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Société – Cannabis : le débat continue


Selon les experts, il faut dédiaboliser la consommation de cannabis et inventer des politiques responsables.

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Les participants à la table ronde organisée par le Cannabis Bündnis Lëtzebuerg étaient d’accord pour dire que la répression n’a pas réussi à endiguer la consommation. (Photos : AFP/Isabella Finzi)

Si le cannabis est l’objet depuis toujours d’un usage récréatif, ce sont ses vertus médicales qui font parler d’elles depuis quelques années.

En effet, dans certains cas comme l’épilepsie, le THC, son principe actif, peut avoir un effet «miracle», reconnaît Nico Wagener, entrepreneur à CWC-Wagener et président de l’Association luxembourgeoise des méthodes préventives (ALMP).

En revanche, il déconseille clairement la consommation de cannabis à des fins récréatives pour les jeunes de moins de 20 ans, leur cerveau n’étant pas entièrement développé.

Ce sont ces risques qui, pour une grande part, continuent d’avoir raison du débat autour de la légalisation et de la décriminalisation du cannabis.

Toutefois, le groupement Cannabis Bündnis Lëtzebuergest résolu à faire changer les idées en la matière. Parmi les invités de la table ronde organisée hier soir à l’Exit 07, Nico Wagener, que l’on vient de mentionner, René Meneghetti, du Service Impuls, une organisation qui vient en aide aux toxicomanes, de Jean-Paul Nilles, directeur du Centre de prévention des toxicomanies (CePT), et Jean-Nico Pierre, de Jugend- an Drogenhëllef (Service d’aide aux jeunes usagers de drogue).

Cette première discussion entre experts a été suivie par une table ronde entre politiques. Parmi eux, les députés Cécile Hemmen (LSAP), présidente de la commission de la Santé, Max Hahn (DP), Martine Hansen (CSV) et Josée Lorsché (déi gréng), ainsi que David Wagner (déi Lénk) et Guy Bouchard (ADR).

« L’important pour nous, ce n’est pas le cannabis, a d’emblée souligné Jean-Paul Nilles, c’est l’homme. » La question fondamentale, selon le directeur du CePT, étant de savoir pourquoi on choisit de consommer du cannabis. De la même manière qu’il faudrait se demander pourquoi on boit de l’alcool. Car si cela arrive tous les jours, c’est non seulement anormal, mais c’est aussi le signe d’un désir de fuire.

Selon René Meneghetti, qui travaille avec des jeunes entre 12 et 21 ans, la consommation excessive de cannabis concerne en premier lieu les jeunes garçons.

> La répression ne réduit pas la consommation

Les problèmes commencent tôt, « à moins neuf mois » comme l’indique Jean-Nico Pierre, pour qui endiguer le fléau de la consommation de cannabis est particulièrement important chez les jeunes parents, qui doivent apprendre à s’occuper de leur enfant. Cela aussi ferait partie du domaine de la prévention.

Le service d’aide aux jeunes toxicomanes s’occupe de 70 à 80 personnes par an. Le nombre des toxicomanes ayant clairement augmenté au Luxembourg, selon un rapport officiel.

À cela s’ajoute que le cannabis que fumaient encore les « hippies » dans les années 60 doit être qualifié de drogue relativement douce (avec 8 % de THC), contrairement à ce qui se vendrait aujourd’hui. Nico Wagener constate une véritable course pour créer, grâce à des croisements entre plantes, un cannabis toujours plus puissant.

Dès lors, que faire ? La répression, là-dessus tous les experts étaient d’accord, n’a pas réussi à réduire la consommation, la France en donnerait le meilleur exemple.

Notre société n’est pas prête à légaliser le cannabis, estime René Meneghetti, sa légalisation équivaudrait à la construction d' »un puits sans couvercle ».

Néanmoins, comme le résumait Nico Wagener : « Si nous sommes ici, c’est parce qu’il faut une solution politique. » Il faudrait donc d’abord que disparaisse « la peur » face au cannabis, afin que la politique apprenne à y faire face de manière « responsable ».

« Hélas ! », estimait Jean-Nico Pierre, il n’est pas évident pour un politicien d’aborder le sujet, sa réputation étant en jeu. Alors justement, quel est le point de vue des politiciens ?

Max Hahn (DP) estime, comme son parti, que la légalisation n’est pas une priorité et qu’il vaut mieux attendre. C’est aussi l’avis de Cécile Hemmen, qui pense qu’il faut donner la priorité à la prévention, même si différencier entre l’usage récréatif et médical s’impose. Guy Bouchard, pharmacien ADR, connaît les multiples cas où le cannabis aide à supporter la douleur. Voilà pourquoi son parti ne s’oppose pas à un usage médical de la drogue. Pour Josée Lorché, il est important de ne pas stigmatiser les jeunes qui consomment du cannabis, car ce ne sont pas des criminels, mais des jeunes dont il convient de s’occuper.

Martine Hansen, directrice de lycée, met en garde contre une répression insuffisante, qui enlèverait la peur de consommer et créerait « davantage de problèmes ».

David Wagner, de déi Lénk, aimerait élargir le débat à toutes les drogues au lieu de se cantonner au cannabis. Et de citer l’exemple du Portugal, qui a supprimé les amendes pour la possession de petites quantités de drogues quelles qu’elles soient.

De notre journaliste Frédéric Braun

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