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[Élections sociales] Le monde syndical se féminise de plus en plus


Milena Steinmetzer (à g.), secrétaire centrale de l’OGBL, Delphine Nicolay, secrétaire générale de l’Aleba et Maria-Helena Macedo (à d.), secrétaire syndicale adjointe du LCGB.

Depuis plusieurs années, les femmes occupent une place importante autant dans les délégations qu’au sein même des structures syndicales du pays. Malgré tout, certaines disparités demeurent.

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Les prospectus et affiches électorales ont envahi depuis quelques semaines les rues d’Esch-sur-Alzette. Au siège de l’OGBL, Nora Back prépare activement les élections sociales. Voilà près de cinq ans qu’elle occupe la présidence de la Chambre des salariés (CSL), mais aussi celle du premier syndicat du pays.

Avant elle, jamais une femme n’était arrivée à accéder à ces deux postes. Elle reconnaît que cela a été «une vraie fierté» dans un milieu historiquement très masculin. «Je n’ai pas mesuré tout de suite l’impact que cela pouvait engendrer. Il est vrai que, par la suite, beaucoup de femmes m’ont dit à quel point ce changement était important. Il représentait aussi la reconnaissance du travail des femmes dans le milieu syndical», confie-t-elle.

Alors, cinq ans après sa double élection, elle observe que «d’importants changements et avancées» ont été réalisés, et ce, au sein même de son syndicat. Pourtant, des efforts restent encore à faire, notamment à la Chambre des salariés où les femmes restent sous-représentées.

En effet, sur les 60 élus, 21 sont des femmes. «Il est difficile de trouver des candidates, car de manière générale, il est souvent compliqué pour elles d’avoir un engagement syndical ou politique. Souvent par manque de temps, car elles en consacrent beaucoup ailleurs, comme à la maison», explique la présidente de l’OGBL.

Avoir une femme à la tête de la CSL montre aussi que le vent a tourné

Mais, Nora Back veut du changement à la CSL, tout comme le LCGB et l’Aleba (Association luxembourgeoise pour tous les employés ayant besoin d’assistance). Alors, pour ces élections sociales, la volonté de parité est de mise.

Mais quand on regarde de plus près ces trois listes, l’égalité est loin d’être atteinte (43 femmes sur 120 candidats pour l’OGBL, 46 femmes sur 114 candidats pour le LCGB et 38 femmes sur 82 candidats pour l’Aleba).

Encore certaines disparités

Si logiquement, certains secteurs d’activité présents à la CSL sont moins représentés par les femmes, «d’autres devraient l’être davantage», appuie Milena Steinmetzer.

Mais des avancées peuvent être soulignées, comme c’est le cas dans la sidérurgie. «Nous avons réussi cette année à présenter des femmes. C’était du jamais vu», se réjouit Maria-Helena Macedo, secrétaire syndicale adjointe du LCGB.

Et qu’en est-il du côté des futures déléguées du personnel? Là aussi, les femmes sont de plus en plus nombreuses. Et ce, bien avant ces élections sociales. «Il y a un vrai changement depuis 2019. On a constaté un plus grand équilibre au niveau de certains postes occupés historiquement par des hommes, comme la présidence ou la vice-présidence de délégations du personnel», indique la syndicaliste du LCGB.

Si le constat d’une plus grande féminisation est également partagé par les deux autres syndicats, Milena Steinmetzer, membre active du comité Equality de l’OGBL, note encore certains déséquilibres.

«On le voit dans les fonctions occupées. Par exemple, le rôle de délégué à l’égalité ou celui de secrétaire est plutôt occupé par des femmes. A contrario, les hommes seront très représentés dans les délégations à la sécurité.»

Et dans les structures syndicales ?

Les trois syndicats sont tous d’accord sur le fait que les syndicats se féminisent de plus en plus au sein même de leur structure. Et cela encore davantage que dans le monde politique. «Les syndicats ont toujours une longueur d’avance, car ils ont toujours été plus progressistes», souligne la présidente du premier syndicat du pays.

À l’OGBL, l’élection de Nora Back a aussi incité d’autres femmes à prendre des fonctions. «En 2022, nous avons eu une croissance de femmes encore plus importante que celle des hommes», précise Milena Steinmetzer.

Du côté de l’Aleba, qui fonctionne sous le statut d’une ASBL, certaines inégalités demeurent notamment au niveau de son conseil d’administration. «Il y a à peu près 10 femmes sur 40 et 2 sur 10 pour le comité exécutif (…). Peut-être qu’il y a encore des réticences pour les femmes. Pour ma part, si on ne m’avait pas proposé le poste de secrétaire générale, je n’aurais pas forcément levé la main pour me présenter», confie Delphine Nicolay.

Enfin, pour le deuxième syndicat du pays, un tiers de femmes sont présentes au sein de sa structure. «Depuis 2019, tout comme les délégations, les femmes sont plus présentes. Je pense que c’est aussi lié au contexte de changement de génération (…). Il est vrai aussi que d’avoir une femme à la tête de la CSL montre que le vent a tourné», reconnaît Maria-Helena Macedo du LCGB.

Si ces trois syndicalistes reconnaissent que leur milieu a considérablement changé, pour elles, la place des femmes reste fondamentale pour défendre une juste égalité entre les deux sexes dans un monde professionnel où beaucoup de travail reste encore à faire.

Dans le milieu professionnel, les inégalités sont plurielles

Inégalité salariale, harcèlement sexiste, pension dévalorisée, impôts… Au Luxembourg comme ailleurs, de nombreuses disparités existent entre les hommes et les femmes. C’est dans cette optique d’égalité que l’OGBL et le LCGB possèdent depuis plusieurs années un comité syndical dédié aux femmes et plus largement à l’équité entre les deux sexes.

Pour Milena Steinmetzer du comité Equality de l’OGBL, l’un des principaux chevaux de bataille de son groupe reste l’égalité salariale. «Sur le terrain, on a remarqué que les primes ou les bonus étaient plus accordés aux hommes.»

Des différences liées aussi au type de contrat. «Environ 36 % des femmes travaillent à mi-temps, contre 6 % des hommes. Pourquoi réduisent-elles leur temps de travail? Car souvent, elles doivent prendre en charge leurs enfants ou leurs parents âgés. C’est ce que l’on appelle le care work», regrette la syndicaliste.

Et une fois arrivées en pension, l’écart se creuse encore. «Au Luxembourg, c’est l’un des plus importants d’Europe (…). Ce que nous souhaiterions, c’est un vrai équilibre. Cela peut passer par l’élargissement du congé parental masculin après la naissance», note la syndicaliste de l’OGBL.

Si cette problématique est une réalité au quotidien, il est parfois difficile de la mettre en avant. «Il faut comparer l’expérience, le travail et l’ancienneté de manière égale. C’est aussi parfois très tabou d’en parler.»

Des disparités que l’on retrouve aussi dans l’accès à certains postes. «Ce sont des choses qui devraient être inscrites noir sur blanc dans les conventions collectives, tout comme l’accès aux formations. C’est notamment l’un des rôles des délégués à l’égalité. Mais ceux-ci sont souvent méconnus des salariés. C’est pour cette raison que nous demandons qu’il y ait de vrais moyens, et en plus grand nombre», note Milena Steinmetzer.

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