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Rives de la Sûre – Le (bon) sens coule dans ses vignes


Le remembrement de Langsur a été une œuvre de diplomatie de haute volée. Mais autant il a été difficile à mettre en place, autant aujourd’hui, il est loué par tous.

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Les nouvelles terrasses permettent de revaloriser un coteau qui avait souffert de l’autoroute et du pont. (Photo : DR/ONR)

Vendredi, après-midi, les flocons tombent dru à Esch-sur-Alzette. En ville, les trottoirs sont blancs et sur l’autoroute, les saleuses jettent leur cargaison sur des parebrises qui ne leur ont rien fait. À la radio, les « points routes » enfilent les annonces de voies bloquées comme des nouilles sur un collier de fête des Mères.

Trois quarts d’heure à bénir le talent des pneus neige plus tard, à Mertert, tout va bien. De la neige ? Où ça ? Sur la Moselle, on rigole bien des péripéties de ceux qui viennent du Sud et de la capitale. « C’est la Moselle ! rigole Aly Leonardy, vigneron et échevin du cru. Il y a toujours quelques degrés de plus. Si on fait du vin ici et pas ailleurs, ce n’est pas un hasard ! »

C’est vrai, le Luxembourg n’est un petit pays que pour ceux qui ne le connaissent pas.

À Mertert, donc, on se moque de la météo et on loue la persévérance des hommes qui ont rendu possible un projet d’une complexité redoutable. Sur les rives de la Sûre, juste au nord de Wasserbillig, il a fallu dix ans pour finaliser ce qui est certainement l’un des remembrements les plus compliqués que le pays ait jamais connus.

> 53 hectares, 133 propriétaires

Charles Konnen, aujourd’hui jeune retraité, a passé ses dernières années à la direction de l’Office national du remembrement à porter et déminer le sujet. « Ce remembrement est à la foi reconnu sur le cadastre comme une zone viticole et une zone habitat Natura 2000.

C’est-à-dire que deux législations se superposaient ici », explique-t-il dans un sourire, heureux de voir que, finalement, ses efforts ont fini par payer. « En fait, tout était sujet à problème et il a fallu négocier chaque point avec les vignerons et les services de l’environnement. Le plus important, c’était de toujours penser de manière positive et de chercher à trouver méthodiquement les solutions les unes après les autres. »

Pour redistribuer les 53 hectares répartis entre 133 propriétaires, soit 571 parcelles d’une superficie moyenne de 9 ares, il a fallu de la patience, beaucoup de patience… Aujourd’hui, 54 personnes se partagent 174 parcelles (30 ares en moyenne), et c’est bien plus clair.

> « Plein Sud, on ne peut pas faire mieux »

Le challenge a été de trouver un compromis qui, finalement, satisfasse les deux parties. Sur ces coteaux, autrefois entièrement plantés de vignes, mais alors pratiquement en friche, il a été décidé de ne créer que quelques îlots de vignes (8 hectares en tout) qui devraient nécessairement être plantés en terrasses et cultivés de manière biologique.

On vous passe les vigoureuses prises de bec sur l’orientation des rangs, la densité de plantation ou le tracé des chemins d’accès. Ce ne sont plus que des sujets de plaisanteries entre initiés, mais cela n’a pas toujours été le cas…

Aujourd’hui, pourtant, ce remembrement est l’exemple que tout ce travail a fini par payer. Si l’accouchement a été douloureux, tout le monde s’accorde à dire que c’est un beau bébé qui a vu le jour.

Les vignerons se réjouissent de travailler un fameux terroir : « Il est orienté plein Sud, on ne peut pas faire mieux, avance Aly Leonardy qui a vendangé ici en 2014 les premières vignes bio de Vinsmoselle. Les 800 litres de riesling sont formidables, ils tiraient 86 ° Oechsle dans la cuve. »

Fernand Etgen, le ministre de l’Agriculture et de la Viticulture, se félicitait de tous les bénéfices induits par ce grand projet. « La construction de l’autoroute et du pont frontalier avec l’Allemagne avait abîmé ces lieux. Avec ce remembrement, nous avons réparé le paysage et c’est une bonne chose pour le tourisme et donc pour l’économie. Sans compter les bénéfices pour l’environnement et la création de nouveaux terroirs de grande qualité pour notre vignoble », s’enthousiasme-t-il.

Bref, tout est bien qui finit bien !

De notre journaliste Erwan Nonet

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