant, la sauce ne prend pas. Pas du tout même !

La partie vie réelle change trop vite, la gamine prend quatre ans en un clin d’œil, la relation entre Djibi et sa nouvelle voisine évolue à la vitesse d’un cheval au galop, et celle entre Sofia et Max dépote encore plus que celle des adultes. Niveau réalisme, le compte n’y est pas; et niveau humour, ça devient vite lourd. Et du côté du monde rêvé, c’est encore pire. C’est surjoué, exagéré, aux effets spéciaux limite outrancier et aux influences frôlant le plagiat – les oubliettes font étrangement penser à celles où finit Bing Bong dans Inside Out, le film d’animation de Pixar réalisé par Pete Docter.

En regardant ce Prince oublié, on pense aussi à Demain tout commence d’Hugo Gélin en ce qui concerne la relation d’Omar Sy avec sa fille, mais surtout à Cinéman de Yann Moix au niveau du projet qui donne vraiment envie sur le papier, mais qui est finalement totalement raté.

Pablo Chimienti

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