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Retour du loup au Luxembourg : les éleveurs sur la défensive


Depuis quelques mois, les témoignages se multiplient: le loup pourrait bien avoir posé ses pattes au Grand-Duché. Pour les éleveurs de brebis et de moutons, la menace est réelle, et l'inquiétude grandissante. Même si un éleveur se montre plus «accueillant»... (Photo : AFP)

Après plus d’un siècle d’absence, le «grand méchant loup» est-il de retour? En attendant la réponse des experts, nous avons interrogé des éleveurs du Grand-Duché, partagés entre peur et résignation.

En vadrouille en France, en Belgique et en Allemagne, le canidé a-t-il fait un petit détour par le Luxembourg? C’est tout à fait possible… Début juillet, dans le sud du pays, un agriculteur a justement pris en photo un animal qui y ressemble fortement. D’autant qu’une attaque violente contre des moutons a été signalée – mais pas signée, on cherche encore le coupable – la semaine suivante près de Garnich.

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Bref, le climat est plutôt inquiétant pour les éleveurs du pays. Ceux que nous avons pu joindre sont partagés entre l’appréhension et la résignation, comme cet éleveur dans le sud du pays, qui préfère rester anonyme : «Franchement, on ne sait pas quoi faire, on attend la confirmation qu’il s’agit bien d’un loup. On a des prospectus qui nous expliquent comment réagir, mais vu qu’on ne sait pas s’il est bien là…», explique-t-il, perplexe.Il ajoute : «Si on apprend que oui, on va sûrement devoir ajouter des clôtures. On n’a pas le choix, nos troupeaux, c’est notre vie. Mais en même temps, j’ai regardé sur internet, et apparemment ce n’est pas une clôture qui arrêtera un loup.»

«Le problème aussi, c’est que les loups ne s’attaquent pas forcément qu’à une proie, ils peuvent en mordre plusieurs.» Cet éleveur s’inquiète aussi pour ses chiens de troupeau : «On a des border collies, dont des jeunes, et on ne sait jamais comment ils pourraient réagir face à un loup, ils pourraient le poursuivre loin, se faire attaquer, se blesser…» Mais actuellement, c’est plutôt un cousin à poils roux qui l’inquiète : «Pour l’instant, on a plus de problèmes avec les renards. On a un agneau et une chèvre qui ont été attaqués mortellement. J’en ai vu un récemment, je l’ai pris en photo. Je connais des gens dont le poulailler a aussi été attaqué.»

«Pas un territoire à loups ici!»

Plus dans le centre du pays, nous contactons maintenant un éleveur d’une centaine de moutons, qui lui aussi préfère rester anonyme. Il est moins inquiet : «Le loup? Non, ça ne m’inquiète pas trop. J’ai un border collie en permanence avec les moutons. Et puis par ici, il y a beaucoup de promeneurs, beaucoup de gens qui se baladent avec des chiens. Le loup n’oserait pas trop s’approcher. Je pense que si c’était un loup, il a dû venir il y a deux semaines, et repartir, il y a trop de monde, trop d’autoroutes, les forêts ne sont pas assez grandes… Ce n’est pas un territoire pour un loup ici!»

Et la menace des renards? «Les renards ne s’attaquent pas aux moutons, très rarement en tout cas. Je me rappelle qu’une fois un renard avait attaqué un agneau parce que la mère était occupée à allaiter un autre, mais voilà, ça n’arrive pas souvent. Et mes moutons, je les rentre, ils sont bien gardés.»

Des attaques de chiens sauvages

Dans le nord du pays, nous trouvons un éleveur qui accepte de parler à visage découvert. Christian Mathieu est exploitant de la Naturhaff, une ferme biologique à Derenbach. «On a un troupeau de moutons. On est dans une région plus reculée, donc il y a plus de risques d’y croiser des loups. Mais pour l’instant, je n’ai rien vu», témoigne-t-il. Par contre, «j’ai déjà vu des attaques de chiens sauvages, il y a quelques années». Une précision importante, car certaines de ces attaques sont parfois attribuées à tort au loup.

À la différence d’autres éleveurs, il ne plaide pas pour des mesures radicales contre le loup. Au contraire : «Je ne suis pas contre la réintroduction. Mon travail à la ferme vise à améliorer la biodiversité, à sortir de l’agriculture conventionnelle, donc je suis favorable à tout ce qui enrichit l’écosystème, comme le loup. Si le loup arrive, je m’adapterai, car il y a plus important dans la vie que mes petits problèmes.»

S’adapter? «Oui,si le loup arrive, je me demande si je vais continuer à élever des moutons. Il y a le risque d’arriver un jour dans la parcelle et de voir tout le troupeau blessé ou pire… Je veux éviter ça. Donc peut être que je remplacerai cet élevage de moutons par des vaches…» Tout cela reste évidemment de vaines conjectures. Tant que le loup n’aura pas officiellement montré le bout de son museau, ses moutons n’ont pas de quoi filer un mauvais coton…

Romain Van Dyck

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