Accueil | Grande Région | Frontaliers et dépendance : le mauvais calcul

Frontaliers et dépendance : le mauvais calcul


Les frontaliers français retraités qui touchent des allocations de l’assurance dépendance luxembourgeoise sont peu nombreux. Pour les obtenir, ils doivent avoir cotisé toute leur carrière au Grand-Duché.  (photo archives LQ)

Le ministère de la Sécurité sociale a tenu à apporter des précisions concernant les remboursements des retraités frontaliers français dépendants.

Le sujet a fait réagir aussi bien sur les sites d’informations que sur les réseaux sociaux. Vendredi dernier, la députée française de la Moselle, Isabelle Rauch, avait annoncé un changement prochain de situation pour certains frontaliers français retraités ayant travaillé au Luxembourg concernant la dépendance. Elle expliquait que chaque travailleur frontalier cotisait à l’allocation dépendance du Grand-Duché à hauteur d’environ 1,5 % de son salaire brut. Cela représenterait en moyenne 700 euros par an et par frontalier, précisait la députée française. Soit plus de 60 millions d’euros par an. Mais au moment de la liquidation de la retraite, la bascule vers la Sécurité sociale française privait les cotisants de toute contrepartie venue du Luxembourg concernant la dépendance selon elle.

Elle ajoutait que lorsque ces travailleurs devenaient effectivement dépendants, la prise en charge de cette aide était jusqu’à présent intégralement effectuée dans le cadre de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) par leurs départements français de résidence et non par le Luxembourg. La députée Isabelle Rauch expliquait qu’une solution avait été trouvée entre les différents systèmes de sécurité sociale pour pallier cette incohérence, mais qu’il restait à mettre en place un circuit permettant le reversement de ce remboursement aux conseils départementaux français qui payent l’allocation.

Le ministère de la Santé irrité

La députée se réjouissait que cela soit chose faite à partir de 2024 via un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) côté français. Selon la députée, les conseils départementaux concernés, principalement la Moselle et la Meurthe-et-Moselle, percevront donc une contrepartie luxembourgeoise aux frais qu’ils engagent, pour répondre aux enjeux de dépendance des retraités frontaliers.

Ces affirmations ont apparemment quelque peu irrité le ministère de la Sécurité sociale luxembourgeois qui s’est fendu d’une longue mise au point. Il rappelle ainsi que la coordination des régimes de sécurité sociale entre les États de l’Union européenne et de l’Espace économique européen est régie par des règlements européens. Or, cette réglementation européenne prévoit déjà un remboursement des prestations en matière de dépendance lorsque celles-ci sont prestées dans le pays de résidence de la personne protégée, mais affiliée dans un autre pays.

En pratique et dans le cas franco-luxembourgeois, ceci concerne essentiellement les personnes retraitées résidant en France qui ont toujours été affiliées au Luxembourg et ne possèdent donc pas de carrière d’affiliation en France. Dès lors, ces personnes protégées continuent à être affiliées au Grand-Duché, même lorsqu’elles obtiennent des prestations dépendance en France. Dans ce cas, les autorités compétentes peuvent demander au Luxembourg, et plus précisément à la Caisse nationale de santé (CNS) en tant qu’organisme gestionnaire de l’assurance dépendance, un remboursement des frais pour ces prestations, tel que prévu dans les règlements entrés en vigueur en 2010.

Partant de là, des négociations ou des conventions n’ont pas été requises entre le Luxembourg et la France, car de telles dispositions sont donc prévues dans la réglementation depuis des années.

Pas de remboursement pour les désaffiliés

Le ministère indique que le Luxembourg attend depuis l’entrée en vigueur des règlements précités une demande de remboursement de la part des institutions françaises, selon les procédures et délais définis dans cette même réglementation, pour les prestations dépendance réalisées en France pour le compte de ses assurés. Un ministère qui est surpris d’apprendre que la législation française aurait été adaptée afin que les institutions françaises puissent transmettre ces demandes de remboursement à la CNS. «Pour ce faire, aucune convention ou négociation entre la France et le Luxembourg n’était nécessaire», ajoutent les services de l’État.

En outre, le ministère de la Sécurité sociale doit aussi clarifier que le nombre de personnes concernées et les montants repris dans les communications de la députée ne correspondent pas au nombre de personnes concernées par ces dispositions de remboursement. En résumé, tous les frontaliers français ne sont pas concernés ! En effet, la majorité des travailleurs frontaliers ont une carrière mixte, c’est-à-dire qu’ils ont été affiliés dans au moins deux pays au cours de leur carrière. Dans ce cas, à la retraite, une affiliation au Luxembourg n’est plus possible si la personne bénéficie d’une pension de son État de résidence ! Ce n’est que lorsque la personne continue à être affiliée au Luxembourg qu’un remboursement est possible. Le nombre de frontaliers français concernés est donc très faible. 

Par ailleurs, le taux de cotisation pour l’assurance dépendance au Luxembourg est de 1,4 % sur l’ensemble des revenus de la personne protégée et non de 1,5 % sur le salaire brut, ajoute le ministère. 

PUBLIER UN COMMENTAIRE

*

Votre adresse email ne sera pas publiée. Vos données sont recueillies conformément à la législation en vigueur sur la Protection des données personnelles. Pour en savoir sur notre politique de protection des données personnelles, cliquez-ici.