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Affaire de corruption au Parlement européen : les députés luxembourgeois en colère


La consternation dominait, hier, entre les murs du Parlement européen à Strasbourg.  (Photo : afp)

L’affaire de corruption révélée le week-end écoulé met en colère les eurodéputés luxembourgeois. Hier, leurs regards n’étaient pas seulement tournés vers Bruxelles et Strasbourg, mais aussi vers Budapest.

Les soupçons sont graves. Corruption, appartenance à une organisation criminelle et blanchiment d’argent. Dimanche, l’élue grecque Eva Kaili, une des vice-présidentes du Parlement européen, a été incarcérée à Bruxelles. Elle aurait été payée par le Qatar pour défendre les intérêts de l’émirat qui accueille actuellement la Coupe du monde de football. «Je n’ai pas pensé possible qu’une chose d’une telle envergure pouvait se produire au Parlement européen», admet Christophe Hansen, eurodéputé luxembourgeois du CSV et membre du Bureau du Parlement européen.

La consternation, et bien plus encore la colère, étaient palpables, hier, à tous les niveaux de l’hémicycle européen. «Ce sont des choses qui ne se font pas. Point à la ligne», lâche un Charles Goerens (DP) très remonté. Les soupçons qui se trouvent sur la table constitueraient «une attaque affreuse contre le Parlement européen. En plus, cette attaque est l’œuvre d’une élue de ma fraction. Cela rend les choses encore plus graves», lance Marc Angel (LSAP). «Rien que les graves soupçons de corruption de la part d’une députée européenne sont une triste nouvelle pour le Parlement», complète Tilly Metz (déi gréng).

Les députés européens luxembourgeois que nous avons joints, hier, à Strasbourg tiennent tous un discours très semblable. Au-delà de la colère et de la déception, ils soulignent l’importance de faire toute la lumière dans cette affaire de corruption supposée. Le fait que les agissements de la députée grecque ont pu être révélés est également salué. Par contre, une révision des règles de transparence des institutions européennes est qualifiée d’incontournable (lire ci-dessous).

Les regards étaient, hier, également tournés vers Budapest. «Alors que nous ne cessons de dénoncer la corruption systématique en Hongrie, c’est la crédibilité du Parlement européen qui en prend un coup», déplore Marc Angel. «Comment voulez-vous encore que l’on soit pris au sérieux si nous disons à Viktor Orban que nous lui gelons les fonds européens, car il ne respecte pas l’État de droit», s’interroge Christophe Hansen.

«Bonjour au Parlement européen!», n’a pas tardé à ironiser sur Twitter le Premier ministre hongrois alors que son pays est épinglé par les institutions européennes pour son niveau de corruption.

«Un coup bas pour le Parlement»

Christophe Hansen (CSV) : «Je suis autant choqué que consterné. Je n’avais pas pensé possible qu’une chose d’une telle envergure pouvait se produire au Parlement européen. Je suis également en colère, car c’est l’ensemble de l’institution qu’est le Parlement européen qui perd en crédibilité. Il nous faut mettre au plus vite toutes les choses au clair. Tous les acteurs doivent y contribuer. Selon moi, le Parquet européen mais aussi l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) devraient être impliqués pour que tout cet amalgame de reproches de corruption soit élucidé. Une discussion devra aussi être menée sur le registre de transparence interinstitutionnel. Je ne peux que supposer que les noms des personnes qui auraient corrompu l’élue grecque ne figurent pas dans ce registre. Visiblement, le registre ne tient pas encore compte de tous les cas de figure possibles. En même temps, si le soupçon d’un réseau criminel se confirme, le registre ne sera pas suffisant à lui seul. On ne pourra rien faire sans le concours de la justice. Malgré tout, les révélations prouvent que ces faits très graves ne restent pas impunis. On ne peut cependant pas nier qu’il s’agit d’un coup bas pour le Parlement européen. En outre, il nous faut éviter de politiser les choses. La personne inculpée est certes socialiste, mais a agi en tant qu’individu.»

