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Le prévenu reconnaît être le facteur principal qui a contribué au décès de Luke, 16 ans


«Nous portons la peine, le deuil en permanence. Nous avons perdu notre famille telle qu’elle était», s’étrangle la maman dans un sanglot. (photo Sophie Kieffer)

Les parents de Luke ont pardonné à John. Le jeune homme, qui encourt une peine de réclusion à vie, a dit vouloir s’en sortir pour que le décès de l’adolescent n’ait pas été vain.

Luke est mort au lendemain de son 16e anniversaire. Des vies se sont brisées ce jour-là. Celles de ses parents et de ses quatre frères et sœurs, qui se sont portés partie civile mercredi après-midi et réclament plus de 425 000 euros. Mais aussi celle de John, 26 ans. Le jeune homme a commis l’erreur fatale d’échanger de la méthadone contre divers médicaments, dont des benzodiazépines et de l’oxycodone, avec Luke. L’adolescent les a mélangés avec de la cocaïne et de l’héroïne. L’oxycodone lui a été fatal, selon un expert en toxicologie.

John, qui avait 22 ans en octobre 2019, doit répondre de ce décès face à la 12e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg depuis mardi. Le père de Luke, inconscient de ses addictions, avait demandé au jeune homme, qui était un de ses patients, d’aider l’adolescent à remonter la pente. «Quand j’ai rencontré John, j’ai pensé que c’était un gars bien. J’ai compris qu’il avait des problèmes, mais à chaque fois qu’il venait me consulter, il avait un grand sourire. J’ai pensé que Luke pourrait prendre exemple sur lui et apprendre à réagir face à l’adversité», a expliqué le père de famille.

«Nous portons la peine, le deuil en permanence»

«À l’âge de 14 ans, il est devenu triste et déprimé du jour au lendemain. (…) Il voulait mourir», témoigne la maman de Luke, en pleurs alors qu’elle raconte le calvaire vécu par sa famille ces quatre dernières années. «Huit mois avant sa mort, Luke nous avait demandé de partir six mois au Canada. Nous avons appris après sa mort qu’il avait commencé à se droguer à ce moment-là.» Un témoignage insoutenable.

«Nous portons la peine, le deuil en permanence. Nous avons perdu notre famille telle qu’elle était», s’étrangle la maman dans un sanglot. «Je devrais en vouloir à John, mais je ressens de la compassion envers lui. Nous affrontons cette situation en famille. Je ne vois pas sa famille à ses côtés ici.» John, assis sur le banc des prévenus, pleure lui aussi, alors que la maman lui souhaite «de ne pas continuer à gâcher sa vie». «Je sais que si Luke était là, il t’aurait pardonné.» Son papa également. «Je lui ai pardonné pour ne pas porter cette colère en moi. Je veux qu’il se reprenne et qu’il devienne celui qu’il mérite d’être. Je suis convaincu qu’il est une bonne personne.»

«Luke est ma force motrice»

La mort de Luke et son «impact dévastateur» auraient pu être évités. Si John n’avait notamment pas proposé «l’échange fatal» à un adolescent «dont il connaissait la vulnérabilité», qui était «instable» et «n’avait pas beaucoup d’expérience», selon le représentant du parquet. Il critique également les médecins qui ont prescrit les médicaments, le système de santé trop permissif et l’entourage de Luke, qui n’a pas pris la mesure de son malaise la veille de son décès.

La loi prévoit la réclusion à vie pour quiconque transmet des médicaments à un mineur qui décède après les avoir consommés. Mais le représentant du parquet retient l’altération des capacités de discernement de John, étant donné sa consommation excessive de médicaments et d’alcool à l’époque des faits. Il requiert une peine de 8 ans de prison à l’encontre du jeune homme et ne s’oppose pas à un large sursis probatoire pour «lui permettre de faire ses preuves». Il intime à John de «réfléchir aux mots des parents de Luke et de tout faire pour changer de vie».

Une plaidoirie à laquelle adhère l’avocat du prévenu, qui est revenu sur le contexte familial difficile dans lequel John a tenté de se construire et a énuméré les nombreuses autres circonstances atténuantes à son crédit. «La prison n’est pas un endroit pour lui. Il est sur la pente ascendante. Cela le briserait», estime l’homme de loi.

«Beaucoup de facteurs ont mené à cette tragédie. Je suis le plus important d’entre eux. Je ne suis jusqu’à aujourd’hui pas parvenu à me pardonner», reconnaît le prévenu qui veut «devenir quelqu’un de meilleur pour que cette tragédie n’ait pas été vaine. Elle a changé toute ma vie. Je pense souvent à Luke. Il est un moteur pour moi.» Des mots émouvants de la part d’un jeune homme qui a dû vivre une telle épreuve «pour entendre que je suis quelqu’un de bien».

Le prononcé est fixé au 21 décembre.

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