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[Cinéma] Love & Friendship : manipulation en duo


Chloë Sevigny et Kate Beckinsale brillent dans ce Love & Friendship. (Photo DR)

Avec « Love & Friendship », l’Américain Whit Stillman signe son cinquième film en adaptant librement un roman de la Britannique Jane Austen.

Pour point de départ, un roman épistolaire d’une auteure britannique du XVIIIe siècle, Jane Austen (1775- 1817) : Lady Susan, écrit en 1794 mais publié seulement à la fin du XIXe siècle. Sur les écrans cette semaine, Love & Friendship, le cinquième, nouvel et beau film de l’Américain Whit Stillman, cinéaste rare qui n’avait rien proposé depuis cinq ans et Damsels in Distress avec Greta Gerwig et Analeigh Tipton. Lors d’un récent passage parisien, il a confié avoir travaillé sur le scénario de Love & Friendship pendant plusieurs années en même temps que les autres films qu’il était en train alors de réaliser.

Cette adaptation très libre du texte de Jane Austen («Il y avait suffisamment de place dans ce livre de jeunesse pour que je puisse y apposer ma patte sans violer un chef-d’œuvre», affirme Stillman), il l’a toujours considérée comme un projet particulier, sans la moindre relation avec ce qu’il fait d’habitude. Ce long métrage a pu voir le jour parce que Stillman a trouvé les mots pour convaincre un jeune producteur de théâtre de se lancer, avec lui, dans la production cinématographique !

Tourné en 26 jours en Irlande, Love & Friendship (titre inspiré par une nouvelle de Jane Austen) propose au spectateur un voyage dans le temps (la fin du XVIIIe siècle) et en Angleterre. On y retrouve Lady Susan Vernon, jeune veuve à la beauté et au pouvoir de séduction vertigineux auxquels les membres de la haute société ne sont pas insensibles. Les aléas de la vie auront pour conséquence la dégradation de la situation financière de la Lady – alors, elle n’envisage qu’une solution, pour elle et sa fille adolescente : trouver des hommes riches et les épouser… Avec l’aide de sa meilleure amie Alicia – une Américaine en exil, elle va en cibler deux : le charmant Reginald et Sir James Martin, un aristocrate fortuné mais tellement niais.

Une garce, mais tellement attachante !

Autre confidence du réalisateur : «Quand je me promène à Palm Springs, je vois des Lady Susan à la pelle qui manipulent leurs époux comme des marionnettes et traitent leurs propres filles comme des marâtres parce qu’elles sont jalouses de leur beauté ! Et si Lady Susan a tout d’une vraie garce, elle n’en est pas moins attachante. D’ailleurs, on peut comprendre ses motivations car elle tente de survivre dans un milieu hostile.»

Une des forces et qualités de ce Love & Frienship tient tout dans les dialogues. Des dialogues travaillés au cordeau, au plus près – un véritable petit bijou dans le genre. «Je déteste les expressions branchées, dit aussi Whit Stillman. Dans la vie quotidienne, il m’arrive d’utiliser des expressions de Jane Austen. Et quand mes filles ont vu le film, elles ont cru que je les avais avaient inventées! D’ailleurs, sur le tournage, j’ai souvent encouragé les acteurs à balancer les pires horreurs sur un ton enjoué.»

Comme le roman de Jane Austen, Love & Friendship – porté par les excellentes Kate Beckinsale et Chloë Sevigny, impeccables en duo de la manipulation – brille par un sens rare de l’observation des personnages et une bonne dose d’humour. Certains voudront voir un film féministe, le réalisateur préfère évoquer un film humaniste… Pour le plaisir, on y ajoutera l’ironie et le romantisme.

De notre correspondant à Paris, Serge Bressan

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