«L’image du Parlement est souillée»

Charles Goerens (DP) : «Je suis tout simplement consterné et en colère, car l’image du Parlement européen est souillée dans son ensemble. Ce sont des choses qui ne se font pas. Point à la ligne. Aussi, un vice-président du Parlement n’est pas à comparer à un demi-dieu. Chacun a ses défauts et commet des erreurs. Mais les faits qui sont reprochés à Mme Kalas sont intolérables. Il importe peu que l’on soit vice-présidente ou simple députée. Malheureusement, nous n’avons pas encore de détecteur pour cerner l’agenda caché ou les arrière-pensées d’un élu, celui qui le veut trouvera toujours une échappatoire pour passer outre les règles. Mais force est de constater que le système existant a permis de révéler ces faits. Cela prouve que l’on n’est pas confronté à une opacité institutionnelle, bien au contraire. Il est quelque part rassurant de voir que l’on dispose des moyens pour compromettre de ce type d’agissements. La justice fera son chemin. Cela n’enlève cependant rien à ma déception et ma colère : cette affaire va détourner l’attention de l’ordre du jour proprement dit de cette séance plénière, ce n’est pas une bonne chose. Pour terminer, j’aimerais aussi lancer un appel à la prudence en ce qui concerne les soupçons qui pèsent sur d’autres eurodéputés. Je connais notamment très bien Marc Tarabella. Je ne peux pas m’imaginer qu’il ait accepté de l’argent.»

«Il doit y avoir une tolérance zéro»

Tilly Metz (déi gréng) : «Je suis consternée par ces accusations. Rien que les graves soupçons de corruption de la part d’une députée européenne sont une triste nouvelle pour le Parlement européen, l’institution qui se prononce le plus souvent et le plus bruyamment contre la corruption. C’est justement pour nous, la représentation directement élue de la société européenne, qu’il doit y avoir une tolérance zéro contre la corruption et les pots-de-vin. Eva Kaili a déjà perdu notre confiance. Le groupe des Verts lui demande donc de démissionner de son poste de vice-présidente avec effet immédiat. Si les soupçons à son encontre s’avèrent fondés, elle devra également démissionner de son mandat de députée. Le fait que cette affaire de corruption ait été dévoilée et qu’elle ait des suites directes, si les accusations se confirment, montre que les principes de l’État de droit sont pris au sérieux. Le vote prévu cette semaine sur la facilitation de l’octroi de visas aux citoyens et citoyennes qatariens doit évidemment être ajourné au vu des graves accusations portées. Qui prendrait un tel vote au sérieux dans le contexte actuel? Au-delà de ce scandale et du cas précis du Qatar, c’est un moment crucial pour le Parlement européen qui mènera peut-être enfin à l’adoption de règles plus strictes en matière de transparence de notre institution.»

«La corruption est un poison pour la démocratie»

Marc Angel (LSAP) : «Je suis choqué, en colère et consterné par les révélations. Je ne peux que lancer un appel à la transparence. Je m’attends notamment de la part de la conférence des présidents à des propositions sur comment traiter avec des pays autoritaires comme le Qatar. Visiblement, il existe encore des failles dans notre registre de transparence. Nous devons y travailler. Le fait que cette affaire ait été révélée démontre que les politiciens ne peuvent pas tout se permettre. Mais en même temps, ces soupçons de corruption constituent une grave atteinte à la réputation du Parlement européen. Ce qui rend la chose encore plus grave, c’est que c’est une socialiste qui se trouve au centre de cette affaire. Le grand calme des autres familles politiques siégeant au Parlement européen m’étonne un peu. En tout cas, j’espère qu’il s’agit d’un cas isolé. Si d’autres élus sont impliqués, toute la lumière devra être faite. La corruption est un poison pour la démocratie. Il nous faudra passer cette épreuve. Je fais entière confiance à la justice belge. En attendant, l’ambiance est très lourde à Strasbourg. Tout le monde est très tendu, y compris les agents et tous les collaborateurs qui croient tous à cette institution démocratique qu’est le Parlement européen. On est loin de ce que l’on connaît d’habitude pour cette dernière session plénière de l’année.»

3 plusieurs commentaires

  1. pour etre politiciens il faut etre menteur et parfois voleur ils ne sont pas la pour rien belle immage a nous donner eux qui sont faiseur de lecons et je suis sur qu il y en a encore beaucoup plus!

  2. Pierre van de Berg

    Et pour von der Leyen avec ses agissements avec Pfizer …
    Là vous ne dites rien?!
    Quelle hypocrisie !!!

  3. Larsen Irene

    Et vous croyez que tout cela est seulement de maintenant
    avec le Quatar?
    Jamais des cas pareils au paravent a tout niveau?

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