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Escroqueries : 18 mois de prison requis contre le policier beau parleur


Collègues de travail, amis de longue date, proches... Ils avaient été nombreux à passer de l'argent au policier, car ils lui faisaient confiance. (Photo : Fabienne Armborst)

Pour le parquet, le quinquagénaire poursuivi pour avoir escroqué des milliers d’euros à son entourage entre 2010 et 2014 n’a désormais plus sa place dans la police. Il requiert en outre une amende appropriée.

«Où a atterri tout cet argent?» Le président de la 12e chambre correctionnelle a reformulé à plusieurs reprises la question, mardi matin. Entre 2010 et 2014, le policier chef au CI Gare avait emprunté plusieurs milliers d’euros à des collègues de travail, amis de longue date et autres connaissances. De l’argent qu’ils n’ont, pour la plupart, jamais revu.

À l’ouverture de son procès, l’officier de police judiciaire, aujourd’hui suspendu, avait fait état d’un projet d’investissement immobilier en Géorgie. La pièce justificative, le tribunal l’attend toujours. Mardi au troisième jour d’audience, on aura également entendu qu’il voulait se lancer dans le commerce de vin. L’idée aurait été de produire du «vin juif» en Géorgie. La procédure aurait voulu qu’après le stockage un rabbin passe. Mais ce projet n’aurait pas abouti.

«Joueur pathologique»

«On a l’impression que vous avez dépensé tout cet argent et que le vin, le projet immobilier, les paris sportifs avec les collègues… ne sont que des histoires. N’est-ce pas votre addiction aux jeux qui explique pourquoi vous avez soutiré l’argent à vos collègues et enfants?», retentera une dernière fois le président. Les conclusions de l’expert à ce sujet sont plutôt claires. Le prévenu de 56 ans remplit plusieurs critères du «joueur pathologique» : «Il ment pour dissimuler l’ampleur réelle de ses enjeux. Il compte sur les autres pour obtenir de l’argent et sortir de la situation désespérée due au jeu…»

Mais du côté du prévenu aucune introspection ni reconnaissance dans ce sens. Il replonge dans ses tergiversations parlant de son divorce compliqué, ses difficultés financières et les premiers remboursements qu’il a déjà effectués. Soupir du parquet. Et le président d’ajouter : «Je pars du principe que parfois des gens vous ont donné de l’argent, car vous les avez tout simplement fatigués…»

«C’est un beau parleur»

Dans son réquisitoire, le substitut principal ne tournera pas longtemps autour du pot. Sans revenir sur chaque prêt que le policier a contracté, la parquetière dira : «C’est un beau parleur. Il a profité de sa fonction dans la société et de ses amitiés pour se procurer de l’argent. Tous les moyens ont été bons.» On parle de trafic d’influence, de corruption passive et d’escroquerie.

La parquetière soulèvera sa «situation financière désastreuse» à l’époque. Quand on égrène les différents prêts contractés auprès des instituts bancaires luxembourgeois, on arrive à la somme de 150 000 euros. Le chiffre des montants escroqués à son entourage, quant à lui, s’élève à 251 185 euros. Une partie de cet argent liquide, il l’avait déposée sur son CCP. N’obtenant pas de réponse satisfaisante quant à son origine, Post avait fini par le dénoncer à CSSF (Commission de surveillance du secteur financier). C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles l’affaire a éclaté au grand jour.

Plus de 81 000 euros de dommages réclamés

Selon l’analyse financière de ses comptes, le quinquagénaire avait viré près de 360 000 euros à des opérateurs de paris sportifs. «Il avait juste besoin de l’argent pour jouer ou rembourser ses dettes», résumera la parquetière.

Le quinquagénaire avait passé trois mois en détention préventive à l’automne 2014. À sa sortie, il n’a pas hésité à se lancer dans une nouvelle escroquerie. Pour le parquet, la conclusion : «Il ne remplit plus les conditions d’honorabilité pour être dans la police.» Avec son comportement, celui que la parquetière appelle aussi le «le shérif de la gare» aurait donné une mauvaise image de la police.

Elle réclamera au final 18 mois de prison, une amende appropriée en relation avec le préjudice causé et une interdiction de remplir pour la durée de 10 ans des fonctions et offices publics. Dans cette affaire, une dizaine de parties civiles se sont constituées. Plus de 32 000 euros avaient été réclamés dès la semaine dernière. Hier, six autres ont demandé un total 49000 euros. Jeudi matin, la parole sera à la défense.

Dans son expertise, le psychiatre avait relevé des «tendances d’addiction aux jeux» chez le prévenu. Des tendances qui n’auraient toutefois pas affecté sa faculté de perception. Le spécialiste avait émis un pronostic réservé. «Vu son absence de culpabilité, un traitement n’est pas envisageable», avait-il conclu.

Fabienne Armborst

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