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La traite dans le monde du travail en hausse au Luxembourg


L'ITM "ne se sent pas concernée. Sur 6 000 contrôles réalisés, aucun n'a visé la traite des êtres humains", fustige la CCDH. (illustration Didier Sylvestre)

Un rapport de la Commission consultative de des droits de l’homme (CCDH) conclut que la traite des êtres humains continue d’augmenter au Grand-Duché. Sur les deux dernières années, les victimes ont surtout été détectées dans le monde du travail.

Tous les deux ans, la CCDH dresse un rapport sur la traite des êtres humains qui est soumis à la Chambre des députés. Ce mercredi, les conclusions et recommandations ont été présentées au Parlement. Principal enseignement : malgré d’importantes avancées en termes de sensibilisation et de prise en charge des victimes, la traite reste en hausse au Luxembourg.

Sur la période 2017-2018, la CCDH s’est vu signaler 31 cas. Au moins 34 auteurs ont pu être identifiés. «Les chiffres sont toutefois à relativiser. Il ne s’agit que de la pointe de l’iceberg. Le nombre de cas non recensés est important», souligne Gilbert Pregno, président de la CCDH.

Contrairement au premier rapport ayant couvert la période 2016-2017, la traite des êtres humains ne concerne plus majoritairement le domaine de la prostitution. «La tendance va clairement vers le monde de travail», indique Fabienne Rossler, secrétaire générale de la CCDH.

L’horeca et la construction, secteurs à risque

Les secteurs à risque sont l’horeca, le secteur de la construction, le travail domestique et le transport routier. «Les victimes sont en règle générale des personnes vulnérables, qui n’ont pas de véritable statut. Il s’agit de demandeurs d’asile, de réfugiés, de sans-papiers, de travailleurs saisonniers, intérimaires ou détachés», résume Anamarija Tunjic, juriste de la CCDH.

Le rapport dénonce plus particulièrement l’absence de l’Inspection du travail (ITM) pour détecter des cas de traite. «Elle ne se sent pas concernée. Sur 6 000 contrôles réalisés, aucun n’a visé la traite des êtres humains», fustige Anamarija Tunjic. La détection de ce genre d’exploitations au travail ne figure pas spécifiquement dans le cadre légal qui définit les missions de l’ITM. La CCDH recommande au gouvernement de rectifier le tir afin que le principal acteur pour contrôler le monde travail puisse enfin adopter une «attitude proactive».

Des peines pas assez dissuasives

En outre, la CCDH critique le manque de coordination et de concertation entre la police et la justice. Les peines prononcées à l’égard de trafiquants d’êtres humains ne seraient également pas assez sévères. «Ils risquent tout au plus des peines de prison assorti d’un sursis et une faible amende. Si j’étais trafiquant, j’installerais une antenne au Luxembourg. Les peines ne sont pas assez dissuasives», fustige Gilbert Pregno.

Il reste donc encore du chemin à parcourir. La CCDH espère que le gouvernement va aller au-delà du programme de coalition dans lequel «seules deux phrases sont consacrées à la traite des êtres humains». Le prochain rapport d’évaluation sera publié en 2021.

David Marques

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