Première femme à remporter le César de la meilleure musique de film, la DJ française Irène Drésel poursuit sa carrière bourgeonnante avec un nouvel album de techno, Rose fluo, et bientôt une fleur à son nom.
Le titre du troisième album d’Irène Drésel est trompeur : dans la techno de Rose fluo, rien de pop ni d’acidulé. Dans les bacs depuis fin janvier, ce nouveau disque est un concentré d’efficacité qui pousse vers la piste de danse. «Le rose fluo, c’est ma couleur favorite. J’avais l’idée de ce nom d’album il y a deux ans. Rien à voir avec le film Barbie, mais tout le monde m’en parle…», sourit Irène Drésel, dont la troisième date du «Rose fluo Tour» passera par la Kulturfabrik, vendredi.
Un des morceaux s’appelle Rose et ça tombe bien, car Irène Drésel aura bientôt un rosier à son nom. «Cette création sera baptisée au printemps, au champagne versé avec un arrosoir, par un pépiniériste de la région Centre-Val de Loire», là où elle réside. Détail amusant, du champagne à l’arrosoir est depuis longtemps servi sur scène dans ses shows. «C’est fou, il y a des liens partout, tout le temps, j’adore», s’amuse encore la musicienne. De roses, il est aussi question dans le morceau Thérèse. «C’est en l’honneur de Sainte-Thérèse, qui avait dit : « À ma mort, faites tomber du ciel, s’il vous plaît, une pluie de roses »», déroule la compositrice.
De l’art à la musique
Un premier EP en 2017, Rita, renvoyait déjà à la sainte patronne des causes désespérées, souvent représentée répandant des roses. Les motifs floraux – qui ornent jusqu’à sa doudoune favorite – et les figures béatifiées reviennent donc en fil rouge. Les secondes renvoient aussi à son parcours scolaire, du collège jusqu’en seconde, dans l’enseignement catholique. «C’était une éducation très stricte, en blouse, mais les filles de cette époque avec qui je suis restée en contact ont eu comme moi un parcours atypique, avec des personnalités fortes», rebondit-elle.
Avec un oncle directeur de la programmation de Radio Classique et une sœur tombée dans le violon, Irène Drésel a logiquement fait ses premiers pas artistiques entre conservatoire, solfège et danse classique. Mais elle sort des rails en étudiant aux Beaux-Arts et à l’école des Gobelins à Paris. Suivra une première vie dans l’art contemporain qui finira par la lasser. La musique électronique la happe dès 2013. «L’art contemporain n’était pas assez spontané. Dans la musique, c’est immédiat, on danse ou pas, on part ou pas.» Même si, pour la prendre au mot, partir en tournée est parfois difficile pour cette sédentaire. «Le trajet me coûte un peu, mais, une fois que j’y suis, en concert ou festival, je suis contente.»
Première compositrice césarisée
Le César de la bande originale, obtenu en février 2023 pour le film À plein temps, avec Laure Calamy, s’il n’a pas «tout bouleversé», a tout de même rallongé la liste des dates. Le thriller d’Éric Gravel, mené tambour battant, avait auparavant remporté deux prix Orizzonti à la Mostra de Venise 2021, décernés au réalisateur et à son actrice. En préambule du concert d’Irène Drésel, le film sera projeté au Kinosch vendredi, à 18 h, suivi d’une discussion avec la musicienne, qui prolongera la soirée derrière les machines.
Ses sept premiers mois de 2024 sont déjà bien remplis, avec, comme autres rendez-vous incontournables, un passage par la salle parisienne mythique de l’Olympia en mai, déjà complet. Sans compter qu’elle est désormais invitée comme jurée dans des festivals cinématographiques.
En recevant son César, elle le dédie en direct à la télé «à toutes les femmes compositrices de musique à l’image», qui attendaient la consécration de l’une d’entre elles depuis 48 éditions. Ironie de l’histoire, elle fut même obligée de supplier – «Ne mettez pas la musique maintenant!» – que soit repoussé le jingle écourtant les remerciements au micro, afin d’évoquer ses consœurs oubliées. «Si je ne l’avais pas dit, ce serait passé à la trappe et, quand je l’ai dit, il y a eu une déferlante de réactions de compositrices, ravies» que la première compositrice vainqueure de la statuette ait pris la parole à ce sujet.
Vendredi, à 20 h 30.
Kulturfabrik – Esch-sur-Alzette.
Le film À plein temps
sera projeté à 18 h au Kinosch.
La musique, c’est immédiat, on danse ou pas, on part ou pas