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[Le portrait] Victor Bettendorf : au grand galop


Victor Bettendorf a signé le plus bel exploit de sa carrière en remportant le Grand Prix du Saut Hermès, à Paris.

Le cavalier luxembourgeois, vainqueur à Göteborg et surtout à Paris, n’en finit pas de grimper dans la hiérarchie internationale.

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Depuis le début de l’année 2023, il est tout simplement l’un des meilleurs cavaliers du monde. Après avoir déjà écrit l’histoire du sport luxembourgeois en devenant le tout premier à remporter un concours 5 étoiles, le niveau le plus relevé de compétition, en février à Göteborg, Victor Bettendorf et sa monture Mr. Tac sont entrés dans un monde à part en s’imposant, le 19 mars dernier à l’occasion du Grand Prix du Saut Hermès, au Grand Palais Éphémère à Paris : «C’est peut-être l’un des six ou sept concours les plus prestigieux», savoure le sportif grand-ducal.

On peut dire de lui qu’il est tombé dans la marmite équine dès son plus jeune âge : «Mon père est un passionné d’élevage. On a toujours eu des chevaux.» Mais même si le jeune Victor se retrouve en selle très tôt, «j’ai fait mes premières compétitions vers 7 ou 8 ans», le dada, ça n’est pas forcément sa grande passion : «Je préférais jouer au basket.» Pendant des années, il mêle de concert équitation et balle orange, du côté de Heffingen, sous les ordres de Marcel Hetto avec son fils Pit : «Je n’étais pas un grand joueur. Mais j’ai quand même participé à une finale de Coupe en scolaires.»

Seulement, celui qui aime également pratiquer le golf réalise qu’il est plus à l’aise rênes en main que balle en main. Il remise définitivement les sneakers au placard. Et garde les bottes. Son sport sera donc l’équitation pour un jeune homme qui se lance – un temps – dans des études de droit. Seulement Victor, qui se rêvait avocat, n’ira pas au bout de son cursus : «Au bout de trois ans, j’ai dit stop.»

Même si le cheval n’était pas forcément sa grande passion, il se prend au jeu. Chassez le naturel, le compétiteur revient – c’est le cas de le dire – au galop : «J’essaie de me donner à fond dans tout ce que je fais. Et en compétition, j’aime gagner!» C’est ainsi qu’à 24 ans, il décide de devenir cavalier professionnel : «Je n’aurais jamais fait cela si on n’avait pas eu un élevage.»

Victor Bettendorf va donc gagner sa vie avec les chevaux : «Dès que j’ai eu mon permis, je me suis rendu à droite, à gauche chez des éleveurs et des propriétaires de chevaux. J’ai toujours monté des chevaux de l’éleveur de Mr. Tac, Edmond Meyers de Sandweiler. Il fallait louer les boxes dans une écurie. Et je devais les remplir avec les chevaux des propriétaires, faire du coaching d’élèves.»

On a tout de suite vu que Victor montait très très bien

Ce dernier ne tarit pas d’éloges sur un homme qu’il a connu tout petit : «Je suis très ami avec Charles, son père. Cela fait des années qu’on se connaît, on a fait une partie de nos études ensemble et on a la même profession (NDLR : vétérinaire). Alors quand ses enfants, notamment Victor et Charlotte, ont commencé à monter d’autres chevaux que ceux de leur élevage, c’était normal de faire une collaboration avec eux. Et on a tout de suite vu que l’un comme l’autre montaient très très bien», confie Edmond Meyers.

On l’aura compris, une vie bien remplie. Assez éloignée des paillettes d’une compétition comme celle d’Hermès à Paris : «C’est un peu le côté bling-bling. Mais notre quotidien, c’est curer les boxes, s’occuper des chevaux.»

C’est également grâce à l’équitation qu’il trouvera le grand amour : «J’ai rencontré ma compagne dans une compétition de saut, il y a trois ans», sourit-il. Et c’est par amour qu’il décide de prendre la direction du Pré-d’Auge, en Normandie, d’où est originaire sa chère et tendre, pour s’y installer. C’est là-bas, dans le Calvados, entre Lisieux et Deauville, qu’il va poursuivre sa progression : «Le père de ma compagne, Michel Hécart, un ancien cavalier de très haut niveau, a un élevage très réputé en France depuis une dizaine d’années. J’ai de très bons chevaux et de très bons propriétaires qui mettent leurs chevaux à disposition. Et j’ai pu compter sur le soutien de personnes avec beaucoup d’expérience et très bien entraînées», se réjouit le cavalier grand-ducal.

