Le gouvernement, avec le soutien d’une majorité de députés, juge que le moment n’est «pas opportun» pour procéder à un tel «acte symbolique». La situation pourrait évoluer dans les mois à venir.
L’unanimité a prévalu hier à la Chambre pour condamner une nouvelle fois le «massacre» commis le 7 octobre par le Hamas sur le territoire d’Israël, tout en jugeant que le gouvernement israélien a dépassé les limites de la légitime défense en continuant à bombarder la bande de Gaza, avec à la clé des dizaines de milliers de civils qui périssent.
Les partis étaient toutefois plus divisés sur la question de la reconnaissance formelle d’un État palestinien. Le LSAP a introduit une motion pour appeler le gouvernement à se rallier à une initiative de quatre autres membres de l’UE – l’Espagne, l’Irlande, Malte et la Slovénie – qui pourraient procéder dès le 21 mai à cette reconnaissance. «Ceux qui disent être favorables à une solution à deux États doivent adopter cette motion», appuie Yves Cruchten.
Le député socialiste, «très fier» de l’adoption d’une motion semblable en décembre 2014, est sorti hier «attristé» d’un débat qui n’a pas permis de réunir une majorité. En fin de compte, seuls 17 élus ont voté oui (LSAP-déi gréng-déi Lénk), contre 40 non (CSV-DP-ADR) et 3 abstentions (Parti pirate). Le principe même d’une reconnaissance d’un État de Palestine n’est pas remis en cause par ce vote, mais, à l’image du ministre des Affaires étrangères, Xavier Bettel (DP), les députés qui ont rejeté la motion ne jugent «pas opportun» de procéder à cet acte, qualifié de «symbolique».
«Si nous voulons vraiment avoir un impact, il faut donner encore un ou deux mois de plus à la dynamique qui s’est enclenchée. Le Portugal et la Belgique sont en train de réfléchir. Je peux aussi m’imaginer que la France lancera ce débat», argumente Xavier Bettel. Or si la Chambre adopte cette motion, on risque de briser cette dynamique.»
«La dynamique ne sera pas brisée»
Faux, rétorque Yves Cruchten : «Si le Luxembourg se rallie à cette initiative, nous allons créer, et non pas briser, la dynamique qui est évoquée, et elle sera encore renforcée.» Déi Lénk partage cet avis. David Wagner souligne «que depuis 2014, le bon moment pour une reconnaissance ne s’est jamais présenté. La position attentiste est le problème.» «Il n’est pas suffisant de toujours dire être favorable à la paix. Nous devons reconnaître le droit d’exister à la population palestinienne», renchérit François Bausch (déi gréng).
En présence du Premier ministre, Luc Frieden, le porte-parole du CSV juge, par contre, qu’une initiative isolée de quelques États membres de l’UE risque d’affaiblir encore la position de l’UE en matière de politique extérieure. «Il faut d’abord un cessez-le-feu», affirme Christophe Hansen. «Je pense qu’une reconnaissance par quatre pays, avec le soutien d’un petit pays comme le Luxembourg, n’aiderait pas beaucoup les Palestiniens. L’UE doit agir en bloc», ajoute Gusty Graas au nom du DP, qui a pourtant soutenu la motion de 2014.
«L’attaque terroriste du 7 octobre ne doit pas de manière indirecte mener à un succès politique», met en garde Fernand Kartheiser (ADR). «Il est difficile de procéder maintenant à cette reconnaissance en pleine guerre où l’on ne dispose, des deux côtés, pas d’interlocuteurs pour engager un débat démocratique pour rendre opérationnel un État palestinien», ajoute encore Sven Clement (Parti pirate).
Un appel unanime pour
un cessez-le-feu immédiat
La discorde sur la reconnaissance d’un État palestinien n’a pas empêché la Chambre de lancer, à l’unanimité, un appel pour «parvenir à un accord en vue d’un cessez-le-feu immédiat et de la libération immédiate de tous les otages détenus par le Hamas». Une longue discussion sur la formulation exacte de cette résolution a précédé le vote. Le même texte demande «instamment au gouvernement israélien de ne pas poursuivre l’offensive militaire à Rafah, terre d’accueil de centaines de milliers de réfugiés palestiniens».
Qu’est ce qu’il nous manque Asselborn