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[Élim. Mondial 2018] Raymond Domenech : « On sait qu’on met les pieds dans un piège »


Le coach qui a conduit la France en finale du Mondial-2006 le reconnaît : la génération qui se profile est pleine de promesses. Il n'empêche : le Luxembourg reste «un piège». (Illustration : AFP)

Raymond Domenech, sélectionneur des Bleus de 2004 à 2010 et aujourd’hui consultant, sera au stade Josy-Barthel ce samedi. Il nous a expliqué avec franchise comment se prépare ce genre de rencontre.

Qu’est-ce qu’on se dit, quand on est sélectionneur d’une nation comme la France et qu’on s’assoit sur son banc avant un match comme celui qui opposera les Bleus au Luxembourg, samedi ?

Raymond Domenech : On se dit : « C’est la galère! » On se dit qu’on n’a rien à gagner et même tout à perdre. On se dit qu’en face, ils seront survoltés parce qu’ils jouent une équipe largement supérieure et que l’effet de sublimation va fonctionner à plein. C’est comme un 32e de finale de Coupe de France : c’est tout sauf agréable.

Vous avez affronté quatre fois les îles Féroé durant votre mandat. C’est ce que vous avez ressenti à chaque fois?

Il y a juste une fois, contre les Féroé, où notre avion a eu du mal à atterrir. Résultat, on est arrivés deux heures avant le coup d’envoi, on est allés boire un café, on est partis à l’échauffement et au bout de dix minutes, on menait déjà 2-0. C’est seulement là que je me suis dit : « Bon, ça va. » Mais on sait qu’on met les pieds dans un piège. Et on a beau en être conscient, on a beau se le dire, le dire aux joueurs… il y a la magie du foot qui fait que… Et les Féroé, le Luxembourg, c’est équivalent. On y croise des joueurs qui ne jouent pas à un très haut niveau, mais qui sont quand même capables de former une équipe très cohérente.

En général, les grandes équipes disent toujours le contraire, qu’elles sont concentrées sur le sujet, qu’elles respectent leur adversaire, blabla…

(il rit) Non mais je vous le dis comme c’est, c’est un fait, une réalité : on a beau le dire aux joueurs et bien non! Ceux qui joueront contre l’Espagne mardi partiront forcément avec un préjugé favorable par rapport à ceux qui joueront le Luxembourg. Ils peuvent me dire ce qu’ils veulent : je sais que pour eux, ce n’est pas la même chose de jouer le Luxembourg. Ils ont quoi à gagner? Trois points? Ca s’oubliera vite. S’ils battent le Luxembourg, de toute façon, on leur dira que ce n’était « que le Luxembourg ». Alors que ceux qui joueront contre l’Espagne…

On ne vous a pas interrogé là-dessus, dans la foulée de la première question : qu’est-ce qu’on se dit, du coup, avant de commenter un match comme Luxembourg – France?

J’ai toujours compris le regard critique sur le jeu quand j’étais sélectionneur. Alors aujourd’hui, j’essaye de comprendre, de décomposer ce qu’on me propose. La différence avec le moment où j’étais coach, c’est qu’à la fin du match, je pouvais me prendre le coup de matraque sur la tête. Aujourd’hui, je peux me contenter d’empiler des constats basiques du genre « ils se sont tous pris pour Zorro… » si jamais ça ne marche pas et que chacun essaye de faire la différence tout seul.

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Comment un sélectionneur prépare-t-il ce genre de rencontre face à une toute petite nation?

On faisait exactement le même boulot, mais en faisant très très attention quand on montrait les images aux joueurs.

Comment ça?

On va essayer de minorer les moments négatifs de l’équipe qu’on analyse.

Les minorer? Mais pourquoi?

Les joueurs qui vont regarder les vidéos, ils vont les voir tous les points faibles. Le souci, c’est qu’il y en a beaucoup. On ne peut pas leur montrer énormément de vidéos de matches que leur adversaire a gagnés et où on va voir leurs points forts, puisqu’il y en a peu. C’est surtout les difficultés qui vont être apparentes alors à la vidéo, on gomme les moments où c’est trop visible pour ne pas qu’ils se disent que ce sera facile. Parce que cela ne le sera pas.

Entretien réalisé par Julien Mollereau

Retrouvez l’intégralité de cette interview dans Le Quotidien papier de ce vendredi

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