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Les dix films qui ont marqué l’année 2022 (selon nous)


Pour cette année placée sous le signe du grand retour vers les salles de cinéma, les belles robes de Sissi, un cinéma iranien en majesté, une Palme d’or trash, les avions de chasse de Tom Cruise ou encore une vraie-fausse invasion zombie se sont donné rendez-vous. De quoi plaire à toutes les sensibilités. Voici nos dix films favoris !

1. Licorice Pizza, de Paul Thomas Anderson

Lui, c’est Gary Valentine, enfant acteur très sûr de lui et arrogant. Elle, c’est Alana Kane, jeune adulte blasée et vaguement paumée. Dans la vallée de San Fernando des premières années 1970 – de l’autre côté de la colline où trônent les lettres «Hollywood» –, ils vont vivre ensemble une histoire d’amour, faite de «je t’aime moi non plus» à répétition.

Paul Thomas Anderson fait à la fois un véritable film de famille et d’amis et une chronique amoureuse de son lieu de naissance, caractérisée par les nombreuses rencontres que feront les deux héros – un coiffeur star (Bradley Cooper) en roue libre, une vieille gloire hollywoodienne (Sean Penn) qui rejoue en vrai la scène phare de sa carrière…

Derrière son apparente simplicité (garantie par le naturel renversant de son duo d’acteurs), Licorice Pizza est le récit ensoleillé d’une époque minée par la guerre et la crise du pétrole, mais vue à travers le prisme de l’insouciance juvénile, la plus belle forme de poésie.

2. Nope, de Jordan Peele

Nope pourrait-il être un futur classique du cinéma de science-fiction, à la façon de Get Out (2017) du même Jordan Peele, désigné à l’unanimité comme incarnant le renouveau du film d’horreur ? C’est tout le mal que l’on souhaite à l’un des plus importants cinéastes américains du moment.

Ici, il utilise les décors du genre cinématographique américain par excellence – le western – pour y déployer une histoire d’extraterrestres, qu’un frère et une sœur se sont jurés de capturer sur caméra pour devenir riches et sauver leur ranch. Toujours animé par un certain esprit ludique, Jordan Peele se réapproprie les codes à la fois du western et du film d’aliens, et prend l’histoire du cinéma américain à rebours en offrant un spectacle renversant… qui cache lui-même une réflexion sur notre condition de spectateur, dans une époque où tout fait évènement.

Moins immédiat que Get Out, plus profond et complexe que Us (2019), voilà un film qui risque de hanter longtemps les mémoires cinéphiles.

3. Corsage, de Marie Kreutzer

Sous les traits de Vicky Krieps, Sissi fume (souvent), feint l’évanouissement pour échapper aux pénibles chants à sa gloire, laisse mariner son empereur de mari derrière la porte de sa chambre tandis qu’elle reçoit ses supposés amants, et quitte un repas en gratifiant ses hôtes désobligeants d’un doigt d’honneur.

Véritable brûlot féministe, Corsage tente de libérer la célèbre impératrice d’Autriche de sa cage, qu’elle porte toujours plus serrée à la taille. L’empire, comme son époux, exigent d’elle qu’à 40 ans, elle soit toujours jeune et belle; face à cela, Sissi fait exploser les conventions et décide de vivre selon ses propres règles.

La cinéaste autrichienne Marie Kreutzer réinvente le plus célèbre personnage historique de son pays en icône punk, qui se rebelle contre son objectification. Une fresque tragicomique et doucement anachronique portée à bout de bras par une Vicky Krieps… impériale.

4. Triangle of Sadness, de Ruben Östlund

Deuxième hold-up cannois pour Ruben Östlund après The Square (2017), analyse des comportements contemporains doublée d’une satire féroce du monde de l’art. Avec Triangle of Sadness, il pousse le bouchon plus loin, en emmenant un couple de mannequins sur un paquebot de luxe, où le voyage ne se passera pas exactement comme prévu.

Âmes sensibles s’abstenir… Sa cible : les ultrariches – un oligarque russe, un couple de marchands d’armes, bref, que du beau monde… – et dissèque sans tabou les ficelles du capitalisme. Entre fable et farce grotesque, en bon héritier de Bunuel et Ferreri, le film vogue sur les eaux d’un allègre pervertissement des rapports de force entre riches et pauvres.

Coup de génie ou sale tour, c’est la limite sur laquelle aime se balader le cinéaste doublement palmé, qui redouble de noirceur dans le final. Le sentiment que l’on a affaire, avec lui, à l’un des grands satiristes du XXIe siècle.

5. La Nuit du 12, de Dominik Moll

Capitaine à la PJ de Grenoble, Yohan ne porte pas l’uniforme, dont il dit n’être pas très fan. Flic austère et obsédé, il est pris au piège d’une enquête sans issue pour élucider le meurtre de Clara, une adolescente brûlée vive. D’interrogatoires en intuitions, les chemins se suivent et ne se ressemblent pas.

