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Du charbon à l’hydrogène : un symbole disparaît en Moselle


Le géant de béton est tombé en moins de dix secondes. (Photo : afp)

Quelque 10 000 tonnes de béton détruites en une poignée de secondes : la plus haute tour de la centrale électrique de Saint-Avold a été «foudroyée» ce dimanche.

C’est un imposant symbole qui disparaît du ciel lorrain. Tout près de la frontière allemande, à Saint-Avold, la société qui exploite la centrale Émile-Huchet, GazelEnergie, a dynamité en fin de matinée la tour aéroréfrigérante numéro 5, haute de plus de 120 mètres, dans un panache de fumée grise et sous le regard de centaines de spectateurs captivés.

«C’est une destruction qui, en fait, est une renaissance, puisqu’on détruit cette tour aéroréfrigérante pour pouvoir construire à la place un gros projet de production d’hydrogène qui sera l’avenir du site», a déclaré à la presse Jean-Michel Mazalèrat, président de GazelEnergie.

Sur les six tours aéroréfrigérantes (tours de refroidissement) que comptait le site, il n’en restera qu’une, jusqu’à la conversion totale de la centrale à charbon à la biomasse en 2027, comme l’a souhaité en septembre dernier le président français, Emmanuel Macron.

Émile-Huchet est l’une des deux seules centrales à charbon encore en activité en France, avec celle de Cordemais, en Loire-Atlantique. Toutes deux préparent donc leur conversion à la biomasse, mais le site de Saint-Avold doit devenir une «éco-plateforme» : il est prévu d’autres projets comme «Emil’hy» (pour Émile-Huchet et hydrogène), qui doit permettre à l’horizon 2027 une production d’hydrogène bas carbone et renouvelable, par électrolyse de l’eau.

Les études d’ingénierie sont en cours de finalisation et la concertation publique doit débuter à la fin du mois, a indiqué Camille Jaffrelo, porte-parole de GazelEnergie. «Un dynamitage comme celui-ci, ça a duré sept secondes, un projet d’hydrogène, c’est sept ans», a-t-elle comparé.

Le projet prévoit, pour 2030, une capacité totale de 400 mégawatts et une production de 56 000 tonnes d’hydrogène par an. Dans un premier temps, la phase initiale devra alimenter en priorité l’aciériste allemand Saarstahl Hoolding Saar (SHS), implanté juste en face. Il représente à date un investissement de 780 millions d’euros.

Un «eldorado» en devenir

À l’origine voué à fermer définitivement début 2022, le site a été de nouveau sollicité en janvier 2023 pour sécuriser l’approvisionnement du pays dans un contexte de tension énergétique. Cette année, la centrale à charbon a fonctionné deux semaines en janvier, lors de la période de grand froid, rappelle Camille Jaffrelo. Ces journées ont permis d’avancer vers la conversion à la biomasse du site, avec un test de brûlage de pellets, des granulés de bois.

Filiale du groupe EPH de l’homme d’affaires tchèque Daniel Kretinsky, l’entreprise GazelEnergie se dit «confiante» après ces tests et va proposer une «feuille de route» pour cette conversion.

Un autre projet, baptisé PARKES, de recyclage de plastique, doit aussi s’implanter sur la plateforme de Carling-Saint-Avold. Son énergie renouvelable sera fournie par GazelEnergie. Les porteurs du projet ont annoncé début février un objectif de mise en service «à l’horizon 2027». Il doit induire 200 embauches.

En Moselle-Est, les travailleurs ont subi de nombreuses fermetures de site et font face à la désindustrialisation. «Ici, on réhabilite des friches», se félicite Camille Jaffrelo.

«Il n’y a pas de craintes, pas d’inquiétudes, c’est une fin annoncée, la fin d’une période», a réagi Salvatore Cascarella, le président de la communauté d’agglomération de Saint-Avold. Selon lui, la Moselle-Est commence à «devenir un eldorado» avec plus de deux milliards d’euros d’investissements pour des entreprises nouvelles ou déjà implantées. À terme, tous les projets du secteur doivent générer 2 500 emplois. «Le gouvernement sarrois a débloqué 2,6 milliards d’euros pour décarboner leurs usines. Ils ont l’argent, ils veulent aller très vite, donc nous, il faut construire très vite», a-t-il souligné.

L’autre centrale à charbon française de Cordemais a été bloquée début février par la CGT, disant douter du devenir de son projet de conversion à la biomasse. EDF a répondu que la «décarbonation progressive» de ce site était bel et bien en route, avec jusqu’à «20 % de biomasse en substitution du charbon». Les essais «se sont correctement déroulés», selon l’énergéticien.

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