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«Made in Luxembourg» : Jean-Claude Muller et le retour de la choucroute


En cinq ans, la production de chou de Jean-Claude Muller est passée de 1 à 2,5 hectares. (Photos : alain rischard)

Instituteur devenu agriculteur, Jean-Claude Muller est un fermier passionné et résilient. Il a lancé sa production de choucroute artisanale en 2017, alors que tous ses arbres fruitiers avaient gelé.

 Le produit

La choucroute n’est pas qu’alsacienne, elle est même bien ancrée dans la culture luxembourgeoise. Excellent moyen de conserver le chou avec ses qualités nutritives, elle était un produit fermier typique. Mais c’est récemment que Jean-Claude Muller, agriculteur à Contern (ferme Muller-Lemmer), a relancé cette production qui fait de lui le spécialiste luxembourgeois en la matière.

«Jusqu’en 2017, je n’avais pas de légumes, explique-t-il. Mon exploitation comptait surtout des arbres fruitiers et des céréales.» Mais en 2017, d’assassines gelées tardives s’étaient abattues sur le pays, annihilant pratiquement toute sa récolte. «La situation était vraiment critique, se souvient-il. J’ai demandé à mon acheteur, Cactus, s’il serait intéressé à ce que je produise autre chose, sans entrer en concurrence avec notre groupement d’agriculteurs.»

De cette réflexion dans l’urgence est née l’idée de la choucroute. Jean-Claude Muller avait gardé dans un coin de sa tête le souvenir de l’achat d’une arracheuse de pommes de terre d’occasion à un agriculteur du Kirchberg il y a une vingtaine d’années, à une époque où il y poussait encore autre chose que des immeubles de bureaux. «Il était le dernier producteur de choucroute du pays et déjà assez âgé. Je m’étais déjà posé la question de relancer cette production.»

En 2017, Jean-Claude Muller plante donc un hectare de choux au mois de juin, «normalement c’est un peu tard mais compte tenu de la météo cette année-là, c’était très bien». L’été, il achète une machine à couper les choux et installe la salle de production dans sa ferme. La récolte est bonne, la recette aussi et ces choux lui sauve son année, à tel point qu’il décide de poursuivre la production les années suivantes.

«Je plante les choux blancs après les saints de glace, entre la mi-mai et la mi-juin, précise-t-il. Cela me permet d’étaler la récolte pour être prêt dès le début de la saison qui arrive tôt. Traditionnellement, on commence à manger de la choucroute après la Schueberfouer. Nous en vendons d’ailleurs plus à l’automne qu’en hiver.»

Au départ, l’agriculteur fabriquait la choucroute dans sa ferme. «C’est assez simple, il faut couper le chou et le mettre dans des fûts stérilisés avec du sel et à l’abri de l’air. Au début de la saison, on le laisse fermenter 4 semaines mais lorsqu’il fait plus froid, il faut entre 6 et 8 semaines.»

Le succès du produit ayant entraîné un accroissement de la production – il en est à 2,5 hectares, soit environ 75 tonnes de chou par an –, il a délégué la transformation à l’entreprise à dimension sociale ProActif qui dispose d’un local tout près. «Pour moi, c’est beaucoup plus pratique puisqu’à ce moment-là, je suis occupé avec mes autres récoltes.»

Le producteur
Jean-Claude Muller est un drôle de transfuge. Également président du festival de BD de Contern, il était instituteur à Dalheim pendant 14 ans, jusqu’en 2013. Il s’est cependant toujours investi dans la ferme familiale, alors exploitée par son grand-père puisque la génération intermédiaire avait choisi un autre chemin. En 2008, il installe la distillerie et augmente régulièrement sa production de fruits pour alimenter l’alambic. Alors qu’il paraît évident qu’il a cette passion chevillée au corps, vient le moment où il doit choisir : il opte alors pour le tracteur plutôt que pour le cartable.

«Je ne regrette pas le métier d’enseignant, mais le choix de la ferme s’est imposé, sourit-il. J’ai toujours eu un état d’esprit d’entrepreneur et j’ai voulu suivre les pas de mon grand-père. C’est une passion. Lorsqu’on travaille entre 60 et 80 heures par semaine, ça ne peut pas être autrement. On m’a souvent dit que j’étais dingue d’être passé d’instituteur à agriculteur… mais je suis très heureux comme ça. Et puis, ma femme est toujours institutrice!»

Aujourd’hui, son exploitation compte 22 hectares de légumes et 8 hectares de fruits. L’essentiel de ses terres se trouve autour de Contern, mais il est contraint de partir vers l’est (Trintange, Bous…). «À Contern, la concurrence est rude entre les terres agricoles et les nouvelles constructions.»

Où la trouver?

L’essentiel de la choucroute de Jean-Claude Muller est vendue dans les supermarchés Cactus, par seaux de 800 grammes. Elle est également disponible de la boutique de la ferme de Contern où l’on trouve d’autres excellents produits (fruits, légumes, confitures, eaux-de-vie, liqueurs, viande…) et dans d’autres échoppes similaires à travers le pays. «Les restaurateurs en prennent aussi de plus en plus, se félicite l’agriculteur. Comme elle est crue, tendre, légère et peu salée, ils peuvent l’assaisonner à leur goût. Cuite avec un peu d’elbling, agrémentée de bonne charcuterie artisanale – une Mettwurscht, une Wiener et deux morceaux de Kassler – et accompagnée d’un verre de riesling, c’est un régal!»

On commence à manger de la choucroute après la Schueberfouer

À retenir

• Jean-Claude Muller est le seul producteur de choucroute au Luxembourg. Les choux viennent directement de ses champs et sont transformés de manière très simple. Une fois coupés et salés, ils fermentent dans des fûts stériles à l’abri de l’air.

• Avant de reprendre la ferme de son grand-père, Jean-Claude Muller était instituteur à Dalheim pendant 14 ans. Il aimait son premier métier mais sa passion pour l’agriculture était plus forte encore. Il produit notamment des fruits et distille ses propres eaux-de-vie et liqueurs.

• On trouve la choucroute de la ferme Muller-Lemmer dans tous les supermarchés Cactus, un partenaire fidèle, ainsi que dans un réseau de boutiques à la ferme (dont la sienne). Elle est disponible dès la fin de l’été et jusqu’au cœur de l’hiver.