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[Conference League] Van Lingen, créateur et conteur d’histoire


La phase d’adaptation? Oege-Sietse Van Lingen ne connaît pas. (Photo : gerry schmit)

Premier joueur «luxembourgeois» de l’ère moderne à planter un triplé en Coupe d’Europe, le n° 9 du F91 s’est forgé, jeudi à Dublin, un souvenir qu’il racontera plus tard à ses enfants.

C’est Jean-Jacques Eydelie, ancien milieu de Nantes, Marseille ou Benfica, et acteur central de la tristement célèbre – en France – affaire VA-OM* qui, dans son ouvrage intitulé Je ne joue plus! (consacré à l’affaire, justement), avait dévoilé les conditions de son arrivée à l’OM, et le pourquoi du crush du président marseillais d’alors, l’incorrigible Bernard Tapie, pour lui : «Je préfère que tu casses les adversaires que mes joueurs. Tu es un fou dangereux. Je préfère t’avoir avec moi que contre moi.»

Oege-Sietse Van Lingen n’est certainement pas un fou dangereux, juste un attaquant (très) dangereux, et loin de nous l’idée de comparer Gerry Schintgen, le président du F91, à l’ancien boss de l’OM et d’Adidas. Mais on se demande tout de même si le board dudelangeois n’a pas un peu raisonné comme «Nanard» au moment d’engager la trouvaille hivernale de Rosport : après tout, l’avoir dans son effectif était le meilleur moyen de ne plus avoir le Néerlandais de 23 ans dans les pattes, chose que Dudelange avait déjà payé au prix fort en 2023.

Deux buts contre, quatre buts pour

Fin avril, en quart de finale de la Coupe, c’est lui qui avait ouvert le score et mis le Victoria sur la voie d’un exploit au Jos-Nosbaum (2-3 a.p.). Onze jours plus tard, en championnat, c’est lui qui, d’un enroulé superbe du gauche, avait scellé en toute fin de match (83e) le succès rosportois (2-1) et quasiment acté, du même coup, la perte du titre des Dudelangeois.

Alors quitte à ce qu’il mette des buts, autant que le natif de Twijzelerheide les mette pour le F91, chose qu’il fait déjà très bien : 4 en deux matches de Conference League contre Saint-Patrick’s Athletic, un à l’aller (2-1) et les trois du retour (2-3) jeudi à Dublin, qui confirment la faculté d’adaptation d’un garçon qui n’avait pas mis longtemps avant de flamber à Rosport. Décisif dès son 3e match (une passe décisive), Van Lingen l’a ensuite été 11 fois (7 buts, 4 «assists») lors de ses 14 apparitions suivantes.

À Dudelange, où il s’est «tout de suite senti le bienvenu» et a «été intégré rapidement» dans ce qu’il perçoit «comme une famille», l’histoire se répète en accéléré, et ce n’est pas pour déplaire à son capitaine Bruno Freire, qui a salué «un sacré attaquant, splendide devant le but, un vrai finisseur» jeudi après son triplé à Dublin.

Ni à Sylvio Ouassiero, «content» que ce «joueur intelligent, toujours au bon endroit au bon moment», doublé d’«un bon gars» qui «bosse beaucoup et (…) se bat pour l’équipe», ait revêtu cet été le maillot jaune. Et ait lutté à partir de l’heure de jeu, jeudi, contre l’usure physique pour ramener le F91 à égalité (2-2, 66e), d’un tir précis du droit à 18 mètres, puis lui offrir la victoire dans le temps additionnel, du gauche, après avoir effacé son vis-à-vis aux abords de la surface (2-3, 90+5).

Mieux que Joachim, Er Rafik ou Sinani

«Après une heure, rejouait-il sur la pelouse de Richmond Park après le coup de sifflet final, je commençais à avoir des crampes, mais je me disais « Je ne peux pas sortir, c’est impossible, il faut que je continue!«  Mettre le 2-2 m’a redonné de l’énergie et le 3-2, c’est job done!» Comprendre, le sentiment du devoir accompli, si bien accompli que l’UEFA a marqué le coup, comme le veut la tradition, en offrant le ballon du match au triple buteur, une prouesse qu’aucun joueur local, que ce soit Aurélien Joachim (2 doublés) avec Dudelange, Omar Er Rafik avec Differdange ou Danel Sinani avec le F91 (3 doublés chacun) n’a réalisé sur la scène européenne dans l’histoire récente.

Une prouesse que le héros du jour avouait «ne pas réaliser» à chaud, et accomplie notamment sous les yeux de ses parents, venus sur son invitation à Dublin. «C’était un moment spécial, confiait le joueur formé à Groningue. J’étais ému après le match, car je sais d’où je viens et le travail qu’il a fallu fournir pour en arriver là. J’ai aussi reçu un gros soutien en livestream, des Pays-Bas, je sais que beaucoup de gens regardaient et je suis content des les avoir rendus heureux.»

Parmi ses supporters à distance, son épouse, «malheureusement» absente, mais qui sera du voyage à Malte la semaine prochaine. En attendant, Oege-Sietse Van Lingen lui a ramené un joli souvenir d’Irlande, ce vendredi, nettement plus original qu’un verre Guiness ou un magnet en forme de lutin : un ballon signé par tous ses équipiers. «Ce sera un trophée pour la maison, et pour mes futurs enfants, se projette le n° 9 dudelangeois. Plus tard, je pourrai leur raconter cette soirée dingue.» Des histoires de ce genre, quelque chose nous dit qu’il en aura beaucoup d’autres à leur conter.

* Une affaire de corruption destinée à assurer le titre de champion de France 1993 à Marseille, sur le point de disputer – et de remporter – la finale de la Coupe d’Europe des clubs champions (C1), qui a précipité la chute de Valenciennes et l’OM, rétrogradés en D2. 

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