La Première ministre britannique Theresa May poursuit jeudi ses tractations pour dégager un consensus sur le Brexit, mais l’opposition dénonce un dialogue de façade.
La dirigeante conservatrice a commencé à recevoir les dirigeants de l’opposition mercredi soir, aussitôt après avoir survécu à la motion de censure déposée par les travaillistes. Mais ils l’ont prévenue qu’elle devra clairement écarter l’éventualité d’une sortie sans accord de l’Union européenne, si elle veut vraiment entamer le dialogue.
Le leader des travaillistes, Jeremy Corbyn, a catégoriquement exclu de la rencontrer tant que ce n’est pas le cas. « Mme la Première ministre, renoncez-y et discutez sérieusement de la manière d’envisager l’avenir », a-t-il exigé jeudi, réclamant qu’elle renonce à ses « lignes rouges ». Parmi ces « lignes rouges » de Theresa May figure la volonté de sortir de l’union douanière européenne alors que le Labour veut y rester. Elle souhaite aussi mettre fin à la liberté de circulation des citoyens européens.
Caroline Lucas, l’unique députée des Verts, a estimé que « ces discussions arrivent trop tard ». « Il n’y a aucun signe que la Première ministre veuille trouver un compromis », a-t-elle fustigé sur Twitter, après leur rencontre dans la matinée. Après le rejet massif mardi par les députés de l’accord de Brexit qu’elle a négocié avec Bruxelles, la cheffe du gouvernement doit présenter son « plan B » lundi. Mais les députés ne voteront sur ces propositions que mardi 29 janvier, à deux mois tout juste de la date prévue du Brexit.
Tandis que les dirigeants de l’UE ont appelé Londres à clarifier sa position, l’hypothèse d’un report du Brexit semble « inévitable », a estimé jeudi l’ancien Premier ministre travailliste Tony Blair. Après deux ans et demi passés à tenter de rassembler, sans succès, son propre parti autour d’un projet de Brexit commun, Theresa May tente d’amadouer les députés au-delà de sa formation qui lui ont maintes fois reproché son manque de dialogue. « Ce ne sera pas une tâche facile mais les députés savent qu’ils ont le devoir d’agir dans l’intérêt national, d’arriver à un consensus », a-t-elle déclaré devant le 10 Downing Street mercredi soir, peu après avoir rencontré les chefs des libéraux démocrates, des nationalistes écossais du SNP et du parti nationaliste gallois Plaid Cymru.
Fragile sursis
Jeudi, elle doit s’entretenir avec des eurosceptiques de son Parti conservateur et le petit parti unioniste nord-irlandais DUP, un allié intransigeant dont les dix députés lui ont permis de survivre à la motion de censure travailliste, ne l’emportant qu’avec une très faible marge de 325 voix contre 306. Le gouvernement est toujours divisé sur les compromis envisageables. Selon le Times, la ministre des relations avec le Parlement Andrea Leadsom et d’autres eurosceptiques veulent toujours que soit limité dans le temps le « filet de sécurité », solution de dernier recours pour éviter le retour d’une frontière terrestre entre l’Irlande et l’Irlande du Nord, très décriée par les Brexiters. Ils veulent aussi que soit incluse dans le plan B la promesse de négocier un accord de libre échange sur le modèle canadien.
De son côté, l’europhile ministre des Finances Philip Hammond a assuré que le scénario d’une sortie sans accord de l’UE, qui inquiète les milieux économiques, serait abandonné, lors d’une conversation téléphonique avec des chefs d’entreprise mardi, rapportée in extenso par le quotidien Telegraph. Le gouvernement aborde les discussions transpartisanes avec un esprit « très ouvert » mais reste déterminé dans son objectif de pouvoir mener une politique commerciale indépendante après le Brexit, a lui affirmé le président du Parti conservateur, Brandon Lewis, excluant de rester dans l’actuelle union douanière.
Plus de 170 figures du monde économique réclament eux une nouvelle consultation des Britanniques sur le Brexit, « seul moyen » d’éviter une sortie de l’UE sans accord. Theresa May l’a exclu jusqu’ici, estimant que les Britanniques s’étaient déjà exprimé.
LQ/AFP