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Ado violée dans une impasse à Esch : 8 ans de réclusion requis


Depuis son arrestation, le le jeune homme, identifié comme l'auteur, conteste les faits. Ce qui n'avait pas changé vendredi à la barre de la chambre criminelle. (Photo : archives lq)

Il a 23 ans et depuis le 24 octobre 2019, il dort à Schrassig. Arrêté pour agression sexuelle sur une mineure de 14 ans près de la rue du Fossé fin décembre 2017, le jeune homme était convoqué vendredi matin à la barre.

Sabrina* était une bonne élève. En témoignent ses bulletins scolaires de classe de 6e. Et durant ses loisirs, elle aimait faire du sport. Mais d’un jour à l’autre tout a basculé : son comportement, ses notes… Elle changera de lycée. Elle arrêtera aussi de fréquenter les garçons. Et elle se coupera les cheveux…

Il se passera plus d’un an et demi avant que la langue de l’adolescente ne se délie. C’était en juin 2019. Elle venait de changer à nouveau d’établissement scolaire. Cette fois-ci, elle choisit une école réservée aux filles. Or toujours ce «comportement perturbateur» en classe. Ce qui amènera la directrice adjointe à lui parler. Face à cette psychologue de formation, Sabrina se confiera finalement et parlera d’une agression sexuelle. Un homme l’aurait tirée dans un coin… Les détails, elle les livrera quelques semaines plus tard à la section protection de la jeunesse de la police judiciaire. Les parents ayant été avertis par le lycée, la mère avait entrepris les démarches.

C’était une fin d’après-midi fin décembre 2017 dans la rue du Fossé à Esch-sur-Alzette, près de son lycée de l’époque. Son agresseur l’aurait tirée sur 79 m dans un petit passage latéral. À l’abri des regards, il l’aurait poussée contre un mur et déshabillée. Elle aurait crié, frappé, mordu… mais dans cette impasse elle n’aurait pu échapper aux viols. Enfin, il l’aurait rhabillée pour qu’elle ne se sauve pas nue. Lors de son audition, Sabrina livrera non seulement un récit détaillé des lieux et faits, mais précisera aussi que son agresseur portait un «short bleu» et un «sac banane». Des détails qui auront leur importance. Tout comme la photo qu’elle avait réussi à prendre à l’été 2019 quand elle dit avoir revu son agresseur. C’est cette dernière qui mènera la police chez un jeune homme de 23 ans habitant la Métropole du fer à l’automne 2019. Sans travail ni occupation à l’époque, il se trouve donc depuis le 24 octobre 2019 en détention préventive à Schrassig. Il conteste les faits. Ce qui n’avait pas changé vendredi à la barre de la 13e chambre criminelle.

Le chien, l’ordinateur et la patinoire

Entre ses murmures entrecoupés de longs silences, difficile de percevoir toutes ses paroles. Ce sont plus les questions de la présidente qui retentiront jusqu’au fond de la salle : «Vous faisiez quoi tout au long de vos journées?» – «Le midi, je mange. Le matin, l’après-midi et le soir, je promène le chien en forêt et je suis sur l’ordinateur.» Il parlera aussi de quelques «sorties à la patinoire». Le reste de son parcours, la chambre criminelle le tirera du psychiatre qu’il avait en tout consulté cinq fois entre 2016 et 2019. L’homme, décrit comme solitaire, a passé une bonne partie de son adolescence en foyer. Il présente des traits psychotiques. Mais un véritable diagnostic n’a jamais pu être posé. Faute de consultations… Les démarches pour obtenir de l’aide auprès du Réseau Psy n’ont pas abouti, indique sa mère. Ce qui fait qu’il passait la plupart de ses journées seul dans l’appartement qu’elle lui mettait à disposition.

L’expert neuropsychiatre mandaté dans le cadre de l’affaire retient une «altération de son discernement» (article 71. 1 du code pénal) chez le prévenu : «Il est accessible à une sanction pénale, mais doit suivre un traitement psychiatrique.» Sans motivation de sa part, le pronostic resterait toutefois incertain.

«Combien de garçons portent un short bleu et un sac banane à Esch?» La défense exprimera ses doutes sur l’identité de l’auteur, car la description de l’agresseur ne colle pas avec le comportement du jeune homme. «Il a du mal avec les cris et les situations mouvementées», appuiera l’avocate Me Laura May plaidant l’acquittement du prévenu.

Or pour la représentante du parquet, les déclarations de l’adolescente, âgée aujourd’hui de 16 ans, sont bien crédibles. «On voit qu’elle est totalement traumatisée.» Et de rappeler : «Dans la plupart des dossiers de viols, il n’y a pas de témoin.» L’enquête aurait confirmé ses déclarations quant au lieu de l’agression et à l’auteur. «Sabrina a reconnu le sac banane que la police a saisi au domicile du prévenu.» Enfin, il y a l’expertise de crédibilité qui figure au dossier : elle n’a détecté aucun élément de vengeance ou de besoin d’attention. Ce qui fait dire à l’expert que les déclarations de l’adolescente se basent sur «un vécu authentique».

«Un danger pour la société»

À l’heure actuelle, le prévenu se trouve derrière les barreaux. La parquetière n’a pas caché sa peur : «Quand on voit qu’il n’est pas prêt à suivre un traitement, le jour où il sortira, il constituera un danger pour la société.» Voilà pourquoi elle demande de prononcer huit ans de réclusion – la peine tiendrait compte de l’altération du discernement – avec une éventuelle obligation de soins. Elle demandera aussi l’interdiction d’exercer une activité professionnelle, bénévole ou sociale impliquant un contact habituel avec des mineurs. En début d’audience, Me Luc Majerus, représentant l’adolescente et ses parents, a réclamé des dommages et intérêts. Pour l’avocat des parties civiles, c’est à cause du refus de soins du prévenu qu’on en est arrivé là : «Aujourd’hui, Sabrina doit prendre des médicaments. Des médicaments que Monsieur refuse de prendre depuis dix ans…»

Prononcé le 22 juillet.

*Le prénom a été modifié

Fabienne Armborst

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