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Metz : mon travail d’infirmière payé des clous


Sandra et Anne étaient hier dans les rangs des professionnels de santé qui dénonçaient la détérioration de leurs conditions de travail. (photo RL / Marc Wirtz)

Près de 200 professionnels de santé se sont rassemblés mercredi devant l’Agence régionale de santé (ARS), à Metz. Parmi eux, Sandra et Anne, infirmières libérales, parlent des conditions de travail d’une profession en souffrance. Récit.

À l’appel de l’intersyndicale Sud-FO-CGT, près de 200 professionnels de santé se sont retrouvés mercredi devant les locaux de l’ARS dans le cadre d’un mouvement national en France.

Dans les rangs, on comptait des infirmières et infirmiers, libéraux et hospitaliers, des éducateurs, des cadres de santé… Et Sandra et Anne, deux infirmières libérales qui nous ont conté leur quotidien et leur ras-le-bol d’une profession malade, faute de moyens et de soutien. Comme leurs collègues, elles voient chaque année leurs conditions de travail se dégrader. En cause : toujours plus de rentabilité.

En sortant de l’école d’infirmières, Sandra et Anne sont passées, pendant plusieurs années, par le milieu hospitalier à Bon-Secours. Avec « des étoiles plein les yeux », elles ont mis en pratique ce qu’elles considèrent comme « une vocation ». Mais, en onze et sept années de carrière hospitalière, elles ont vu « l’évolution du métier avec de moins en moins de personnels pour soigner, de plus en plus de patients et de tâches administratives », résume Anne.

« Les soins sont réalisés , précise Sandra, mais une infirmière n’a plus le temps de prendre la main d’une personne qui a mal, d’accompagner les familles, d’être à l’écoute des patients. On a le temps d’appliquer la technique mais en douze heures de service, une infirmière n’a pas le temps de manger, de boire, d’aller aux toilettes parce qu’elle a choisi de passer cinq minutes avec une famille. »

Malgré une carrière qu’elles avaient imaginée à l’hôpital, elles ont choisi, fatiguées, le secteur libéral. Il y a quatre ans pour Sandra, et cinq ans pour Anne. Pour des conditions de travail finalement « parfois pires et une reconnaissance de la profession » inexistante. « On paie des charges hallucinantes puisqu’on nous retire environ 50 % de notre rémunération », résume Anne. « Le grand public ne le sait pas mais le premier acte à domicile est rémunéré à 100 %, le deuxième à 50 % et à partir du troisième acte, on travaille gratuitement, et ce, pour des journées de 6 h à 21 h », détaille Sandra.

Illustration : « Je vais chez un usager pour un pansement, une prise de sang et une injection. Le pansement sera facturé 6,30 €, la prise de sang, qui coûte 4,72 €, sera rémunérée 2,36 € et l’injection sera gratuite. On va dire que je passe 30 minutes chez ce patient pour 9 € dont on m’enlève 50 % pour les charges. Je gagne donc 4,50 € et le déplacement est remboursé par un forfait de 2,50 € quel que soit le nombre de kilomètres parcourus. »

Anne appuie l’exemple : « On travaille les week-ends, parfois la nuit et on doit s’acheter le matériel périphérique comme le coton, les seringues, les antiseptiques, les pansements… On travaille jusqu’à 21 h et on attaque l’administratif une fois à la maison. » Une exaspération accentuée par les contrôles, de plus en plus fréquents, de la Sécurité sociale, les obligations comme celle, par exemple, d’être rattaché à un cabinet d’infirmières.

De la mobilisation de mercredi, Anne et Sandra attendaient « d’être ensemble avec toute la profession même si on se tire parfois dans les pattes dans le libéral ». Elles veulent juste travailler, bien travailler parce que « malgré tout, on l’aime notre métier, on ne se verrait pas faire autre chose »

Cécile Perrot (Le Républicain lorrain)