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[Eurovision] L’italienne Angelina Mango ne s’ennuie pas 


Si l’auteure-compositrice-interprète a un passé, elle cherche surtout à se construire un futur avec ses tubes enlevés mélangeant pop, rap et R’n’B. (Photo AFP)

Elle est l’une des stars de l’Eurovision, et parmi les favoris à la victoire finale : après l’Italie, Angelina Mango veut conquérir le monde. Seule certitude : avec elle, on ne s’ennuie pas.

Au cœur du Clarion Hotel qui abrite plusieurs délégations, il faut montrer patte blanche et franchir différents check-points pour arriver jusqu’à Angelina Mango, entourée de sa garde. C’est que la jeune femme, 23 ans, est un phénomène. Quelques faits en témoignent : des disques d’or et de platine, une tournée qui affiche complet et des chansons qui cartonnent dont la dernière, La noia (L’Ennui), qui dépasse les 60 millions de vues sur Spotify – la même qui lui a permis de gagner le festival de Sanremo en février et de décrocher son ticket pour l’Eurovision.

Si l’auteure-compositrice-interprète a un passé (elle est la fille du chanteur Giuseppe Mango, décédé sur scène en 2014 à l’âge de 60 ans), elle cherche surtout à se construire un futur avec ses tubes enlevés mélangeant pop, rap et R’n’B, dans lesquels elle parle des attentes et des angoisses de la génération Z qu’elle représente. Avec douceur et de sa voix un brin éraillée, elle se confie au Quotidien. Rencontre.

Comment vous sentez-vous avant la finale de samedi ?

Angelina Mango : Honnêtement, pour l’instant, je ne ressens pas le stress ni la peur. J’en ai juste assez d’attendre. Je veux monter sur scène pour chanter et danser. C’est tout.

Qu’est-ce que représente l’Eurovision pour vous ?

C’est d’abord et surtout une surprise, quelque chose d’inattendu qui est arrivé jusqu’à moi. L’Eurovision, c’est un sacré truc! Je suis partagée entre l’envie de m’amuser, et celle d’être sérieuse car une telle opportunité ne se prend pas à la légère. Grâce à ma présence ici, ma musique peut en effet voyager, traverser les frontières. C’est quelque chose qui ne se néglige pas, surtout quand on est au tout début d’une carrière. Je veux apprendre de cet évènement.

Comment le concours est-il vu en Italie ?

Comme pour d’autres nations, l’Eurovision est quelque chose qui prend de l’importance en Italie, notamment auprès des plus jeunes, de plus en plus intéressés. Je ressens derrière moi le soutien de tout un pays, et de tout un public.

La victoire de Måneskin en 2021 a-t-elle donné plus de crédibilité à l’Eurovision dans votre pays, où le festival de Sanremo reste le plus gros rendez-vous musical de l’année ?

(Elle hésite) Je ne sais pas, mais c’est envisageable. Disons qu’en tant que représentante de la nouvelle génération, c’est à nous qu’appartient ou non la possibilité de changer les choses. Nous sommes le futur. À nous de l‘écrire.

J’ai passé ma vie à répondre aux attentes des autres. Désormais, je veux exister à travers les miennes

Mais Sanremo reste un institution difficile à déboulonner…

C’est vrai. En Italie, Sanremo, c’est comme les fêtes de Noël : les gens l’espèrent, aussi impatients qu’un enfant qui attend d’ouvrir ses cadeaux (elle rit). C’est une grande tradition. Pas seulement une compétition, mais une célébration de la musique. Mieux : c’est le miroir de ce qu’est l’Italie dans ce qu’elle a de plus moderne et de plus conventionnel.

À ce propos, parlez-nous de votre Sanremo cette année…

C’était une surprise, à tout point de vue. Il ne faut pas oublier que je débute dans la chanson, dans le métier, alors, être à Sanremo, c’était très impressionnant. Quand je me suis lancée dans cette expérience, je savais que je devais l’aborder positivement, sans me mettre de pression. Quand j’ai gagné, je n’y croyais pas. C’était dingue! Je pense que ma sérénité m’a servi à ce moment-là.

