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[Communales] Wiltz : «On entend plein de choses sur notre bourgmestre»


Les élections du 11 juin se joueront entre trois listes, mais quelle que soit l’issue, le cap est donné : il faut anticiper la croissance démographique continue de la ville.

À Wiltz, bastion du LSAP depuis 1988, la campagne électorale bruisse des démêlés judiciaires de son bourgmestre.

«Je sais que ça risque de me coûter des voix, cette affaire-là», soupire Fränk Arndt, le bourgmestre LSAP sortant, candidat à sa propre succession aux élections communales de Wiltz, le 11 juin. «Cette affaire-là», ce sont en réalité plusieurs enquêtes judiciaires, lancées par le parquet de Diekirch depuis 2021, qui portent sur des décharges illégales, des transactions immobilières et des travaux dans un chalet.

Fränk Arndt et d’autres personnes sont soupçonnés d’infractions à la gestion des déchets, de prise illégale d’intérêts, de corruption et trafic d’influence. Les instructions en cours font peser une épée de Damoclès au-dessus du bourgmestre et confèrent une drôle d’atmosphère à la campagne électorale.

Car même si la présomption d’innocence doit s’appliquer, dans la rue d’aucuns s’interrogent et ne comprennent pas pourquoi le bourgmestre brigue un troisième mandat dans de telles conditions. «Si je ne me représente plus, les gens vont dire que c’est parce que je suis coupable», lance un Fränk Arndt excédé, qui jusqu’à présent était resté discret mais a décidé de s’exprimer.

Selon lui, les médias n’ont pas effectué un travail d’investigation minutieux et ont contribué à propager des inexactitudes : «Je voudrais qu’un journaliste prenne le temps de regarder où et pourquoi ça a commencé, pourquoi d’un seul coup, on tire tellement sur moi. Le moment venu, je prendrai mes responsabilités vis-à-vis de certaines personnes. Il y a surtout de la jalousie là-dedans.»

Quid des perquisitions dans les locaux de l’administration communale en 2021 et 2022? «Elles n’ont rien donné», balaie Fränk Arndt, arguant que si les rumeurs étaient fondées, les échevins et conseillers communaux pourraient «taper sur (lui), ils n’ont rien à perdre».

Un endettement record mais nécessaire

Il est vrai que les deux autres partis en lice à ces élections communales, le CSV et le DP, s’abstiennent de tout commentaire. Pourtant, ces affaires judiciaires, c’est du pain béni pour déboulonner un bourgmestre à la tête des affaires de la commune depuis 2009, non? «On entend plein de choses sur notre bourgmestre, on ne sait même pas de quoi on parle. Même si tout le monde ne discute que de ça, c’est mieux de ne rien dire», botte en touche l’ancien joueur de BGL Ligue Amel Cosic, président du DP wiltzois et conseiller communal.

«Ce n’est pas à nous de juger, appuie le deuxième échevin CSV de la coalition formée avec le LSAP, Patrick Comes. On n’a pas d’informations, le parquet fait son travail et doit trancher. En dehors de ça, on travaille comme d’habitude ensemble.»

Et cette unanimité est encore de mise lorsque sont évoqués les prêts contractés par l’Hôtel de ville à hauteur de 66 millions d’euros, le taux endettement pour une commune le plus élevé de tout le Grand-Duché. Des investissements conséquents dans des infrastructures ont en effet été nécessaires et une partie de la dette est due à leur préfinancement : l’ancienne ville ouvrière, dont la moitié de la population est issue de l’immigration et ne cesse d’augmenter, vise les 11 000 habitants d’ici 10 à 15 ans contre 8 000 actuellement.

Accueillir dans de bonnes conditions ces résidents nécessite des constructions supplémentaires, et des projets immobiliers d’envergure sont en cours de développement avec le Fonds du logement, ainsi que la création du centre médical Schlasskéier avec le Centre hospitalier du Nord… Le tout selon les préceptes de l’économie circulaire dont la commune s’est fait le chantre depuis 2015 (lire l’encadré).

Une Ville-Haute à réinventer

Toutefois, face à ces 1 100 logements annoncés, Amel Cosic tient à nuancer : «Le fait d’attirer plusieurs milliers d’habitants, qui augmentent certes les dotations de l’État à la commune, mais qui viennent s’installer dans une ville qui connaît déjà l’un des taux de chômage les plus élevés du pays, constitue un dilemme. Des efforts particuliers doivent donc être faits dans le domaine de la politique économique afin que Wiltz ne devienne pas un point chaud social.»

Entre l’ébauche de ces projets en 2009 et la dernière sortie de terre, une école pour 300 élèves inaugurée jeudi, certains trouvent le temps long, comme Rosanna Brandao-Silva (CSV) qui se présente pour la première fois à ces élections. Elle qui gère une épicerie dans la Ville-Haute note, comme ses opposants, que les commerces ne se portent pas très bien. Certains imputent la faute à l’arrivée du centre commercial de Pommerloch et ses 60 magasins, mais aussi au manque de place de stationnement – la ville dispose de 1 200 emplacements, mais à quelques minutes de marche des commerces.

Pour remédier au déclin du centre-ville, le DP souhaiterait attirer plus de restaurants et cafés afin de proposer une offre gastronomique variée, et le collège échevinal a imaginé faire venir des commerces de niche dont la clientèle bénéficiera aussi aux autres boutiques.

La commune a déjà acheté des immeubles qu’elle a fait refaire et compte louer les cellules commerciales prévues au rez-de-chaussée dans ce but, l’idée étant de «réaménager un peu toute la Ville-Haute pour la rendre plus attractive», précise Fränk Arndt, qui conclut que «c’est malheureux que le focus soit plus sur moi que sur ce qui a été fait, car même s’il reste beaucoup de pain sur la planche, on va dans la bonne direction».

Les enjeux de cette élection sont en effet cruciaux face à l’augmentation de la population : il faut créer les conditions nécessaires pour qu’il soit possible de trouver à la fois un logement et un travail dans la capitale des Ardennes.

L’économie circulaire de Wiltz reconnue par l’UE

Wiltz figure dans le «Circular Cities Declaration Report 2022» de l’Union européenne, la plus vaste évaluation jamais réalisée des pratiques d’économie circulaire dans les villes européennes. La construction du campus éducatif Géitz, dans le quartier «Wunne mat der Wooltz», selon les principes de l’économie circulaire, est présentée comme un modèle à suivre.

Le bâtiment, qui ouvrira dès la rentrée 2023, comprend une école fondamentale, une maison relais, une école de musique, un hall sportif, une cuisine et le musée pour enfants PLOMM. Il a été conçu avec des matériaux de construction sains et écologiques et pensé pour une adaptation facile des locaux, en fonction des besoins futurs. L’utilisation de l’eau de pluie et d’énergies renouvelables ainsi que la réduction des émissions CO2 sont autant de mesures favorisant l’économie circulaire.

Le rapport souligne par ailleurs les efforts entrepris par la commune afin de mieux faire connaître le sujet de l’économie circulaire aux décideurs et responsables communaux, aux entreprises locales et au grand public, lors de la «journée de l’économie circulaire», conférence organisée annuellement depuis 2018, ou via son centre de compétences et de formation «Circular Innovation Hub».

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