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[Frontaliers] Compensations : le Luxembourg continue de jouer sa partition


Face au rapport sur une juste fiscalité en zone frontalière adopté par 46 états membres du Conseil de l'Europe, Corine Cahen et le gouvernement luxembourgeois persévère dans une posture de plus en plus difficile à tenir sur le co-développement frontalier (Photo d'illustration : Julien Garroy).

Corinne Cahen s’est exprimée dans les colonnes de notre partenaire du Républicain Lorrain, à propos du projet de recommandation du Conseil de l’Europe sur la juste fiscalité en zone frontalière. Elle considère qu’il existe déjà un partage avec les zones frontalières, en citant les quelques investissements du côté français. Le conseiller régional Grand-Est Jean-Pierre Liouville n’est pas étonné de la réaction du Luxembourg, qui « joue sa partition ». Mais espère que les gouvernements français et allemands vont enfin se saisir du sujet.

Comment avez-vous accueilli le vote invitant les pays à répartir équitablement l’impôt dans les zones transfrontalières, intervenu la semaine dernière au Conseil de l’Europe ?

Corine Cahen, ministre luxembourgeoise de la Grande-Région : « Il existe déjà un partage. Le Luxembourg finance énormément de choses côté français, en vertu des accords signés avec la République française lors de la dernière conférence intergouvernementale. Nous injectons aussi de nombreuses aides à destination des travailleurs frontaliers qui profitent directement au pays de résidence. Je pense aux bourses d’études, aux allocations-chômage, aux prestations familiales, au financement de formations… »

Pourtant, le Luxembourg redistribue une partie de l’impôt payé par les frontaliers belges à leurs communes de résidence. Pourquoi ce qui est possible avec la Belgique ne le serait pas avec la France ou l’Allemagne ?
« C’est un vieil accord. Ceux qui l’ont signé à l’époque avaient peut-être de bonnes raisons de le faire. Nous respectons les engagements passés et les appliquons. Mais nous n’avons pas l’intention de signer un accord de cette nature avec la France et l’Allemagne. »

La philosophie de notre gouvernement ne change pas

Donc le vote du Conseil de l’Europe ne change rien pour vous…
« La philosophie de notre gouvernement ne change pas. Comme nous l’avons toujours dit, nous sommes prêts à cofinancer d’autres projets. Cela nous semble beaucoup plus pertinent. Mais chaque projet financé devra faire l’objet d’un accord bilatéral. »

Les 120 millions que vous allez investir dans le ferroviaire côté français paraissent bien minces au regard des rentrées fiscales considérables dont vous bénéficiez de la part des frontaliers…
« C’est caricatural. Le maire de Metz, qui défend cette position , oublie que la majorité des salaires que nos entreprises versent aux frontaliers bénéficient en grande majorité à son économie locale. Nous sommes heureux de pouvoir compter sur les travailleurs frontaliers et les territoires voisins devraient être heureux de pouvoir bénéficier d’un bassin d’emplois comme celui de Luxembourg. C’est gagnant-gagnant. N’entrons pas dans des guerres stériles. »

Il y a aussi le problème de la dépendance. Le travailleur frontalier cotise pour une assurance dépendance au Luxembourg. Mais lorsqu’il devient effectivement dépendant, il est le plus souvent à la charge de son pays de résidence. Est-ce juste ?
« Il y a des pourparlers sur ce sujet. »

Entretien avec Anthony Villeneuve (Le Républicain Lorrain)

 « L’ensemble des collectivités locales européennes a voté pour dire qu’il faut un partage de la fiscalité »

Jean-Pierre Liouville est conseiller à la région Grand-Est (Photo : Karim Siari / Le Républicain Lorrain).

Jean-Pierre Liouville est conseiller à la région Grand-Est (Photo : Karim Siari / Le Républicain Lorrain).

Le conseiller régional Jean-Pierre Liouville (PS) est membre du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe. Il revient sur la portée du vote de la semaine passée.

Pourquoi le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux s’est-il intéressé à la question du partage de la fiscalité en zone frontalière ?
La mission du Conseil de l’Europe, c’est la paix. Nous nous saisissons donc de tous les sujets conflictuels entre les États membres. L’ancien maire de Genève, qui a présidé notre assemblée, a insisté pour que nous nous intéressions à ce problème, au regard des grandes disparités qui existent un peu partout en Europe.

Ce sujet est officiellement sur la table

Quelle est la portée de ce vote ?
Relativement grande car maintenant, ce sujet est officiellement sur la table. Avant, il n’était porté que par quelques élus locaux en France ou en Allemagne. Aujourd’hui, l’ensemble des collectivités locales européennes a voté pour dire qu’il faut un partage de la fiscalité entre pays d’emploi et pays de résidence. Après, il est évident que ces questions relèvent de la compétence des États. Le comité des ministres va être saisi. Il ne peut ignorer ce vote. Mais c’est aussi aux collectivités locales de faire pression sur les États.

Mais le Luxembourg ne semble pas disposé à suivre la recommandation du Conseil…
Le Luxembourg joue sa partition et c’est bien normal. Aujourd’hui, c’est à la France et à l’Allemagne d’agir pour inviter le Luxembourg à revenir à la table des négociations.

Entretien avec Anthony Villeneuve (Le Républicain Lorrain)

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