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Le « revirement » italien sur les bateaux d’ONG suscite espoir et attente


Le bateau qui vient en secours aux migrants est de nouveau accepté, ce mardi, en Italie. Une exception ou une nouvelle politique qui entraînera un nécessaire changement au niveau de la répartition en Europe derrière ? (Photo : AFP).

Un « revirement » qui ouvre potentiellement « une nouvelle ère » : après des mois de blocage, la réouverture des ports italiens aux bateaux d’ONG secourant des migrants en mer est perçue comme un changement de paradigme majeur en Méditerranée. A condition d’être pérennisée rapidement.

L’association SOS Méditerranée a reconnu, mardi, avoir été « surprise » lorsque les autorités italiennes ont confirmé que son navire humanitaire, l’Ocean Viking, pouvait bien débarquer samedi ses 82 migrants sur l’île de Lampedusa. Un mois plus tôt encore, lors de la première mission de ce bateau, l’Italie de Matteo Salvini avait catégoriquement refusé qu’il rentre dans ses eaux.

Cela faisait 15 mois que Rome s’était fermée à ces navires, précisément depuis le 9 juin 2018, lorsque l’Italie avait refusé d’accueillir les 630 rescapés de l’Aquarius, prédécesseur de l’Ocean Viking. Depuis, l’ex-ministre italien de l’Intérieur, tenant d’une ligne radicale sur l’immigration, n’est plus aux responsabilités : le feu vert est intervenu quelques jours seulement après l’entrée en fonction d’un nouveau gouvernement, fruit d’une alliance entre le Mouvement 5 Etoiles (M5S) et le Parti démocrate (gauche).

Un signe à concrétiser

« Nous sommes très heureux de ce signe qu’a donné l’Italie », qui revient ainsi « à la table européenne des négociations », s’est félicitée lors d’une conférence de presse à Paris la directrice générale adjointe de SOS Méditerranée, Fabienne Lassalle. « D’une situation catastrophique, on est peut-être désormais au début d’une nouvelle ère », a-t-elle ajouté. Un satisfecit qui n’empêche pas Mme Lassalle de rester « extrêmement attentive ». « Il y a eu une exception, mais le décret renforçant la répression contre les bateaux est toujours en place. C’est un premier signe qui doit maintenant être concrétisé par un accord à Malte », où une réunion ministérielle européenne est prévue le 23 septembre, en vue de trouver un accord sur un mécanisme temporaire de répartition, a-t-elle souligné.

« Logique que les autres fassent des efforts aussi »

« C’est un vrai revirement. Jusqu’ici, l’Italie disait ‘On n’accueille pas les bateaux et on ne participe pas à l’effort collectif’. Maintenant, non seulement elle accueille le bateau, mais en plus elle participe à l’effort à part égale avec la France et l’Allemagne », confie un diplomate européen, en référence aux 24 migrants de l’Ocean Viking que les italiens se sont engagés à accueillir. « Cela va faciliter les négociation européennes. Les autres pays ne pourront pas dire ‘Puisque le pays de débarquement ne fait pas d’effort, pourquoi en ferions-nous ?’. Désormais, il serait logique que les autres fassent des efforts aussi », souligne ce diplomate. La France, l’Allemagne, l’Italie, Malte ainsi que la présidence finlandaise du Conseil de l’Union européenne seront réunis lundi pour déterminer où les bateaux doivent accoster. L’objectif étant d’aboutir, le 8 octobre au Luxembourg, à un accord sur un mécanisme permettant de répartir automatiquement les migrants secourus entre plusieurs pays européens.

932 morts en Méditerranée en 2019

Pour l’instant, comme cela a été le cas pour l’Ocean Viking samedi, ces débarquements font l’objet de négociations européennes, parfois longues, au cas par cas. Or, dénonce Fabienne Lassalle, « chaque jour en mer est un jour en trop », car la situation en Méditerranée est « paroxystique : on a vu augmenter très nettement le taux de mortalité sur cette zone », avec 646 décès depuis début 2019, selon les chiffres de l’association. Selon l’agence des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), ce sont 932 personnes qui ont péri en Méditerranée en 2019. « Désormais, on estime qu’un migrant sur 10 qui tente la traversée trouve la mort », déplore encore Mme Lassalle. « En 2017, c’était un sur 46. »

D’après le ministère français de l’Intérieur, 7 900 arrivées ont été répertoriées à Malte ou en Italie depuis début 2019, une tendance en forte baisse depuis 2016, quand 181.000 migrants avaient rejoint les côtes de ces pays après avoir traversé la Méditerranée. Réouverture des ports italiens ou non, les ONG qui portent secours en mer « ne doivent pas être toutes seules », rappelle Céline Schmitt, porte-parole du HCR France, qui appelle de ses voeux une nouvelle mission étatique de l’ampleur de Mare Nostrum, vaste opération de secours italienne lancée en 2013. Matteo Salvini a interprété autrement la situation : « Et voilà, les ports ouverts sans limite. L’Italie redevient le camp de réfugiés de l’Europe », a-t-il dit.

AFP

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