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Ebola en RDC : « la situation est inquiétante »


Des soignants enfilent leur équipement de protection individuelle avant d'entrer dans la zone à haut risque d'un centre de traitement Ebola. (Photo Alexis Huguet / MSF)

L’épidémie qui frappe l’est de la République démocratique du Congo depuis août 2018 a repris de plus belle ces trois derniers mois. Plus de 2 100 cas de personnes atteintes du virus Ebola ont été confirmés.

« La situation est inquiétante », alerte d’emblée Antoine Gauge, responsable « urgence Ebola » pour Médecins sans frontières (MSF), basé à Goma, dans le Nord-Kivu, une province située au nord-est de la République démocratique du Congo (RDC), contacté hier par téléphone.

Dans cette région et l’Ituri voisine, toutes deux en proie à des conflits interethniques et sous le joug des violences de groupes armés, une épidémie d’Ebola a été officiellement déclarée le 1er août 2018.

Si pendant sept mois, le nombre de cas confirmés s’est maintenu sous la barre des 1 000, il a depuis le mois de mars bondi. « On compte à l’heure actuelle 2 100 cas de personnes atteintes du virus Ebola, annonce Antoine Gauge. On est très inquiets vis-à-vis de la situation épidémiologique parce que le nombre de cas a à nouveau augmenté, mais aussi parce qu’un certain nombre de cas confirmés ont eu des contacts non identifiés, ce qui est très préoccupant. »

Il faut dire que la maladie est particulièrement virulente : elle peut se contracter par contact avec une personne infectée, vivante ou décédée ou par contact avec des objets souillés par les liquides biologiques (sang, salive, urine, sperme, selles…) d’un malade, tels que des vêtements, de la literie, etc.

Méfiance de la population locale

Mais le personnel soignant doit en plus faire face à une défiance particulièrement vive de la part des habitants de ces régions.

«La communauté est très réticente vis-à-vis de tous les acteurs de la réponse à l’épidémie d’Ebola. Ils font beaucoup plus confiance au personnel de leurs structures locales», détaille Antoine Gauge. Plusieurs raisons à cela : dans ces zones traumatisées par des décennies de violence, on se méfie de tous ceux qui sont étrangers («y compris des Congolais venant d’autres régions», précise le responsable), et souvent, les structures dédiées à la prise en charge des malades d’Ebola sont perçues comme des endroits où l’on attrape la maladie, ou dont on ne sort pas vivant.

Les pratiques culturelles sont également un enjeu important dans cette lutte contre Ebola, notamment en ce qui concerne l’inhumation des personnes décédées de la maladie. Les fluides étant contaminants, l’enterrement doit en effet être sécurisé et effectué par des équipes spécialement formées. Hors de question pour les proches de manipuler le corps. « Cela suscite souvent une incompréhension, surtout dans un moment déjà difficile pour les familles. Mais il y a une nécessité de protection très stricte. On donne cependant en général le droit à la famille et aux proches de voir le corps. »

« Un gros travail de sensibilisation doit être fait, reconnaît Antoine Gauge. MSF croit beaucoup dans le management communautaire. On essaie donc de tisser des liens avec les acteurs locaux et surtout on commence à travailler dans des structures sanitaires existantes en prenant en charge non seulement Ebola mais également d’autres pathologies qui sont les principales causes de mortalité dans cette région, comme la malaria, les diarrhées et les infections respiratoires. On essaie de former les équipes sur place aux précautions minimales pour prendre en charge en période transitoire un cas suspect. »

Le tout, en faisant face à une insécurité générale. En février dernier, deux centres de traitement Ebola, à Katwa et à Butembo, ont été violemment attaqués et incendiés, limitant encore l’accès aux soins.

Tatiana Salvan

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