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[Littérature] Anne Berest, la biographe devenue romancière


Avec Finistère, son nouveau roman, Anne Berest remonte le fil de sa famille paternelle. De quoi renouer avec son premier métier de biographe. (Photo : pascal ito)

Anne Berest apparaît au cinéma, a donné des leçons de chic à la parisienne et est une «amie» de la maison Chanel, mais la romancière reste marquée par ses années comme biographe de gens modestes.

Dans le roman Finistère, publié aux éditions Albin Michel, le sujet d’Anne Berest est la lignée paternelle… jusqu’à elle-même, qui est la deuxième de trois sœurs. La benjamine, Claire, écrit aussi. Comme le titre l’indique, leur père était breton. Le livre s’ouvre par une longue évocation de Saint-Pol-de-Léon, dans le Finistère-Nord, où le grand-père, au début du siècle dernier, fonde une coopérative pour défendre les intérêts des agriculteurs. Puis naît le père d’Anne Berest, élève doué qui va partir pour la capitale française et le lycée Henri-IV. Décédé en 2021, il a pu lire une bonne partie du livre.

«Biographe pour personnes âgées, ça a été mon école d’écriture», dit l’écrivaine. Après avoir étudié les lettres et le théâtre, Anne Berest a cofondé à 29 ans Porte-Plume, qui rédigeait des autobiographies à partir d’entretiens. Elle en a écrit «des dizaines». Autant de clients, de tous milieux sociaux, qui peuvent s’enorgueillir, aujourd’hui, du luxe d’avoir leur vie narrée par une autrice parmi les plus appréciées de la critique dans sa génération.

«Devenir romancière»

Elle a beaucoup aimé ce métier. «Chaque vie, quand on s’y plonge, quelle qu’elle soit, est romanesque. Il n’y a pas une seule de ces personnes dont je ne me suis pas dit : « Mais sa vie est extraordinaire! »» Et la profession le lui a bien rendu. «Je voulais pouvoir gagner ma vie pour écrire mes romans. Et, aujourd’hui, je comprends que ce n’étaient pas deux activités parallèles, mais qu’en fait, être biographe m’a appris à devenir la romancière que je suis devenue.» «Ce n’étaient pas des gens célèbres. C’était vraiment un cadeau qui était offert par les enfants, les petits-enfants pour leurs parents ou grands-parents. (…) Toute cette génération avec laquelle j’ai travaillé avait connu la guerre mais à des endroits totalement différents», se souvient-elle.

Ce savoir-faire avait pris toute son ampleur avec La Carte postale, en 2021. Avec un sujet très délicat : les membres de la famille de sa mère assassinés à Auschwitz. Le livre, a-t-elle pu voir quand elle l’a défendu, a bouleversé beaucoup de lecteurs, aussi bien ceux qui ont connu l’Occupation que les jurés du prix Renaudot des lycéens, qui l’ont couronnée cette année-là.

Amie de Karl Lagerfeld

Venue en mai au festival de Cannes pour défendre Vie privée, film dont elle a cosigné le scénario, puis interrogée dans Fragments d’un parcours amoureux de Chloé Barreau, sorti en juin, Anne Berest est une figure du tout-Paris littéraire. Celle qui a été l’une des autrices en 2014 du best-seller international How to Be Parisian Wherever You Are («Comment être Parisienne où que vous soyez»), on la connaît aussi comme l’une des ambassadrices de Chanel.

«J’ai eu la chance qu’un être comme Karl Lagerfeld rentre dans ma vie, qu’il me choisisse parce qu’il avait lu mon livre sur Françoise Sagan (NDLR : Sagan 1954, 2014), qu’il m’a écrit, que je l’ai rencontré, et qu’on est devenu amis. (…) J’ai aimé le côtoyer exactement avec la même passion que j’ai aimé côtoyer ma grand-mère, dont je parle dans ce livre, qui voulait devenir historienne, et pour laquelle la vie a choisi autre chose», explique-t-elle.

C’est l’un des nombreux sujets de Finistère. Il y aussi le trotskisme de son père, ou encore la manière dont sa mère avait été prévenue, en 1979, que vouloir garder cette enfant ferait courir d’énormes risques à sa santé. La petite Anne était née tout de même : «J’ai pu exister, grâce au courage de ma mère.»

Finistère, d’Anne Berest.

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