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Boxe à Differdange : Charles François, « Thai Patron »


Samedi soir à Differdange, Charles François ne mettra pas de gants...

Charles François, quadruple champion du monde de muay thaï, fera figure d’attraction samedi soir à Differdange lors de la 3e édition de «The Way of the Champions». Portrait.

C’est bien connu, avec des «si», on pourrait mettre Paris –  ou le Grand-Duché  – en bouteille. Alors, pourquoi pas un quadruple champion du monde de muay thaï dans les buts du FC Metz? Il y a 16  ans, Charles François se présente aux tests de sélection pour intégrer son centre de formation. Passé par Plantières et Bellecroix l’apprenti gardien assure franchir « les premières étapes avec succès ». Mais les portes du centre ne s’ouvriront jamais. Recalé? « Non, c’est à ce moment-là que j’ai décidé d’arrêter. Le foot, j’y jouais surtout par plaisir, mais beaucoup étaient uniquement guidés par l’argent et la célébrité. Ce n’était pas mon truc… »

De ses mains, cet adolescent timide et réservé (« je n’ai pas changé ») en fera finalement des armes. Samedi soir à Differdange lors de la 3 e édition de The Way of the Champions, elles seront bandées et recouvertes de lanières de chanvre. En pure mode Kard Chuek. « Une première car jamais jusque-là un titre de champion du monde ne s’était disputé dans cette forme hors de Thaïlande », explique Jean-Luc Lefeber, directeur sportif au Boxing Club Ro’de Le’w Differdange et organisateur d’une soirée au plateau particulièrement relevé puisque huit des dix-sept combats pros compteront pour un titre planétaire.

En cas de victoire contre le Danois Rhassan Muhareb, Charles François pourrait descendre du ring avec une ceinture sur chaque épaule. Prévu en clôture de soirée, son combat compte pour les titres unifiés WTKA et AFSO en -70  kg. Un contexte reflétant les réalités d’une discipline –  même si elle n’est pas la seule dans ce cas  – manquant quelque peu de lisibilité. Et pas seulement pour les non-initiés.

« Même moi, il m’arrive de découvrir des fédérations », confie «Karlito» avant de glisser dans un grand sourire  : « De toute façon, à deux ou trois personnes de soi, on connaît tous un champion du monde de muay thaï… » À ses yeux, les fédérations « les plus légitimes sont la WMC, la WPMF et la S1 », toutes domiciliées en Thaïlande, la deuxième étant même présidée par un colonel de l’armée nationale. Une sorte de fil conducteur avec les champs de bataille du temps jadis.

De cette histoire, Charles François en est friand et connaît évidemment la légende de Naï Khanom Tom, ce prisonnier thaïlandais qui, en 1774, terrassa dix champions birmans sous l’œil du roi Mangra qui lui rendit sa liberté. Le sextuple champion de France fait figure de puriste alors, forcément, combattre une nouvelle fois en Kard Chuek constitue une forme de retour aux sources.

Le 22  août 2015, dans ces mêmes conditions, il s’était incliné dès le 2 e  round sur une fourchette de Saenchai (« c’est interdit, mais comme c’est LA star absolue en Thaïlande… »). Pas de quoi freiner les ardeurs de cet adepte du muay chaiya (style plutôt défensif privilégiant les techniques de coude et de genou). « C’est sûr, le visage est beaucoup plus marqué, mais le fait de saisir avec la main ouverte change forcément le combat. Les techniques de coude diffèrent également », explique-t-il tout en regrettant qu’en Europe, la discipline ait perdu de sa substantifique moelle, trop souvent comparée ou assimilée à défaut au kickboxing.

