Accueil | A la Une | Tiers-payant : «Tout est prêt» dit le ministre, les médecins recadrent

Tiers-payant : «Tout est prêt» dit le ministre, les médecins recadrent


Claude Haagen estime sa part du travail bouclée, et renvoie la balle dans le camp des médecins.  (Photo : julien garroy)

Annoncé pour cette année, le «paiement immédiat direct» permettant aux patients de ne plus avancer leurs frais médicaux, se fait attendre. Claude Haagen martèle que tout est opérationnel, mais le système ne convainc pas les médecins.

Très attendue par les assurés, et promise par le Premier ministre pour cette année, la possibilité de profiter du tiers-payant lors d’une visite chez le médecin tarde pourtant à se concrétiser. Avec le «paiement immédiat direct», fini les justificatifs à envoyer à la CNS, et les délais de plusieurs semaines pour se faire rembourser : toutes les informations nécessaires à la prise en charge sont transmises instantanément à la caisse au moment du paiement au cabinet, et l’assuré n’a plus à avancer ces frais. 

Une révolution pour le système luxembourgeois, d’un autre âge, récemment pointé du doigt par l’ONU, qui regrette que l’accès aux soins reste réservé à ceux qui ont les moyens. Depuis 2013, il existe néanmoins un «tiers-payant social», mais cette mesure ne bénéficie qu’à quelques milliers de patients chaque année, suivis par un office social.

Pour tous les autres – 937 000 assurés à la CNS, travailleurs frontaliers inclus – l’attente est longue, et tout porte à croire qu’elle va se poursuivre. En effet, les nombreuses parties impliquées dans ce dossier hautement inflammable politiquement défendent chacune leurs propres intérêts et ont bien du mal à accorder leurs violons.

Un système qui ne fait pas l’unanimité

Ainsi, en convoquant la presse mardi, à quelques jours des élections législatives, le ministre de la Sécurité sociale, Claude Haagen, a voulu signifier que, de son côté, le travail a été fait. «Tout est prêt» pour le déploiement du paiement immédiat direct, a-t-il martelé face aux journalistes, laissant entendre que tout dépend désormais des médecins, puisque rien n’est obligatoire.

Or, force est de constater que, sur le terrain, le système conçu par la CNS, l’agence gouvernementale e-santé et le ministère, est loin de faire l’unanimité : selon nos informations, quelques dizaines de médecins à peine utilisent le paiement immédiat direct à ce jour, sur les 350 à 500 généralistes que compte le pays.

Un chiffre que Claude Haagen compte faire décoller en leur adressant une circulaire ces prochains jours et en leur rappelant qu’une incitation financière de 625 euros couvre les frais d’installation. «On laisse le choix aux médecins de passer par ce service ou non. Moi, je n’y vois que des avantages. Qu’on fasse maintenant bénéficier les assurés de ce nouveau système», a-t-il lancé, précisant que les médecins spécialistes seront bientôt concernés eux aussi, sans pour autant avancer de date.

«Une façon d’écarter les médecins»

Contacté mardi, Alain Schmit, le président de l’AMMD (Association des médecins et médecins-dentistes), peinait à contenir sa colère : «On n’est pas du tout à l’aise avec la façon de lancer ce système. De nombreux points restent flous en pratique, à commencer par le recueil du consentement explicite du patient pour la collecte et le traitement de ses données de santé», explique-t-il.

Il se dit d’autant plus surpris par la sortie du ministre que les négociations sont «toujours en cours avec la CNS pour régler les modalités d’échange» de ces données ultrasensibles. Et rétorque que ce sont les responsables politiques qui ont entravé l’avancée des travaux entamés par les médecins eux-mêmes : «Quand nous avons créé la GesondheetsApp, ils nous ont freinés. Une façon de garder la main et d’écarter les médecins», estime le président de l’AMMD.

Malgré les annonces du ministre, on comprend que la généralisation du paiement immédiat direct n’est pas pour demain. Précisons pour finir que, peu importe le choix de leur médecin, les assurés qui ne souhaiteraient – ou ne pourraient – pas passer au digital, auront toujours la possibilité de régler les honoraires et de se faire rembourser ensuite, selon la procédure classique.

Un commentaire

  1. Le tiers payant est une sottise car il déresponsabilise les patients.

PUBLIER UN COMMENTAIRE

*

Votre adresse email ne sera pas publiée. Vos données sont recueillies conformément à la législation en vigueur sur la Protection des données personnelles. Pour en savoir sur notre politique de protection des données personnelles, cliquez-ici.