Yohan a beau se dédier tout entier à l’affaire, au point d’enchaîner les nuits blanches, il tourne en rond. Ou plutôt, se perd dans un labyrinthe. Le réalisateur, Dominik Moll, se débarrasse de la construction classique du polar pour explorer le genre policier à 360 degrés, dans sa veine la plus réaliste : c’est aussi la vie quotidienne de cette brigade qui est racontée, avec la somme de toutes les choses, petites et grandes, qui amènent certains à craquer.

Dans ces paysages de montagne qui enveloppent un mystère irrésolu, on assiste aussi à un très grand film sur les violences faites aux femmes, un Twin Peaks dans les Alpes, et qui n’a pas le temps de rêver.

6. Top Gun : Maverick, de Joseph Kosinski

L’année 2022 devait être celle du grand retour du gros «blockbuster» américain, incarné notamment par les suites d’Avatar et de Top Gun. Aux avancées technologiques de James Cameron, on préfèrera les galipettes aériennes (sans effets numériques) de Tom Cruise, pour qui le grand spectacle est avant tout une affaire de sensations fortes.

La tête brûlée est de retour dans le costume de «Maverick», 36 ans plus tard, pour une mission au cœur d’un État «voyou» qu’il mène avec ses élèves de l’école Top Gun, parmi lesquels le fils de son ex-binôme «Goose», mort dans le premier film. Outre le plaisir de retrouver nos héros disputer une partie de ballon torse nu sur la place, on adore retrouver ce cinéma à grand spectacle, malin et honnête, qui se surpasse constamment pour donner à chaque scène aérienne une bonne raison de retrouver les chemins des salles.

Celles-ci, à couper le souffle, montrent un Tom Cruise qui, décidément, ne fait jamais fausse route. Après tout, l’important, ce n’est pas la machine, c’est le pilote…

7. Athena, de Romain Gavras

Unité de lieu, de temps et d’action pour le nouveau film de Romain Gavras, qui filme la colère des cités sur le mode de la tragédie antique, chœurs lyriques à l’appui. Un choc vertigineux, tant scénaristique qu’esthétique, avec des plans séquences à couper le souffle et des mouvements de caméra impossibles.

La guerre comme décor à un remarquable exercice de style qui saisit, en creux, l’essence d’une France incapable de se réconcilier avec elle-même – pour preuve, les CRS sont comme une légion romaine à l’entrée du village des Gaulois.

Au milieu du chaos, la caméra de Gavras suit la descente aux enfers d’une fratrie et trace une cartographie de la cité comme champ de bataille.

8. Leila’s Brothers, de Saeed Roustaee

À seulement 33 ans, Saeed Roustaee s’est imposé comme la nouvelle sensation du cinéma iranien. Qui revient avec une saga familiale monumentale, dans la lignée de Coppola ou de la série américaine Succession, mais où les luttes d’argent ne se font pas chez ceux qui en disposent à volonté, mais chez ceux à qui il manque cruellement.

Face à un père miséreux, prêt à tout sacrifier pour revêtir l’honneur de diriger le clan, et à des frères vivant dans la précarité, c’est à Leila de trouver un plan qui puisse les sauver.

Avec une finesse d’écriture qui lie l’intime, le social et le politique, Leila’s Brothers raconte aussi et surtout le combat sacrificiel d’une femme déterminée à mettre à mal le patriarcat, au profit de l’union familiale.

9. Boiling Point, de Philip Barantini

On en aura soupé, cette année, des œuvres qui nous racontent l’envers des métiers de la cuisine. Et, au vu de leur qualité, on en redemande! À commencer par Boiling Point, une expérience immersive qui suit la soirée la plus fréquentée de l’année dans le restaurant gastronomique londonien du chef Andy (un très bon Stephen Graham).

Au milieu de l’agitation incessante et des tensions, en salle comme en cuisine, lui sent le burn-out et l’alcool à plein nez (dans lequel il s’enfile aussi de généreuses lignes de coke). Pour cette plongée ultraréaliste dans un univers en flux tendu, le réalisateur, Philip Barantini, fait le parti pris d’un film tourné en un unique plan séquence, virtuose, et qui ne lâche rien.

10. Enquête sur un scandale d’État, de Thierry de Peretti

Au cœur de Paris, sept tonnes de cannabis sont saisies par les douanes. Hubert Antoine, un ex-infiltré des «stups» planqué à Marbella, révèle à un journaliste de Libération avoir des preuves que Jacques Billard, officier haut placé de la police française, a organisé un important réseau de trafic de drogue.

Commence alors une dangereuse enquête dans les coulisses de la République… Injustement boudé par les salles (le film est sorti en VOD au Luxembourg), Enquête sur un scandale d’État mélange thriller policier et journalisme d’investigation dans un film basé sur une histoire vraie et captivant de bout en bout. Avec, en tête d’un excellent casting, un Roschdy Zem tout simplement immense.

Et vous, quels ont été vos films marquants de cette année ?

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