Accueil | A la Une | Feu de l’amour : du sursis pour celle qui voulait « faire peur » à son ex

Feu de l’amour : du sursis pour celle qui voulait « faire peur » à son ex


Enceinte, la prévenue n’avait pas accepté que le père de leur futur fils la quitte et s’installe avec une rivale, enceinte de lui elle-aussi… (illustration Isabella Finzi)

La prévenue qui avait mis le feu à la terrasse de l’appart où son ex s’était installé avec une rivale en 2012, a écopé mardi après-midi de 5 ans avec sursis.

« S’il n’y avait pas eu d’intervention rapide, le feu se serait propagé dans tout l’appartement. » La conclusion de l’expert en incendie était claire. Heureusement, la rivale alitée avait senti à temps le feu. Et que son copain (donc l’ex de la prévenue), arraché de son sommeil, avait eu le bon réflexe d’aller chercher vite un seau d’eau pour l’éteindre.

Sept ans après les faits, la jeune femme entendue comme témoin ne se souvenait pas de toutes les péripéties ayant précédé le drame du 28 janvier 2012, vers 10h, rue de la Libération à Schifflange. Mais des altercations avec celle qui avait mis le feu à la terrasse de son appartement, il y en a bien eu. Et la raison, elle ne l’a pas cachée : «J’étais enceinte en même temps qu’elle. Et le père était le même…»

Toujours est-il que la police avait rapidement intercepté la suspecte. Son ex avait en effet indiqué aux agents l’avoir reconnue par la fenêtre. Au poste de police, elle avait commencé par nier les faits, mais avait fini par passer aux aveux : au réveil, vers 8h30, elle s’était rendue à une station-service à Eich pour acheter de l’essence. Elle avait pris le bus, puis le train pour se rendre à Schifflange. Là, elle avait accédé à l’aide d’une échelle à la terrasse au 1er étage. Après avoir escaladé une balustrade, elle avait aspergé la porte-fenêtre donnant sur l’appartement et sorti le briquet. Un projet assez fou, sachant qu’elle était enceinte du sixième mois.

Mais, à l’époque, elle aurait été très en colère contre le père de leur futur fils. L’homme, originaire du Cap-Vert, avec qui elle était venue au Luxembourg en 2011 venait de lui déclarer lors d’un échange de SMS être avec une autre femme.

«En mettant le feu, vous vouliez provoquer quoi ?», l’avait interrogée la présidente de la 9e chambre criminelle :

– «Je voulais lui faire peur.
– Vous pensiez qu’il allait revenir après tout cela ?
– Je n’ai pensé à rien. À l’époque, je n’étais pas bien.»

«Jalousie entre filles»

La prévenue, âgée aujourd’hui de 44 ans, avait exprimé ses regrets à la barre. Son avocat avait parlé d’un «dossier sensible», «une histoire de jalousie entre filles». Car visiblement, elles étaient deux autres femmes à tomber enceintes du même homme en même temps… Totalement désespérée, sa cliente aurait tout essayé pour reconquérir son ex. «Le geste de Madame ne se justifie pas. Mais juste une porte a été détruite», avait soulevé l’avocat notant qu’elle avait seulement utilisé 0,2 l d’essence, alors qu’elle en avait acheté 1,5 l.

Si le parquet avait requis sept ans de prison assortis d’un large sursis contre la quadragénaire, la chambre criminelle est restée en dessous de ces réquisitions. Mardi après-midi, elle l’a finalement condamnée à cinq ans de prison assortis du sursis intégral. Une peine qui rejoint les plaidoiries de la défense.

Au moment de la détermination de la peine, les juges ont dit qu’il y a eu dépassement du délai raisonnable. Ils ont également reconnu des circonstances atténuantes à la prévenue. Enfin, ils ont tenu compte de la circonstance qu’au moment des faits elle était atteinte «de troubles mentaux ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes» en faisant application de l’article 71-1 du code pénal. L’expert psychiatre entendu lors du procès avait conclu qu’au moment des faits la prévenue était dans un état second. Il avait parlé d’un acte passionnel.

La quadragénaire se trouve depuis fin avril 2012 sous contrôle judiciaire. Après son arrestation, elle avait passé près de trois mois en détention préventive à Schrassig où elle a également donné naissance à son fils.

Toutes les parties ont 40 jours pour interjeter appel contre le jugement rendu.

Fabienne Armborst