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Double homicide à Bereldange : un jus de pastèque fait maison et les suspicions de trois amis…


Le procès du policier poursuivi pour avoir empoisonné sa sœur et son beau-frère le 25 septembre 2016 chez lui à Bereldange a entamé sa deuxième semaine mercredi. (Photo : archives lq/Julien Garroy)

Avant de proposer le Get 27 empoisonné à sa sœur et son beau-frère le 25 septembre 2016 chez lui à Bereldange, le policier avait-il fait d’autres tentatives? C’est la question qui se pose à l’issue du 5e jour du procès, mercredi

«Dans cette affaire, il n’y a pas une pierre qu’on n’a pas retournée.» À la suite de la mort suspecte de la sœur et du beau-frère du policier le 25 septembre 2016 dans son appartement à Bereldange, les grands moyens avaient été déployés. Aujourd’hui on sait ainsi qu’à partir de la mi-juin, le prévenu Gilles L. (30 ans) s’est fortement intéressé à divers poisons. L’historique de ses recherches sur internet grouille de substances toxiques. Il s’était même renseigné au sujet de poisons difficilement détectables en cas d’autopsie. On sait aussi qu’il a commandé en tout trois produits sur le darknet. L’une de ces substances, il l’a mélangée au Get 27. Le fameux apéro qu’il avait proposé aux victimes, il l’avait acheté deux jours plus tôt pour 12,62 euros dans un magasin à Bereldange.

Mais il n’y a pas que l’analyse de son ordinateur et de son portable, les perquisitions, les CRI à l’étranger et le FBI qui ont aidé à retracer la chronologie des événements. «Plus de 100 personnes ont été entendues», soulèvera ainsi l’enquêteur de l’inspection générale de la police (IGP) au 5e jour du procès, mercredi après-midi.

Ibiza, San Francisco et Bereldange

La première semaine du procès l’avait déjà montré : l’un ou l’autre témoignage n’aura pas été insignifiant. Mercredi, l’enquêteur en a dévoilé d’autres. On aura ainsi appris que trois amis de Gilles L. s’étaient confiés s’être sentis «très mal» un jour en sa présence. Et cela peu de temps avant les faits pour lesquels il comparaît aujourd’hui devant la 13e chambre criminelle.

Le premier ami parle d’un voyage à Ibiza en juin 2016. À un moment où il se serait trouvé seul avec Gilles L., il aurait été pris d’un malaise. Il aurait eu l’impression que le sol se dérobait sous lui. Il n’aurait jamais vécu une chose pareille. Un autre bon ami d’enfance raconte avoir vécu une expérience similaire à San Francisco le 20 juillet de la même année. Gilles L. était venu lui rendre visite. Et au cours d’un repas dans la ville, il se serait senti tellement mal qu’il avait dû rentrer. Il aurait aussi eu une envie de vomir et ressenti un picotement dans les doigts.

«Les deux n’ont sans doute pas eu de contact avec un produit provenant du darknet. Mais peut-être une autre substance?», avance l’enquêteur. Ce n’est en effet que le 10 août, que Gilles L. s’enregistre sur la plateforme commerciale Alphabay Market. La première commande retracée a eu lieu le 19 août. L’analyse capillaire des amis dans le but de détecter une éventuelle prise de drogue et écarter cette hypothèse n’a pas été autorisée lors de l’instruction. «Ce sont des bons amis, pourquoi auraient-ils abordé le sujet s’ils avaient consommé de la drogue?», ne manquera pas de remarquer la présidente.

Simple hasard ou suite des préparatifs?

Le troisième incident relaté avait eu lieu le 8 septembre. Cette amie avait fait état d’un malaise une demi-heure après que Gilles L. lui avait passé une bouteille d’eau chez lui… De l’enquête, il ressort que le jour même, il avait fait le plein de bitcoins pour faire une nouvelle commande sur le darknet. Simple hasard ou suite des préparatifs?

La mort soudaine de sa sœur et son beau-frère supposés partager le déjeuner avec lui était intervenue quelques jours à peine après le dernier achat. Pour l’enquêteur, pas de doute qu’il y a «un véritable fil rouge» dans toutes ses démarches. Début septembre, ils s’étaient déjà vus en tête à tête. Gilles L. leur avait proposé de ramener une pastèque de laquelle il ferait un jus. La soirée s’était terminée par des maux de ventre. Car dans la suite des SMS, les enquêteurs ont pu lire comment le lendemain Gilles L. se renseignait sur leur état. Lui-même avait écrit avoir eu des crampes d’estomac… Le 20 septembre enfin, il avait écrit un SMS à sa sœur dans lequel il insistait pour qu’elle vienne le voir avec son compagnon le 25 septembre 2016 à Bereldange. Et il avait précisé qu’il ferait la cuisine.

Grâce à l’analyse toxicologique, on sait que le couple a été empoisonné ce jour-là au cyanure de potassium. Or depuis le 30 septembre 2016, la ligne de défense de Gilles L. est la suivante : «J’ai acheté de la toxine botulique. Je ne savais pas que cette substance est mortelle, sauf pour un petit pourcentage.»

Si en date du 19 août, il a bien payé le produit intitulé «Botulinumtoxin Strong Poison», le 16 septembre il est question de «Fentanyl». Une erreur d’envoi, plaide la défense. C’est une hypothèse. Mais pour l’enquêteur, il y en a une autre : «Si le vendeur n’avait pas de toxine botulique dans sa gamme de produits, il peut avoir envoyé une autre dose mortelle.»

«Ce vendeur ne proposait rien de bon»

Toxine botulique ou cyanure de potassium? Pour l’effet final cela ne change pas grand-chose. Car ce sont des substances mortelles. «Ce qui se dégage, c’est que ce vendeur ne proposait rien de bon», notera encore la présidente.

D’après certains témoins, le prévenu vivait sur un grand pied. Quand on sait qu’entre 2015 et 2016, il a dilapidé la moitié de son compte épargne, soit quelque 30 000 euros, et qu’il comptait faire visiter l’appartement de Bereldange – dont lui et sa sœur avaient hérité au décès de leur mère – pour le vendre…

Le procès se poursuit ce jeudi après-midi.

Fabienne Armborst

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