Le président autrichien sortant, l’écologiste Alexander Van der Bellen, considéré comme un symbole de stabilité pour affronter l’inflation, la crise énergétique et la guerre en Ukraine, a été réélu ce dimanche selon de premières projections publiées à la clôture du scrutin.
Âgé de 78 ans et soutenu par un large spectre de la classe politique, Alexander Van der Bellen l’emporterait dès le premier tour avec 54,6% des voix, loin devant les six autres candidats, selon ces premières projections publiées peu après 17 h. Le résultat officiel ne devrait être connu que lundi.
« Ce serait bien d’y voir clair dès aujourd’hui, ce serait bien pour l’Autriche. Cela nous permettrait de nous concentrer pleinement (…) sur la multitude de crises auxquelles nous sommes confrontés en Europe », avait déclaré le chef de l’État et grand favori de cette présidentielle, après avoir voté à Vienne en fin de matinée.
Dans le pays alpin de 9 millions d’habitants, 6,4 millions d’électeurs – dont l’Austro-américain Arnold Schwarzenegger, soutien de poids du président – étaient appelés aux urnes.
Extrême droite affaiblie
« Je suis en faveur de la stabilité », a dit Monika Gregor, une retraitée de 73 ans, en qualifiant le président sortant d’homme « très intelligent ». Mais d’autres ont préféré donner leur voix aux candidats de la société civile.
Alexander Nittmann, développeur informatique de 35 ans, a choisi le chanteur punk Dominik Wlazny, même âge que lui et fondateur du « Parti de la bière ». « Je pense qu’un peu d’air frais en politique ne fait pas de mal », a-t-il expliqué, jugeant sa campagne sérieuse derrière l’humour.
Le parti d’extrême droite FPÖ, qui avait failli l’emporter contre Alexander Van der Bellen en 2016 et rêvait d’une revanche cette année, avait abordé le scrutin avec un candidat peu connu, Walter Rosenkranz, 60 ans, qui a obtenu 18,9 % des voix ce dimanche, selon les premières projections. Il n’était crédité que de 15 % des suffrages avant le vote, à contre-courant des récentes élections en Suède et en Italie.
Les affaires de corruption ont fait perdre du terrain à la célèbre extrême droite autrichienne. Il y a six ans, elle avait été la première en Europe à frôler la victoire à une élection présidentielle. Fondé par d’anciens nazis, le FPÖ s’était finalement incliné avec plus de 46 % des voix, épilogue d’un scrutin à rebondissements qui avait tenu en haleine Bruxelles et les partenaires occidentaux de l’Autriche.
Si le parti avait ensuite accédé au gouvernement en formant une coalition avec les conservateurs du jeune Sebastian Kurz, il a dû quitter le pouvoir en 2019 après un rocambolesque scandale et n’a jamais retrouvé depuis lors sa gloire passée.
Fils de réfugiés
Devant ces remous et la succession de chanceliers, Alexander Van der Bellen, dont la fonction est essentiellement protocolaire, a garanti la continuité de l’État. Il a ainsi pu se présenter comme « le seul à pouvoir éviter le chaos », selon le politologue Thomas Hofer.
Ce pro-européen passe aussi pour « intègre » selon Julia Partheymüller, de l’université de Vienne, ce qui est « très apprécié » par comparaison avec les « multiples crises auxquelles font face nombre de pays européens ». Il a mené une campagne sobre, prônant « clarté » et « compétence » en vue de « traverser les turbulences le plus sereinement possible ».
Son profil atypique, pourtant, ne lui garantissait en rien pareil destin politique. Austère, un peu raide même, agnostique marié deux fois en terre catholique, l’ancien patron des Verts et doyen de la faculté d’économie de Vienne a su faire oublier son fort ancrage à gauche pour rassembler.
Pince-sans-rire, gros fumeur à l’éternelle barbe de trois jours, il se fait maintenant volontiers photographier en loden – une veste alpine traditionnelle – au pied des glaciers pour convaincre de son patriotisme. Car rarissime écologiste à la tête d’une démocratie, il est en plus fils de réfugiés et a hérité d’un exotique patronyme batave: sa famille protestante a émigré des Pays-Bas vers la Russie au XVIIIe siècle.
Son père, un aristocrate, et sa mère estonienne ont rejoint Vienne durant la Seconde Guerre mondiale avant de déménager dans le Tyrol, fuyant l’arrivée de l’Armée rouge.
Les écologistes seront les fossoyeurs de l’Europe si les citoyens n’y mettent bon ordre.