Cette passion l’habite depuis ses 8  ans et les premiers combats vus à la télévision. Six ans plus tard, au détour d’une balade dans son quartier, il aperçoit des gens s’affairer sur un chantier. « Je leur ai demandé ce qu’ils faisaient et ils m’ont répondu  : une salle de boxe thaï. Alors, j’ai pris un rouleau de peinture… » Charles François vient de mettre les pieds au Cobra  Thaï. Lieu qu’il fréquenta assidûment au grand dam de Sylvaine. « Ma mère avait peur, mais comme elle voyait que j’étais passionné et toujours sérieux, elle ne m’interdisait pas d’y aller… »

«Ça fait quinze ans que je boxe. Quinze ans que je suis mon propre cobaye alors, pourquoi ce qui a marché pour moi ne fonctionnerait pas pour les autres?»

Timide, Charles François évoque « une enfance classique et heureuse » au sein d’une famille où il grandit sous le regard protecteur de ses grandes sœurs Laetitia (44  ans) et Rachel (45). « J’ai grandi avec trois mamans… » Le muay thaï constituera « un moyen d’expression ». D’affirmation chez celui qui, jure-t-il, est resté le même. « Calme et posé » donc, il reçoit lundi matin aux Arènes de Metz où, à l’étage, il dispose d’un petit bureau avec une salle (à peine plus grande) d’entraînement attenante. C’est là qu’il peaufine ses derniers réglages aux côtés de Jim Brazzale, de passage régulièrement au Luxembourg, en lice samedi soir pour un titre de champion d’Europe. C’est là également qu’il reçoit pour des cours individualisés de remise en forme.

Des séances à sa sauce. Aigre-douce évidemment concoctée sur sa propre expérience. « Ça fait 15  ans que je boxe. Quinze ans que je suis mon propre cobaye alors, pourquoi ce qui a marché pour moi ne fonctionnerait pas pour les autres? » Longiligne, il a néanmoins gagné en épaisseur. Depuis trois ans, une barbe fournie (et soignée) délimite les contours de son visage. La marque de sa conversion à l’Islam. Une démarche initiée « au contact d’amis et de recherches ». Cette pilosité constituera, samedi, un faible rempart aux cordes de chanvre.

Pour l’occasion, il «sautera» le jeûne du ramadan, et s’appuiera, comme il le fait depuis deux ans et la fin de sa collaboration avec Stéphane Leichtmann, son entraîneur, sur la présence de Maud, son épouse, dans son coin. « Sa présence interpelle et, même si ce n’est pas une ancienne boxeuse, c’est mon troisième œil. Et puis, je préfère travailler avec des gens de ma famille, des proches que je forme à mes méthodes et qui me connaissent bien. »

À 30  ans, et sept ans après le premier de ses quatre titres planétaires décroché le 5  décembre 2010 lors de l’anniversaire du roi de Thaïlande (« devant 100  000 spectateurs »), Charles François se voit encore boxer « quatre à cinq ans » avant de tirer un trait sur une carrière riche d’expériences inoubliables. Comme cette ceinture de champion du monde ISKA décrochée le 12  août 2013 à l’occasion de l’anniversaire de la reine, là encore dans les jardins du palais, sous une pluie diluvienne. « Un vrai temps de mousson… »

L’après-carrière, Charles François l’envisage à gérer la carrière des sportifs de sa structure qu’il souhaite développer davantage, mais pas seulement. « Tous les sports m’intéressent… » L’occasion, sait-on jamais, de renouer un jour peut-être avec sa première passion, le football. D’ici-là, il se murmure que Noé (6  ans), son fils, pourrait bientôt enfiler le maillot grenat. Pour s’amuser, évidemment…

Charles Michel

Charles François en bref

Né le 4 octobre 1986 à Metz

Marié à Maud, père de Noé (6  ans)

132 combats (113 victoires dont 50 par K.-O., 19 défaites)

4 titres de champion de muay thaï : WMC (63  kg), ISKA (65  kg), WPMF (67  kg) et S1 (70  kg)

1 titre de champion du monde de K1 : ISKA (65  kg)

6 titres de champion de France de muay thaï

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