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Double homicide à Bereldange : le couple foudroyé entre l’apéro et le gratin de pâtes


Après la mort mystérieuse du couple dans l'appartement d'un policier à Bereldange, une vaste opération de recherche d’indices avait eu lieu autour de la résidence. (Photo : archives lq/Julien Garroy)

Le procès du policier poursuivi pour avoir empoisonné sa sœur et son beau-frère chez lui à Bereldange en 2016 s’est ouvert mardi matin. Le couple a avalé du cyanure de potassium, a révélé l’expert toxicologue.

Le gratin de pâtes au four était encore tiède quand l’enquêteur de la police judiciaire avait débarqué le 25 septembre 2016 dans l’appartement à Bereldange. Sur la table se trouvait une bouteille de bière fermée. L’horloge était à l’arrêt. Et les corps des deux cadavres gisaient au sol dans le salon. Des images qu’il n’est pas près d’oublier de sitôt. D’autant plus qu’il se trouvait au domicile d’un policier.

Il était 14 h 29, quand ce dernier avait appelé le 112. Gilles L. était le seul qui allait bien à l’arrivée de l’ambulance. Sa sœur âgée de 30 ans et son compagnon de 31 ans avaient perdu connaissance. Mais les secours n’avaient rien pu faire pour les sauver : absence de réaction cardiaque. Le jeune couple, supposé partager le déjeuner avec Gilles L., était décédé subitement ce dimanche après-midi.

Depuis mardi matin, la 13e chambre criminelle planche sur ce double décès mystérieux. «Je suis responsable de ce qui s’est passé. Mais je n’avais pas l’intention de les tuer.» Vêtu d’une chemise blanche, le jeune homme, âgé aujourd’hui de 30 ans, s’est avancé à la barre. Le trentenaire qui dort à Schrassig depuis le 30 septembre 2016 parce qu’il est poursuivi pour avoir tué volontairement et avec préméditation sa sœur et son beau-frère avec du cyanure de potassium, ajoutera : «Cette substance, je ne l’ai pas commandée. J’aurais directement dû dire ce qui s’est passé…»

La terrasse et la liqueur à la menthe Get 27

«Ce qui s’est passé», ce n’est en effet pas ce qu’il avait déclaré dans un premier temps à l’enquêteur qui l’avait interrogé sur la chronologie de la journée. Sa sœur et son compagnon revenaient en début d’après-midi d’une randonnée à Vianden. Ils devaient déjeuner chez lui. D’où le gratin de pâtes… Le prévenu disait avoir constaté leur pâleur à leur arrivée et savoir qu’ils avaient bu de la liqueur de noix. Ils s’apprêtaient à attaquer le repas après avoir pris l’apéro sur la terrasse avec la liqueur à la menthe Get 27, quand d’un seul coup, tous deux avaient été pris d’une sorte de malaise et de difficultés respiratoires. La suite on la connaît.

Le jeune homme avait encore nié avoir éliminé la moindre preuve. Mais les résultats de l’expertise toxicologique et la suite de l’enquête accompagnée d’une vaste opération de recherche autour de la résidence avaient révélé que ce n’était pas tout à fait la vérité. Le couple n’avait pas été intoxiqué lors de sa randonnée par la liqueur de noix ou un éventuel champignon dans la nature comme la première version du prévenu pouvait le laisser sous-entendre. Non, les deux victimes présentaient une haute concentration de cyanure de potassium. Les analyses de sang et le contenu stomacal avaient révélé ce poison violent «bien au-delà du taux mortel». La durée d’action de cette substance? «C’est très rapide. Quinze minutes», précisera mardi l’expert toxicologue à la demande de la présidente.

Si le cyanure de potassium est la substance mortelle qui a été trouvée dans leur corps, ce n’est pas celle que le prévenu expliquera finalement leur avoir administrée. Il parlera de toxine botulique. Pas sûr que cela soit beaucoup mieux. À entendre l’expert mardi, cette substance est en effet «le numéro 1 des poisons connus». Pour avoir une idée de la concentration du dosage, «moins d’un grain de sel suffit!». «Pas besoin donc de le verser dans du Get 27 pour le dissimuler», remarquera la présidente. Seule différence avec le cyanure de potassium, c’est que les premiers symptômes n’interviennent «qu’au bout de six à huit heures».

Mais ce n’est pas pour autant que Gilles L. aurait eu l’intention de tuer. Son explication : il avait lu que la substance était seulement mortelle à une «très haute dose» et il avait voulu provoquer un état d’euphorie chez ses invités. Mais là non plus cela ne colle pas, selon l’expert : «En dessous de la dose mortelle, les effets sont des vertiges et une insuffisance respiratoire.»

«Des substances déjà interdites au XVIIIe siècle»

Toujours est-il que ni le cyanure de potassium ni la toxine botulique ne s’achètent en pharmacie. L’expert est catégorique : «Ils étaient déjà interdits au XVIIIe siècle. Car ce sont des poisons.» Et effectivement c’est sur le darknet que le prévenu avait passé sa commande. Les enquêteurs en parleront plus précisément ce mercredi après-midi lors de la suite du procès.

Au total six autres audiences sont prévues. Elles devraient faire la lumière sur d’autres points. Ainsi, il semblerait que la préparation d’une soupe en sachet aurait été éliminée. Les fameux verres à shot n’étaient plus non plus visibles à l’arrivée de la police judiciaire. Et enfin, le prévenu comptait faire visiter son appartement à une agence immobilière dès le 29 septembre. Soi-disant parce que le logement était trop grand pour une seule personne… Tous ces éléments avaient attiré les soupçons sur le policier. Le jeune homme qui avait prêté serment en septembre 2013 est actuellement suspendu.

Fabienne Armborst

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