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Retour au discours de la terreur

Des missiles de croisière à «portée illimitée» ou hypersoniques, des minisubmersibles à propulsion nucléaire et une arme laser «dont il est trop tôt pour évoquer les détails» : jeudi, lors de son adresse annuelle au Parlement, Vladimir Poutine a détaillé l’arsenal «invincible» dont se dote la Russie pour faire face, selon lui, aux nouvelles menaces posées par les États-Unis.

Sous la pression d’une opinion publique à qui il veut donner des gages quant aux soupçons d’ingérence russe dans la campagne présidentielle, Donald Trump augmente le budget militaire, rajeunit l’arsenal nucléaire et promeut une doctrine dans laquelle le recours à ces armes est une option de plus en plus plausible. Pour la Maison-Blanche et le Pentagone, il s’agit officiellement de faire face au danger de la modernisation des panoplies russe et chinoise.

Dès jeudi, Washington a accusé Moscou de violer ses engagements sur le contrôle des armes nucléaires, entraînant l’annulation d’une réunion prévue mardi et mercredi pour aplanir les âpres relations russo-américaines. Le chapitre de la détente amorcée dans les années 70 entre superpuissances et la volonté affichée depuis la fin de la guerre froide de bannir un conflit nucléaire est bel et bien tourné. L’heure est au réarmement et aux postures viriles telles qu’elles avaient presque disparu de la scène internationale. Il n’y avait plus guère ces dernières années que le dictateur nord-coréen Kim Jong-un pour jouer les fiers-à-bras, glorifiant à l’adresse du monde et de foules en liesse des essais de missiles nucléaires et balistiques.

Tant au sens propre que figuré, le maître du Kremlin excelle dans l’art de montrer ses muscles. Et pour sûr, Trump se livrera dans son style inimitable à une surenchère en étalant ses propres armes de destruction massive. Même le pacifique Grand-Duché se prend au jeu lorsque son Premier ministre va applaudir à tout rompre le lancement depuis cap Canaveral d’un satellite gouvernemental à usage militaire. Il ne s’agit bien sûr pas de se voiler la face en niant la multiplication des points de tension internationaux. Mais il faut à tout prix refuser le retour à cette norme culturelle de la terreur, dans laquelle des camps antagonistes célèbrent leur capacité de destruction mutuelle.

Fabien Grasser

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