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Portugal : le bras de fer entre les infirmiers et le gouvernement se durcit


Les manifestants se disent "révoltés par l'action du gouvernement contre les infirmiers". (photo AFP)

Une grève des infirmiers portugais s’est étendue vendredi à trois nouveaux hôpitaux en dépit d’une réquisition gouvernementale contestée par les syndicats à l’origine de ce mouvement qui a déjà provoqué le report de centaines d’opérations chirurgicales.

Cette grève dite « chirurgicale » mobilisait vendredi « la majorité des infirmiers des blocs opératoires » de dix hôpitaux publics, alors qu’elle avait commencé début février dans sept établissements, a déclaré un des chefs du mouvement.

« La grève n’est pas terminée. Les infirmiers continuent leur combat » pour réclamer de meilleurs salaires, a ajouté Carlos Ramalho, le président du Syndicat démocratique des infirmiers portugais, un des deux syndicats minoritaires qui ont lancé cet arrêt de travail censé durer jusqu’à fin février.

Le gouvernement socialiste avait décidé jeudi de réquisitionner les infirmiers en faisant valoir que l’impact de la grève était « trop pénalisant » pour les patients et que l’obligation de service minimum prévue par la loi n’avait pas été entièrement respectée. Selon le dernier bilan établi par le ministère de la Santé, la grève avait provoqué jusqu’à lundi le report de 645 opérations, soit un peu plus de la moitié des interventions prévues.

Une première grève de ce type avait provoqué l’annulation ou le report de près de 8 000 opérations au cours des cinq dernières semaines de 2018. Les infirmiers du service public réclament des hausses de salaires, une meilleure rémunération des heures supplémentaires et le dégel des promotions bloquées par la cure d’austérité imposée pendant la crise financière. La paralysie des blocs opératoires par une minorité d’infirmiers, environ 1 200 sur les 42 000 que compte le service national de santé selon les organisateurs, avait été taxée de « sauvage » et « illégale » par le Premier ministre socialiste Antonio Costa.

Payés 1 200 bruts par mois

Pourtant critiques de la politique sociale du gouvernement, les puissants syndicats proches du Parti communiste ont eux aussi pris leurs distances vis-à-vis de cette grève capable de s’installer dans la durée grâce à des dons collectés sur internet. Le président de la République, le conservateur Marcelo Rebelo de Sousa, a lui-même mis en doute la légalité d’un mouvement financé par l’intermédiaire d’une plateforme de crowdfunding acceptant des contributions anonymes.

Les syndicats des infirmiers en grève affirment toutefois agir légalement, ajoutant que les services minimum ont bien été assurés. Ils ont annoncé vendredi leur intention de saisir les tribunaux pour s’opposer à une réquisition gouvernementale qu’ils estiment « injuste et inutile ».

Cette mesure, employée une trentaine de fois depuis sa création en 1974, est prévue par la loi pour faire face à des situations d’urgence ou assurer des services d’intérêt public essentiels. « D’après nos informations, les services minimum étaient bien respectés », a souligné la bâtonnière des infirmiers, Ana Rita Cavaco. « Le gouvernement doit négocier », a-t-elle ajouté devant la presse vendredi matin, entourée de dizaines d’infirmières et infirmiers en colère face à l’hôpital Santa Maria à Lisbonne, le plus important du pays et un des trois établissements auquel le mouvement s’est étendu vendredi.

Parmi ces protestataires, Rui Nunes s’est dit « révolté par l’action du gouvernement contre les infirmiers ». Il se plaint notamment de gagner « 1 201 euros bruts par mois » alors qu’il est infirmier en bloc opératoire à l’hôpital Santa Maria depuis une vingtaine d’années. « Nous sommes de plus en plus surchargés. Nous demandons la retraite à 57 ans, contre 65 actuellement, en raison des conditions difficiles dans lesquelles nous exerçons notre métier » a-t-il déclaré, en ajoutant que son horaire de 35 heures de travail par semaine est « rarement respecté ».

LQ/AFP

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