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Près de Bordeaux, un faux prince et une vraie vitrine


Vincent Merchadou, 28 ans, a été bombardé prince par son groupe d'amis du lycée. (Photo : afp)

Couronne en laiton, manteau de sacre, costumes d’apparat… La principauté d’Hélianthis, royaume imaginaire créé par des passionnés pour faire rayonner la ville de Blaye, a convié d’autres micronations au couronnement «pas trop sérieux» de son prince.

De la Principauté d’Aigues-Mortes (Gard) à la République du Saugeais (Doubs), en passant par le Grand-Duché de Kuragon (Marne) ou la Principauté de Shedingeh (Italie), une vingtaine de délégations étaient attendues à la citadelle Vauban de Blaye pour le couronnement de Vincent Ier. L’occasion pour la centaine de sujets de cette principauté «culturelle et humoristique» de célébrer sa dixième année d’existence… Mais surtout de mettre en valeur le patrimoine de la commune, à 40 km au nord de Bordeaux, à l’image d’autres pseudo-États qui essaiment à travers le monde et tentent de promouvoir des causes ou des territoires.

«On trouvait tellement drôle l’idée de faire un petit pays à titre folklorique et humoristique pour faire parler de Blaye, qu’on s’est dit : « on va essayer« », explique Vincent Merchadou, 28 ans, bombardé prince par son groupe d’amis du lycée. Cela aurait pu être la «Principauté de Blaye», en hommage à la figure historique locale, le troubadour Jaufré Rudel, surnommé «le Prince de Blaye». Mais pour ne pas associer les habitants malgré eux, ils ont retenu le nom imaginaire d’«Hélianthis». «Et on s’est rendu compte, plusieurs années après, que c’était le nom d’un topinambour!», s’amuse Vincent Merchadou, juriste dans une collectivité locale.

«Le roi Charles nous a un peu devancés»

En dix ans, la principauté a pris de l’ampleur, une association a été créée pour financer ses activités et Hélianthis a même organisé, en 2022, le congrès de l’Organisation de la micro-francophonie (OMF), qui réunit plus de 20 micronations. L’étape d’après, c’était le couronnement, explique Vincent Merchadou : «À chaque fois qu’on se présente à un partenaire, la boutade à la fin, c’est : « Et vous avez une couronne? » À force de l’entendre, on s’est dit qu’on allait faire quelque chose. Le roi Charles nous a un peu devancés, mais il a plus de budget!»

L’évènement, une cérémonie-concert qui a eu lieu samedi dernier, a encadré un couronnement «décalé» et «pas trop sérieux», tel que l’avait promis le prince, qui assure que sa micronation n’est ni politique ni religieuse. Hélianthis a reçu le soutien de la mairie qui a mis à sa disposition une salle de la citadelle Vauban, inscrite au Patrimoine mondial de l’Unesco. «Il est important pour nous, petite sous-préfecture, d’aider et d’accompagner toutes les initiatives d’associations et de leurs bénévoles», assure Yoann Brossard, adjoint chargé de la culture et du tourisme.

Dans des coins où il n’y a pas grand-chose, des zones rurales, tout à coup apparaît une entité un peu originale

Ce projet « atypique » permet de situer sur la carte le Blayais et son vignoble, veut croire Emmanuelle Miller, grand maître de la Connétablie des vins de Blaye, confrérie qui défend l’appellation Blaye-Côtes de Bordeaux. «Les micronations s’invitent entre elles, ça fait parler de nous. Ça peut déclencher un voyage dans le sud-ouest de la France», estime cette vigneronne qui présidera la cérémonie avec ses pairs.

Parmi les invités figure Michel Vichat, «responsable général» de la République anacratique du Padrhom, acronyme pour «Pays des droits de l’Homme», basée à Pessac, dans l’agglomération bordelaise. «Avec Vincent, on s’est rencontré par le biais des micronations et comme on s’apprécie, j’y serai pour rendre hommage à son travail», explique ce professeur de SVT en collège.

«Ça peut créer un effet de curiosité»

Par le passé, d’autres micronations à vocation touristique ont éclos à travers le monde, comme Seborga, en Italie, ou Laàs, dans les Pyrénées-Atlantiques. «Dans des coins où il n’y a pas grand-chose, des zones rurales, tout à coup apparaît une entité un peu originale, avec des symboles, une douane, une boutique, des événements, des festivités, des cérémonies… Ça peut créer un effet de curiosité, un engouement», analyse l’historien Bruno Fuligni.

Mais tout n’est pas rose dans le monde des micronations, où des désaccords politiques peuvent exister, relève l’auteur du livre Royaumes d’aventure : ils ont fondé leur propre État, sorti en 2016. Michel Vichat se souvient ainsi d’un «gros clash» avec des homologues russes, «bien avant la guerre en Ukraine» : «Il y a eu rupture de relations diplomatiques entre micronations francophones et micronations russes, pour cause de non-acceptation des droits LGBT.»

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