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Home-jackings au Luxembourg : «Je ne suis pas un voleur et je le contesterai jusqu’à la fin»


Depuis la semaine passée, la chambre criminelle se penche sur une série de home-jackings et cambriolages perpétrés en 2017. Lundi, le second prévenu a été entendu. (Photo : archives lq/Didier Sylvestre)

Son ADN a été retrouvé sur une victime du home-jacking à Belair en 2017. Mais d’après Yassine E., c’est impossible. Tout comme les autres faits que le parquet lui reproche. Il se défend.

«J’étais chez moi avec ma femme et mon enfant. La police est venue, a enfoncé ma porte pour me reprocher des faits. Je me suis retrouvé à Schrassig en psychiatrie…» Depuis 34 mois, Yassine E. (36 ans) se trouve en prison. À tort, estime-t-il. Et pour quelque chose de «carrément imaginé», avait-il fait comprendre dès l’ouverture du procès. «Je ne suis pas un voleur et je le contesterai jusqu’à la fin», a-t-il insisté lundi matin, au 5e jour, lors de son audition par la 13e chambre criminelle.

Avec Bilal H. (35 ans), il est poursuivi pour avoir participé à une série de home-jackings et de cambriolages au Grand-Duché en 2017 : Luxembourg-Belair, Strassen, Bettange-sur-Mess… La liste est longue et la valeur des bijoux dérobés s’élève à plusieurs centaines de milliers d’euros. Mais le duo arrêté mi-mars 2018 à Paris conteste haut et fort.

Si le prévenu Bilal H. a expliqué, dès vendredi, sa présence régulière au Luxembourg pour acheter des cartouches de cigarettes «afin d’arrondir ses fins de mois», Yassine E., lui, indique être venu pour «chercher de la marchandise». Son métier : commerçant ambulant. «Je fais trois à quatre marchés à Paris par semaine.» Et si cela n’apparaît pas sur les observations policières, «c’est qu’ils ne m’ont pas suivi tout le temps».

Parfums, maquillage et Albanais à Esch

«Et vous achetiez quoi?, s’intéresse la présidente.
– Des parfums et du maquillage.
– Et cela n’existe pas à Paris?
– J’achetais moins cher ici, je me déplaçais à Esch chez des Albanais…»

L’adresse, la chambre criminelle ne l’obtiendra pas. Malgré l’insistance de la présidente. À part qu’il s’agissait de bars à chicha. Et Yassine E. de dire : «Mais je saurais vous y emmener.»

«Et pourquoi l’enquête a-t-elle montré que vos portables bornent uniquement jusqu’à Thionville et puis sont inactifs? Bizarrement, c’est quand il y a les cambriolages et home-jackings au Luxembourg», enchaînera la présidente. L’excuse que c’était pour éviter de se mettre hors forfait en passant la frontière et d’avoir des factures de téléphone exorbitantes, la représentante du parquet non plus n’y croit pas trop : «La législation européenne a mis fin aux frais de roaming le 15 juin 2017.» «Ça, c’est une bonne nouvelle. Je n’étais pas au courant», finira par dire le prévenu. Ce qu’il sait toutefois, c’est qu’il n’est pas l’un des deux hommes captés par la caméra en train de circuler sur la terrasse à Strassen. Pour Yassine E., il n’y a pas matière à discussion : «On voit que ce n’est pas moi!»

Pour le fait du 25 novembre 2017, en plus des données téléphoniques, les enquêteurs ont récolté les images des caméras de vidéosurveillance du centre commercial City Concorde à Bertrange. On y voit Bilal H. et Yassine E. pénétrer derrière le couple d’octogénaires dans le parking. Là aussi, Yassine E. déclare être venu faire des emplettes et non prendre en filature les époux… qui quelques heures plus tard seront victimes d’un home-jacking au retour, chez eux à Belair.

Selon Yassine E., c’est tout simplement «impossible» qu’on ait retrouvé sa trace sur le gilet de l’épouse «Ce n’est pas mon ADN!», s’exclamera-t-il. «Je n’ai jamais approché Madame, je n’oserais jamais faire cela.» «Cela nous laisse un peu sur notre faim si vous n’avez aucune explication sur la présence de votre ADN. L’experte a pourtant été assez affirmative», tentera de creuser la présidente. «Vous avez compris l’experte? Car moi, j’ai pas tout compris…», répondra le prévenu avant de laisser la parole à sa défense.

«Le gros ventre court toujours»

«Ce sont des théories, des indices, des suppositions, mais pas des preuves indiscutables», estime Me Nadia Moussif qui plaide l’acquittement pour cause de doute. Selon l’avocate de Paris, fort possible que le duo ait traîné à l’entrée du centre commercial, non pas pour guetter le couple, mais pour «repérer comment en ressortir» : «Le City Concorde est grand et on s’y perd facilement.» Elle constate également que les enquêteurs n’ont pas réussi à mettre la main sur l’auteur, qui d’après la victime d’un autre home-jacking, avait «un gros ventre» : «Personne ne l’a arrêté. Il court toujours dans la nature.»

Aussi la défense de Bilal H. plaide l’acquittement. Il n’y a pas de «preuve exclusive», a résumé Me Pim Knaff hier. Dans ce dossier, on aurait «tenté de créer une ambiance globale pour colorer le vide de preuves». Des similitudes entre les méfaits, il n’en voit pas. Pas sûr que le parquet partage la même position. Rendez-vous ce mardi matin pour le réquisitoire.

Fabienne Armborst

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