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La loi du marché

Au risque de nous répéter, allons-y : cette 75e édition du festival international du Film de Cannes a marqué l’histoire de la coproduction cinématographique luxembourgeoise, avec des chiffres record pour des œuvres de très grande qualité. Mais l’un des symptômes de Cannes est de ne pas voir ce qui se passe en dehors du «Bunker». Il y a pourtant une anomalie évidente, sur la plage du Palais des festivals : l’absence totale du ministère de la Culture au pavillon luxembourgeois.
À Cannes, c’est la production audiovisuelle qui est mise à l’honneur; c’est elle, d’ailleurs, qui a raflé ces prix, largement mérités et dont elle peut être très fière. C’est elle qui dépend du ministère des Communications et des Médias.

Voilà justement le nœud du problème : on chante les louanges du Luxembourg comme terre de cinéma – notons que les productions qui emploient des travailleurs intermittents peuvent le faire grâce au ministère de la Culture –, pour, en fin de compte, ne pas les considérer comme des œuvres culturelles. «Cannes, c’est aussi un marché», avait dit Xavier Bettel. Il aurait dû dire : «Cannes, c’est surtout un marché.»

Peut-être vis-je encore naïvement dans l’idée que Communication et Culture doivent vivre main dans la main. Or, comme dans toute société du spectacle, c’est la Culture qui est au service de la Communication. Le rayonnement du Luxembourg à l’international ne doit-il pourtant pas commencer au Luxembourg? Si oui, il faut alors comprendre les motivations du ministère de la Culture de bloquer le budget du LuxFilmFest quand l’évènement, également vitrine de la (co)production nationale, prend de plus en plus d’ampleur et acquiert un prestige ayant déjà largement dépassé nos petites frontières.

À vrai dire, le ministère de la Culture était représenté, cette année, lors de la journée luxembourgeoise. Mais le geste manquait de vigueur. Il est certes nécessaire et important que Xavier Bettel défende et célèbre en personne la production nationale, dans un festival-machine qui demande 20 euros de taxe carbone par accréditation pour ensuite tirer d’interminables feux d’artifice et inviter la Patrouille de France. Il serait tout aussi important que Sam Tanson réponde aux besoins d’un diffuseur national réputé, qui n’a jamais trahi son éthique.