Et après un an et demi «un peu compliqué», tous les efforts consentis ont commencé à payer. Avec notamment son cheval de tête, Mr. Tac. Un crack avec qui il vit une histoire très particulière : «Je l’ai quasiment vu naître. Il est né chez Edmond Meyers. Je l’ai acheté quand il avait six ans, puis je l’ai revendu à un Mexicain (NDLR : Federico Fernandez) un an plus tard. Il adorait le cheval, mais il ne correspondait pas vraiment à ses besoins.»

Victor Bettendorf était donc chargé de lui trouver un nouveau propriétaire. Et c’est finalement la famille Mégret qui va acquérir le hongre. Et le confier, pour son plus grand bonheur, à son cavalier de toujours : «Ils m’avaient déjà confié un de leurs chevaux. J’ai tenté ma chance et je leur ai demandé s’ils seraient d’accord pour investir dans Mr. Tac. Ils ont accepté», apprécie-t-il. C’est ainsi qu’il a vraiment pu poursuivre sa belle histoire avec Mr. Tac, désormais âgé de 11 ans : «Il y a des chevaux qui peuvent concourir jusqu’à 20 ans. On dit toujours que le meilleur âge pour les chevaux de championnat, c’est entre 11 et 15 ans.»

Avec Mr. Tac, on est vraiment en communion

L’équitation est un sport à part. Qui implique une véritable symbiose entre l’Homme et le cheval. Et c’est pour cela que ça fonctionne très bien avec Mr. Tac : «Il a un cœur énorme. C’est un vrai lion, généreux. On se connaît par cœur. Le cheval veut aussi bien faire pour moi. Entre nous, il y a un vrai lien. On est vraiment en communion. C’est cela l’essence de notre sport.»

Avec la plus belle des récompenses à Paris : «J’avais déjà fait mes preuves en gagnant à Göteborg. Mais Paris, bien sûr, tout le monde rêve de gagner un tel concours. Après mon passage en barrage, il restait encore une dizaine de cavaliers. J’étais convaincu que ça ne suffirait pas pour gagner. Mais si! Je ne comprenais pas trop ce qui venait de m’arriver. C’était un super sentiment. En plus, à Paris, avec mes parents, ma famille, les propriétaires, les éleveurs, ça a une tout autre saveur. Göteborg, c’était déjà bien. Mais Paris, c’était exceptionnel !»

Victor Bettendorf espère que ses excellents résultats lui ouvriront les portes des plus grandes compétitions du monde, normalement réservées à des équipes nationales : «J’aimerais faire La Baule et Aix-la-Chapelle.» Le rêve ultime étant bien évidemment les JO de Paris. Seulement, la probabilité d’y aller est très faible : «Ce sont les équipes qui se qualifient. Dans la zone B, il n’y a que deux cavaliers individuels qui passent. Si la Suisse se qualifie en équipe, il y a peut-être une toute petite chance, mais il faudra multiplier les bonnes performances. Si ce n’est pas le cas, c’est impossible. Pour résumer, je dirais que ce n’est pas ma priorité. Mais c’est forcément dans un coin de ma tête.»

En attendant, Victor Bettendorf a repris son activité. Faite de quelques moments de gloire. Et d’énormément de compétitions bien plus modestes sur lesquelles il fait tout pour faire progresser la trentaine de chevaux qu’il a au travail. Afin que ceux-ci soient repérés et achetés, histoire de faire rentrer de l’argent dans les caisses : «Malheureusement, c’est un sport qui coûte très cher. Avant d’avoir un cheval capable de gagner, il y a des années de travail, d’efforts, de formation. Beaucoup d’espoirs. Et beaucoup de déceptions.»

Et même si ça reste son cœur de métier, se séparer d’un cheval est toujours un déchirement : «Vendre, c’est vraiment tout ce que je n’aime pas. Mais on n’a pas le choix. Moi, ce que j’aime, c’est acheter des chevaux, les former et faire de la compétition avec eux.» Quant à savoir s’il a, dans ses rangs, déjà le successeur de Mr Tac : «J’ai de jeunes chevaux très prometteurs. Pour le reste, l’avenir le dira.»

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