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Révision de la Constitution : des propositions prises très au sérieux


L'intervention de l'ancien vicaire général Mathias Schiltz sur la séparation de l'Église et de l'État a été parmi les plus remarquées lors de l'échange, vendredi, entre les députés et des membres de la société civile. (Photo Hervé Montaigu)

Alex Bodry dit avoir pris très au sérieux les propositions des citoyens concernant la révision constitutionnelle. Ces derniers ont été invités, vendredi, à venir en discuter à la Chambre des députés et ils étaient bien préparés.

C’est une première qui s’est déroulée à la Chambre des députés, vendredi, durant une bonne partie de la journée. Les citoyens qui se sont impliqués dans le processus d’élaboration de la nouvelle Constitution ont pris place dans la salle plénière à la Chambre des députés pour exposer leurs attentes.

Ils avaient eu l’occasion de déposer leurs propositions sur un site internet dédié, au cours de l’été dernier (referendum.lu). Et vendredi, ils sont venus en discuter avec une poignée de députés réunis autour d’Alex Bodry (LSAP), président de la commission des Institutions et de la Révision constitutionnelle. « Je crois que toutes les parties ont été satisfaites », relève ce dernier à l’issue de la séance qui avait débuté dès 8h30. Une quarantaine de personnes étaient attendues et seules quatre ou cinq ont manqué à l’appel.

« Il ne s’agissait pas d’une discussion libre sur la Constitution », explique Alex Bodry qui poursuit : « Les gens étaient bien préparés, non seulement au niveau de leurs interventions, mais encore certains avaient préparé des réponses car ils connaissaient déjà nos positions. » En fait, les participants à cette consultation lancée par la Chambre des députés avaient déjà reçu un courrier dans lequel la commission émettait un premier avis sur les propositions faites. « Il n’y avait pas de surprise », commente Alex Bodry.

Le Grand-Duc « discriminé »

Les interventions avaient été organisées par grands chapitres traitant des droits et des libertés, de la justice, du Grand-Duc, de la Chambre des députés ou encore des établissements publics. « C’est au chapitre des droits et des libertés que les textes peuvent être améliorés. Mais nous savions qu’à ce chapitre, nous avions quelque peu manqué d’ambitions », concède Alex Bodry. Les droits des enfants, comme la protection des animaux seront reconsidérés et améliorés.

Il était aussi question de la langue luxembourgeoise et l’artiste Serge Tonnar faisait remarquer, entre autres, que la « langue luxembourgeoise est la langue des Luxembourgeois et pas forcément la langue du Luxembourg, car cela ne reflète pas la réalité », observe-t-il. Il s’étonne aussi dans son intervention livrée en octobre dernier, que la Constitution stipule que «seuls les enfants nés d’un mariage ont le droit de succéder» sur le trône grand-ducal. Il estime dès lors que le Grand-Duc est discriminé par rapport aux autres citoyens et qu’il ne peut donc pas adopter un enfant qui puisse lui succéder.

«Un homme de gauche»

Intervention remarquée, brillante et en français, celle de Mathias Schiltz, ancien vicaire général, centrait le débat sur la nouvelle disposition contenue dans la Constitution relative à la séparation des Églises et de l’État. « Le profond malaise que j’ai éprouvé à la lecture de ce texte a été le motif de ma participation à ce débat », confie-t-il alors qu’il a cru sentir des « relents d’une laïcité agressive, comme celle qu’a vécue la France à la fin du XIXe siècle ». Sa vision de cette séparation ne doit pas impliquer un rejet du fait religieux ou philosophique.

« J’ai toujours été un homme de gauche », a précisé l’homme d’église qui ne se dit pas opposé au principe de séparation des Églises et de l’État. L’État qui est habilité à accorder un soutien financier aux communautés religieuses et aux organisations philosophiques et non confessionnelles « au même titre qu’il soutient d’autres organismes dont les activités sont utiles à la vie de la société, tout en étant économiquement non rentables », précise Mathias Schiltz, pourrait maintenir les traitements des ministres des Cultes en guise de soutien financier.

Alex Bodry reconnaît qu’il s’agit pour cet article « d’une formulation née d’un compromis politique ». Léon Gloden (CSV) laisse entrevoir la possibilité d’une modification concernant le type de relation que l’État doit avoir avec les Églises. « Peut-être que l’on parviendra à intégrer l’un ou l’autre de vos vœux », laisse-t-il échapper.

Alex Bodry tempère et dit attendre l’avis du Conseil d’État relatif à la première série d’amendements (70 au total), parmi lesquels se trouve le texte sur la séparation de l’Église et de l’État sur lequel tous les partis étaient tombés d’accord. « Si vous n’adoptez pas ma contre-proposition, veuillez soumettre votre texte à une révision et trouver un accord de synthèse alliant le meilleur des deux propositions pour faire de cette Constitution, un phare de liberté de tolérance de respect mutuel et de paix sociale , a répondu Mathias Schiltz.

L’avis du Conseil d’État devrait tomber fin novembre, début décembre. Quant aux citoyens, ils auront droit à d’autres débats, sous d’autres formes, en lien avec la révision constitutionnelle avant le référendum prévu sur la version finale de la nouvelle Constitution que compte se donner le Grand-Duché.

Geneviève Montaigu

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