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[Expo] Luxembourgeois, ils ont servi la France lors de la Première Guerre mondiale


L’historien Denis Scuto : «Cette exposition est le fruit de cinq ans de travail d’enquête.» (Photo : Hervé Montaigu)

La nouvelle exposition temporaire du musée Dräi Eechelen à Luxembourg propose de découvrir les parcours personnels de légionnaires luxembourgeois lors de la Première Guerre mondiale.

C’est pour eux qu’a été érigée la Gëlle Fra, mais on les connaît peu : qui étaient les légionnaires luxembourgeois? Pourquoi ont-ils décidé de s’engager pour servir la France? Comment ont-ils vécu la guerre? La nouvelle exposition temporaire du musée Dräi Eechelen propose de partir à la rencontre de ces hommes qui, un jour, ont décidé de quitter leur terre natale, le Luxembourg, pour partir faire la guerre aux côtés des troupes françaises.

À travers de nombreux objets et documents, cette coopération entre le musée et le Luxembourg Centre for Contemporary and Digital History (C²DH) de l’université du Luxembourg explore les parcours singuliers de quelques-uns de ces légionnaires luxembourgeois qui ont vécu au début du XXe siècle.

Environ 1 000 Luxembourgeois seraient partis combattre pour la France.

«Avec cette exposition, fruit de cinq ans de travail d’enquête, les visiteurs vont découvrir l’histoire croisée des légionnaires luxembourgeois lors de la Première Guerre mondiale et celle des migrations vers la France, qui a débuté plus tôt», explique Denis Scuto, directeur adjoint du C²DH. «Nous prenons appui sur les connotations ambivalentes de la Légion étrangère, perçue tantôt comme un corps d’élite, tantôt comme une bande de mercenaires, pour retracer les trajectoires personnelles de certains Luxembourgeois engagés aux côtés de la France.»

Parmi eux : Arthur Diderrich, issu d’une famille d’hôteliers à Mondorf, qui publiera, après la guerre, un récit détaillé de son expérience et deviendra fonctionnaire colonial à Djibouti. Henri Olsem, dentiste à Belfort, menacé d’internement parce que sans papiers, qui rejoignit la Légion pour échapper à son sort. Michel Schmit qui, armé de son Vest Pocket Kodak Camera, photographiera la vie dans les tranchées et même quelques combats, alors que c’était interdit. Joseph Laux, qui décrira ses craintes et ses espoirs dans sa correspondance avec son épouse et ses enfants. Edmond Grethen, qui poursuivra sa vocation militaire et deviendra inspecteur en chef de la Garde indochinoise avant d’être exécuté par les Japonais en 1945. Et bien sûr François Faber, sans doute le légionnaire luxembourgeois le plus célèbre, coureur cycliste qui remporta le Tour de France en 1909 avant de s’engager en 1914 et de trouver la mort un an plus tard lors de la bataille de l’Artois.

Le cycliste luxembourgeois François Faber, vainqueur du Tour de France en 1909, s’était engagé dans la Légion.

Tous ces hommes venaient de milieux très divers : artisans, ouvriers du bâtiment, commerçants, agriculteurs, ouvriers de l’industrie, etc. D’après les récits collectés, c’est surtout la pauvreté qui a poussé un grand nombre d’entre eux à s’engager. Viennent ensuite la volonté de fuir une condamnation ou une persécution politique, la soif de voyage ou simplement des déboires sentimentaux. La Légion incarnait pour eux la promesse d’une nouvelle vie, un contrat de travail de cinq ans, une carrière d’aventures dans les colonies. Après un passage en Algérie pour recevoir leur formation militaire, les légionnaires luxembourgeois rejoignaient le front, sur les différents théâtres d’opération.

On ne sait pas exactement combien sont partis rejoindre les rangs de la Légion. «Difficile de savoir», répond Denis Scuto, «d’abord parce que, selon l’époque et les intérêts politiques, les chiffres diffèrent. Ensuite, parce qu’un grand nombre d’entre eux sont devenus français. Certaines sources évoquent 3 000 hommes, d’autres, plus de 8 000. D’après nos recherches, ils étaient environ un millier», poursuit-il.

Au fil de l’installation qui a été travaillée comme une véritable scénographie, le visiteur est plongé dans l’univers de l’époque grâce à des vidéos, une bande-son originale et des projections sur fenêtres transparentes. «Un espace très fragmenté invite aussi à s’approcher et à regarder de plus près ce qui se trouve dans les vitrines : une façon de confronter le visiteur à la complexité de ces parcours. Nous n’avons pas voulu de chronologie ou de message linéaire», ajoute l’historien. Chaque visiteur crée son propre cheminement dans ce dédale de petites histoires mêlées à la grande.

Christelle Brucker

«Légionnaires. Parcours de guerre et de migrations entre le Luxembourg et la France», exposition du 1er juillet au 28 novembre au musée Dräi Eechelen (m3e.lu) à Luxembourg. Visites guidées les mercredis et dimanches. Catalogue de 248 pages disponible en librairie, au musée et sur www.mnha-shop.lu.

Un rallye à travers la ville

Pour prolonger l’exposition hors des murs du musée, le VR/AR Lab et le C²DH de l’université du Luxembourg lancent un grand jeu virtuel ludique dans la capitale. Le «Rallye Légionnaires» propose aux curieux une chasse au trésor numérique accessible via smartphone ou tablette.

Grâce à une carte interactive, les joueurs devront résoudre une série d’énigmes pour atteindre dix lieux secrets. En suivant ce parcours, ils découvriront l’histoire des légionnaires luxembourgeois. En français, allemand, luxembourgeois ou anglais. Accès depuis le site web www.legionnaires.lu

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