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Verres surfacturés : l’opticien n’avait « aucune intention de tromper le client »


La raison pour laquelle ils montaient des verres de stock en facturant des verres de marque de haute qualité, dit-il, c'est qu'ils offraient une garantie de trois ans ainsi qu'une assurance au client. (illustration François Aussems)

Selon le parquet, près de 2 000 clients auraient été floués entre 2004 et 2010. Alors qu’ils se rendaient chez l’opticien, on leur avait monté des verres de stock en leur facturant toutefois des verres de la marque Zeiss, de haute qualité. Lundi matin, le tribunal correctionnel a entendu le dernier des trois prévenus poursuivis pour avoir promu cette stratégie de vente litigieuse.

« Si mes souvenirs sont bons, les clients ont toujours été satisfaits avec les verres de stock. Avec ce type de verres, on a toujours eu le moins de réclamations. » Cela aurait été une pratique courante à l’époque, a expliqué le principal prévenu, Andreas H. (47 ans), lundi matin à la barre. Une pratique qu’il aurait employée dès la fin des années 1990 et qui aurait permis de délivrer dans un délai relativement bref, 48h, la commande aux clients.

Ce n’est pas la pratique de la vente de verres de stock que le parquet reproche au quadragénaire ainsi qu’à deux de ses partenaires, qui comparaissent depuis mi-janvier devant la 16e chambre correctionnelle. Le président n’a d’ailleurs pas manqué de lui rappeler : «Il n’est pas question de tromperie, si l’on dit à un client que l’on va lui monter des verres de stock et que sa dioptrie le permet. Mais vous, vous livriez au client un autre produit que celui que vous lui facturiez !»

«C’était une erreur. Je le reconnais. Mais il n’y avait aucune intention de tromper le client», s’est défendu l’opticien. La raison pour laquelle ils montaient des verres de stock en facturant des verres de marque de haute qualité, dit-il, c’est qu’ils offraient une garantie de trois ans ainsi qu’une assurance au client. «Si le client perdait ses lunettes, on les lui remplaçait. Surtout après les périodes de vacances, ce service était très apprécié.»

«Il est difficile de saisir pourquoi, sur la facture, vous ne précisiez pas le type de verres montés ainsi que le service garantie, au lieu d’y inscrire les verres de marque Zeiss», a objecté le président. «Comment expliquez-vous qu’autant de témoins dans le dossier disent qu’ils n’étaient pas d’accord avec cette pratique ?», voulait encore savoir le tribunal du quadragénaire.

L’affaire avait éclaté fin 2009, lorsqu’une associée avait porté plainte. Elle se sentait dupée après avoir investi 50 000 euros dans la société, à Wasserbillig. Au cours de son audition à la police, elle avait également fait part des irrégularités menées lors des commandes des verres correcteurs pour les clients. Une pratique visiblement connue et acceptée dans huit autres magasins du pays sous la houlette du trio, si l’on suit les déclarations des différents collaborateurs entendus au cours de l’enquête.

La défense réclame une suspension du prononcé

Le prévenu dit n’avoir pas ressenti que ses collaborateurs aient été sous pression à cause de cette stratégie de vente. «Il y avait une délégation du personnel. Mais personne ne s’y est jamais plaint», a-t-il ajouté.

Dans leurs plaidoiries, les avocats se sont dits surpris que seuls les chefs et non les gérants des magasins se retrouvent sur le banc des prévenus. La défense d’Andreas H. a demandé une suspension du prononcé. Une telle décision permettrait de retenir qu’il y a bien eu une erreur sans qu’une peine soit prononcée. Me Gennaro Pietropaolo estime qu’avec cette pratique, il n’y a pas eu d’enrichissement important. «Avec les 2 500 clients tels que libellés par le parquet et 70euros de gain à chaque fois, on arrive à 175 000 euros pour la période de 2004 à 2012. Comparé aux 8 millions reçus par la CNS, cela fait 2% du chiffre d’affaires», avait-il calculé.

L’avocat retient aussi que dans ce dossier, aucun client ne s’est constitué partie civile. Enfin, il conteste les infractions libellées. Seule la tromperie pourrait être retenue. Il n’y aurait pas non plus eu d’escroquerie face à la CNS, conclut-il. Car cette dernière rembourserait en fonction de l’acuité visuelle et non des verres.

L’avocat des prévenus Jürgen M. (48 ans) et Volker M. (46 ans) a plaidé l’acquittement. Seulement entre 2007 et 2009, ils auraient fait partie de l’équipe d’Andreas H. Et pour cette période, l’instruction n’aurait pas permis d’apporter des indices qui permettent de prouver qu’ils ont fourni leur aide ou soutenu cette pratique. Comme ils auraient fait partie de la direction, ils ne se seraient pas non plus occupés des ventes.

Rendez-vous ce mardi après-midi pour le réquisitoire du parquet.

Fabienne Armborst

Un commentaire

  1. 9 ans pour avoir un procès… terrible lenteur de la justice

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