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Le coup de main de l’écrivain public à Schifflange


Michel Reiffers, 67 ans et Jean-Paul Molitor, 64 ans. Photo : Tania Feller

La commune a mis en place un service gratuit d’écrivain public, pour aider ses administrés qui en ont besoin à comprendre des courriers et à les rédiger.

Il n’est pas toujours aisé de comprendre les courriers officiels ou de remplir correctement certains formulaires. Alors quand, de surcroît, on ne maîtrise pas la langue de Dicks ou celle de Molière… Mais à Schifflange, des bénévoles se proposent d’apporter leur aide à ceux qui en ont besoin dans toutes leurs démarches rédactionnelles : rédaction de lettres de motivation et de courriers destinés à l’administration, conception d’un CV, réponse à un huissier de justice ou au parquet… : Jean-Paul Molitor et Michel Reiffers sont, avec deux collaboratrices, les écrivains publics de la commune.

Si le service est surtout sollicité par des étrangers présents depuis peu sur le territoire, et qui ne maîtrisent donc pas les langues officielles du pays, tout le monde peut y avoir recours, précisent les écrivains de Schifflange : «Les personnes mal alphabétisées, qui ont des difficultés à rédiger» ou «les seniors qui ont du mal avec les nouvelles technologies et qui ne parviennent pas à remplir des formulaires en ligne, par exemple, peuvent aussi nous contacter».

Le service est entièrement gratuit et les échanges peuvent se faire dans plusieurs langues : français, luxembourgeois, allemand et anglais bien sûr, mais aussi portugais, roumain… «On arrivera toujours à se débrouiller!», assure Jean-Paul Molitor.

Fournir des explications, mais pas des conseils

Outre les conséquences directement liées au fait de mal remplir un formulaire ou de ne pas répondre à un courrier, savoir rédiger correctement reste souvent indispensable pour être entendu. «Je crains que si vous adressiez un courrier à une administration qui n’est pas très bien rédigé, la demande ne sera pas traitée avec la même équité que celle bien rédigée», glisse Jean-Paul Molitor.

Mais l’écrivain public, comme son nom l’indique, est là pour écrire : il ne fournit pas de conseils et «ne se substitue nullement aux services existants et dirige le cas échéant la personne vers les services compétents», écrit le ministère de l’Intégration à ce sujet. «Nous sommes seulement la main qui écrit : nous ne prenons pas la responsabilité du contenu. La personne qui désire utiliser notre compétence pour la rédaction du courrier va nous dire ce que l’on va écrire et va signer elle-même, sous son nom», rappelle Michel Reiffers.

Jusqu’à une certaine limite : l’écrivain public s’interdit toute rédaction de courrier en contradiction avec la législation luxembourgeoise et se réserve le droit de refuser l’écriture d’un courrier de dénonciation, chantage, menaces, injures et insultes.

Un service indépendant

Jean-Paul Molitor et Michel Reiffers se sont tous deux engagés dans l’aventure il y a un peu plus d’un an, en réponse à un appel lancé par l’Association de soutien aux travailleurs immigrés (ASTI) pour recruter des écrivains publics bénévoles. «Je cherchais de quoi m’occuper durant ma retraite», explique Michel Reiffers, 67 ans, ancien juge à la Cour de cassation, pensionné depuis deux ans.

Jean-Paul Molitor, 64 ans, enseigne pour sa part l’anglais au Centre national de formation professionnelle continue. «Lorsque j’ai commencé ma carrière d’enseignant, j’ai travaillé avec des jeunes en difficulté. J’étais donc au fait de ce qui peut poser problème à certaines personnes.»

Lorsqu’ils ont décidé de proposer leurs services à la commune de Schifflange, celle-ci a reçu immédiatement très favorablement le projet. Elle fournit le local, en l’occurrence une salle à la Maison des générations, mais les écrivains publics restent complètement indépendants : «Il s’agit d’un service extérieur à la commune», insistent-ils. «C’est important, car les gens ne veulent pas forcément s’adresser à une institution officielle, d’autant plus s’ils ont des problèmes avec elle. Et nous avons évidemment un devoir de discrétion.»

Pour l’instant, le service ne dispose pas d’une permanence, les rendez-vous se font sur demande, car il y a encore peu de personnes qui font appel à eux. «Il n’est pas facile d’atteindre le public cible, qui de fait ne lit pas les brochures et les courriers. Mais l’office social, les associations et le bouche à oreille vont peut-être pouvoir nous faire davantage connaître.»

Tél. : 8002-3003, courriel : ecrivain.public@schifflange.lu

«L’écrivain public n’est pas un assistant social»

Face aux questionnements qu’avaient certains écrivains publics bénévoles, l’Association de soutien aux travailleurs immigrés (ASTI) a décidé de leur proposer une formation pour mieux définir les tâches de l’écrivain public ainsi que les limites de ce rôle, et aborder la notion d’interculturalité.

«L’écrivain public peut être amené à rédiger une lettre de recours ou un CV – ce sont des demandes récurrentes. Mais il n’est pas un assistant social, il n’est pas là pour demander des aides financières. Il n’est pas non plus un psychologue chez qui on vient s’épancher», rappelle Marc Piron, directeur de projets au sein de l’ASTI.

Avoir une aisance rédactionnelle, comprendre quelques langues, être empathique et savoir être à l’écoute, avoir envie de rencontrer des personnes de cultures différentes font partie des qualités requises pour devenir écrivain public. «Il n’est pas nécessaire d’être juriste, comme on nous le demande souvent», précise Marc Piron. Il y a actuellement une douzaine d’écrivains publics dans le pays.

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