Votre chanson, La noia, est un hymne à l’ennui. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Les gens voient l’ennui comme quelque chose de négatif. Avec cette chanson, j’ai voulu changer de point de vue. Aujourd’hui, dans ce monde où tout va très vite, on n’a en effet plus l’occasion de s’ennuyer. Tout est à portée de main pour faire passer le temps. Alors que faire une pause et ne rien faire, ça fait du bien!

Est-ce votre cas ?

Vous savez, je suis Bélier. On est du genre à foncer, à ne jamais tenir en place. Du coup, j’essaye de m’accorder tous les jours dix minutes de pause, pour me concentrer sur moi-même. On ne prend plus le temps de se poser pour réfléchir ou simplement pour souffler. C’est pourtant essentiel. On l’oublie trop facilement.

Avez-vous eu l’occasion de souffler pendant cet Eurovision ?

(Elle rit) J’essaye, mais ça n’a rien d’évident. Du coup, je me lève tôt pour avoir un petit moment, juste pour moi. Grâce à ça, je suis focalisée, mieux concentrée sur cet évènement durant lequel on est constamment sollicité. Je ne veux rien manquer ni oublier.

N’y a-t-il vraiment rien qui vous ennuie dans la vie ?

Disons que les gens qui n’arrêtent pas de parler que d’eux-mêmes, au bout d’un moment, oui, ça m’ennuie. C’est d’ailleurs peut-être mon cas!

La noia utilise des rythmes latins, particulièrement la cumbia. Est-ce une façon d’être à la mode ?

Plutôt un moyen d’être cohérent avec le concept et le message de la chanson. En Colombie, la cumbia est un exutoire, quelque chose que l’on écoute pour échapper aux dures réalités, pour s’échapper. C’est l’idée que j’essaye de faire passer avec ce morceau. Et puis j’aime le principe qui dit que la musique n’a pas de frontières, pas de limite. Qu’elle peut nous faire voyager sur la piste de danse, de Bogota à Mexico!

Et jusqu’au Luxembourg, où il y a une importante communauté italienne ? 

Pourquoi pas. Il faudrait que j’y vienne faire un tour.

En Italie, quand on parle de vous, on pense aussi à votre père. Quel est son héritage ?

Quand je pense à mon père, je vois plutôt ce qu’il m’a laissé en tant que personne, et moins musicalement. C’est plus important de sentir la présence et l’influence de mes parents dans ce que je suis, en tant que personne, et non dans ce que je fais.

Le festival de Sanremo, c’est le miroir de ce qu’est l’Italie

Vous avez de l’expérience et du succès en Italie. Est-ce que ça vous permettra de faire la différence samedi ?

Non, je ne le pense pas. À mes yeux, fondamentalement, on est tous à la même place, au même endroit, à faire la même chose. Selon moi, on est sur la même ligne de départ, que l’on ait trois personnes qui vous écoutent ou trois millions. Car le plus important dans l’Eurovision, c’est le message que vous comptez faire passer, pas un classement final.

Avez-vous vu ce que proposent les autres pays et qu’en avez-vous pensé ?

Oui, bien sûr. Pas tous mais la plupart. Durant les présentations ou les répétitions, on a l’occasion de voir et d’entendre ce que font les autres artistes. On se rencontre, on parle, on échange… Ce que je trouve bien, c’est que tous les pays gardent une part de tradition dans leur proposition. Par exemple, j’ai vu des instruments que je ne connaissais pas jusqu’à maintenant. Je me suis dit « mais qu’est-ce c’est que ça? ». Je risque d’être franchement inspirée quand je vais rentrer en Italie!

Quelles sont vos attentes pour la finale ?

Honnêtement, je n’ai pas vraiment d’attente. Je suis du genre à aimer me laisser porter… Si en fait, j’ai en une : tout donner pour ne pas avoir de regrets quand je descendrai de scène. Samedi, je veux montrer l’image d’une jeune femme de vingt ans qui s’amuse, libre, sans filtre, sans masque. En toute honnêteté. Si j’y arrive, ce sera ma victoire.

Être l’une des favoris de l’Eurovision, cela ne vous oblige-t-il pas à avoir certaines ambitions ?

J’ai passé ma vie à répondre aux attentes des autres. Désormais, je veux exister à travers les miennes. L’avis des bookmakers, ou l’amour que l’on me porte, oui, c’est positif, mais ils me permettent surtout d’engranger de la confiance pour avancer selon mes propres règles.

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